Chapitre Trois - Point de vue de Mason.

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-Tu sais que je suis capable de faire ce boulot, j'te l'ai déjà prouvé !

Ce n'est pas complètement faux. Mais pas complètement vrai non plus. Si je ne suis pas un nouveau aux ordres du patron, ça ne veut pas dire que j'ai déjà été infiltré avant. Jusqu'ici, mes missions n'avaient consisté qu'à des interventions rapides. Ça m'était arrivé de suivre des cibles, de les coincer dans une ruelle ou même chez eux pour les menacer, les bousculer voire même une ou deux fois, leur casser un doigt. Et des meubles. C'était souvent pour des histoires d'argent, de dettes ou aussi parce qu'un mec avait couché avec une nana qui n'était pas la sienne. Mais jusqu'ici je n'avais jamais eu à franchir la ligne rouge, même si je sais que d'autres mecs de l'agence n'ont pas hésité à le faire. Beaucoup et de nombreuses fois.

Je me considère comme un homme de main, un récupérateur de dettes, un messager.

Ça rapporte du fric et ça ne me demande pas de tenir des horaires de bureau, ni d'être un ouvrier qui se tue à l'usine toute sa vie. Et puis faut pas croire, y'a de sacrés avantages au-delà du fait que ce soit pas très légal.

Mais quand le boss m'a confié cette mission-là, c'était d'un tout autre niveau. C'est loin des missions de descentes dans des bars pourraves qui puent la bière pas chère et la sueur. Loin aussi des clés de bras que je dois faire aux mecs qui paient pas leur dettes ou aux quelques rares passages à tabac contre des mecs qui regardaient là où ils devaient pas.

La, c'est une infiltration, une immersion, une filature.

On connaît ma cible, son nom, son prénom, son adresse et on connaît même jusqu'à son putain de numéro de téléphone. Mais la seule chose qu'on doit faire, c'est la détruire. Maintenant c'est mon rôle de me rapprocher assez de cette cible pour réussir à appuyer la ou ça fait mal. Pour m'immiscer dans cette brèche, pour ébranler ses fondations.

J'écoute mon patron râler au téléphone, écrasant le mégot de ma clope avant de le jeter par la rambarde, agacé.

-Je compte sur toi, ne me déçois pas, Donovan.

Je lui raccroche au nez parce qu'il m'énerve. C'est toujours la même chose, il donne ses ordres en se dandinant derrière son bureau hors de prix alors que c'est nous qui devons faire le sale boulot.

Il m'a appelé quasiment toute la semaine parce que je n'ai eu aucune avancée depuis mon arrivée ici. Il ne comprend pas que les choses doivent se faire doucement pour éviter le risque d'éveiller des soupçons.

Je suis en train de m'énerver encore contre un lampion qui refuse de s'allumer alors que j'essaie d'aménager un peu la terrasse du toit sur laquelle je compte donner ma soirée de crémaillère. J'affiche un léger rictus en réalisant moi-même le fiasco que ça va être. J'aurais pu la jouer cool et véritablement inviter tout l'immeuble mais un de mes défauts est le manque de patience et c'est pas en étant entouré par des personnes ayant dépassé l'âge de la retraite que je risque d'avancer dans ma quête.

J'ai besoin, j'ai BESOIN de créer un premier lien, d'avoir un premier contact.

À mon arrivée ici, je m'étais donné une estimation de deux mois pour mener à bien ce qu'on attendait de moi. Ça paraissait suffisant pour attirer la confiance d'une personne de mon âge, devenir son pote et faire ce qu'il faut.

Mais force est de constater que cette personne ne semble plus être là même que celle qui apparaît dans les dossiers que j'ai étudiés.

Depuis mon arrivée dans l'immeuble, j'ai essayé de me rapprocher à plusieurs reprises et pour diverses occasions.

En Plein Coeur.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant