Braheem: la prémonition

Des secrets et des mensonges

Le muezzin appelait à la prière du fajr:
" la prière est meilleure que le sommeil " le vrai sens de cette phrase semble être " Vaut mieux prier que dormir".
Cela sonne comme une motivation voire une menace pour tout musulman croyant et pratiquant. Par extension, ça peut-être une exhortation pour tout ceux qui croient à une divinité. Dans toutes les religions, la prière constitue la base, le socle du lien sacré qui unit et réunit l'être à son Maître. Que cela soit une mosquée ou une église, une synagogue ou un temple, le principe est le même. Le fidèle accomplit des pratiques rituelles ou culturelles qui ont pour but d'entretenir la pureté de l'âme et sceller par ailleurs l'ancrage de sa foi.

Après la prière, Baye fall remballait ses affaires. C'étaient les quelques bagages qu'il trimballait toujours pendant ses voyages. Au même moment Tonton Alexis sortait de sa chambre en s'étirant laborieusement ses muscles. Son œil droit ne s'ouvrait pas comme s'il ne voulait pas se réveiller. Dans la brume de l'aurore, il voyait son vieux ami s'apprêter à partir.

- Baye fall! Tu pars déjà? Attends le petit déjeuner au moins.
- Merci Alexis mais ça ne sera pas nécessaire.
- Tu as prévenu Braheem?

- non! non! Je ne veux pas le déranger il semblait exténué hier soir.

Alexis avança vers lui et commença à murmurer:

- A propos! On ne lui a pas toujours dit ce qui est arrivé.
- J'ai voulu le lui dire hier soir mais il semblait tellement heureux de me voir que je ne voulut pas le brusquer.
- J'ai peur de sa réaction, tu sais il a toujours une dent envers la famille de son père surtout ce Mbaye Diouf, si en plus il découvre que...
- Qu'il découvre que c'est sous sa garde que l'un de ses grands frères est décédé! C'est ça que tu veux dire?
- Oui exactement.
- Sa colère ne ferait qu'augmenter, et la soif de vengeance que je décèle dans son regard intimidant n'en serait que grandissante. Comment dire à cet adolescent que l'un de ses frères est mort à cause d'un proche parent et qu'il n'y a eu aucune poursuite judiciaire.
- C'est l'équation qui me tracasse, je ne peux plus le regarder en face. Et je le connais, si on ne le lui dit pas il le prendra comme une trahison.
- C'est ton fils Alexis! Sa doom leu! "Waxal ak mom"

Baye Fall se retira ainsi laissant derrière lui un homme confus et confronté à un dilemme.

Parfois on est confronté à des choix cornéliens. Dire la vérité et risquer blesser, ou l'omettre pour protéger. Et si toutes les vérités n'étaient pas bonnes à dire, à avouer. Après coup, il est facile de juger certaines décisions car il est impossible de se mettre à la place de l'autre.

Au réveil Braheem se précipita dans la chambre des invités avant de s'apercevoir que Baye fall était parti. Il ne posa pas plus de question sachant que l'homme mène une vie de nomade.

Après s'être lavé, Braheem se posa sur la natte et prenait copieusement son petit-déjeuner. Tonton Alexis était déjà là depuis belle lurette à jouer à des jeux de vieux dans ses journaux quotidiens. Tout en mangeant, Braheem essayait de parler avec son tonton, même si ce qu'il disait était incompréhensible. Agacé, Alexis récusa ce comportement:

- je t'ai toujours dit qu'on ne parle pas la bouche pleine!

Le jeune homme prit alors le temps d'avaler sa nourriture avant de reprendre sur un ton plus clair.

- Pardon tonton! Je disais que j'ai eu à lire un de tes journaux hier.
- Ah bon tu lis des journaux maintenant ?
- Oui, enfin non c'est juste que j'ai vu le titre qui m'a attiré, tu sais ces faits divers que l'on met en bas de page.
- Hum! Et ça parlait de quoi?
- D'un homme qui aurait battu à mort le fils de son frère. J'en ai lu qu'un bout parce que la suite se trouvait dans une partie qui était malheureusement déchiquetée. Ça me semble bien triste toutes ces histoires de familles.
- Quoi? Quel journal? Quel titre? T'as lu quoi? Il y a eu les noms?