Sea Dreams {nouvelle}

Dreams

- Coralia ? Coralia ?

Une voix envahit mon crâne, un chant mélodieux qui sonnait comme deux casseroles à mes oreilles. J'ouvris les yeux. Sylke, penchée au-dessus de moi, me fixait de ses grands yeux émeraude, les traits tirés par l'inquiétude. Je la foudroyai du regard.

Pourquoi m'a-t-elle réveillé ? J'allais le voir !

Elle inclina son visage sur le côté, attristée.

- On dirait que tu m'en veux, murmura mon amie en reculant.

Je me redressai sur le lit de corail.

- Tu voulais le voir n'est pas ? Continua-t-elle.

Je hochai la tête. Mon cerveau était encore embrumé par le sommeil.

Peut-être arriverai-je à y retourner, si je me rendors...

- N'y pense même pas ! Protesta t-elle comme si elle lisait dans mes pensées. Tu sais bien que tu ne devrais pas être en contact avec...

- Un humain, la coupai-je.

Je plantai mes pupilles dans les siennes. Elle soutint mon regard et je finis par détourner les yeux. Je savais que j'avais tort, je connaissais la loi.

- Je sais que c'est interdit et je ne le fais pas consciemment ! Je ne contrôle rien. Il apparaît et me supplie de l'aider. Mais à chaque fois, je me réveille avant qu'il ne puisse ajouter quoi que ce soit. J'aimerais savoir ce qu'il a à me dire.

J'avais besoin de m'expliquer, de donner des raisons, de me justifier. Pourtant, ça ne changerait rien. Communiquer avec les êtres de la surface était un délit, point final.

- Je sais que ce n'est pas ta faute, mais tu devrais en parler à un onirocrite. Il pourrait peut-être t'aider.

Sa voix cassée trahissait son inquiétude.

- Je n'ai pas besoin d'aide, articulai-je avec froideur en fuyant tout contact visuel.

Je me levai et me dirigeai vers Sylke. Me mouvant dans l'eau avec facilité, j'atteignis la porte de ma chambre. Toute en me suivant du regard, elle demanda :

- Coralia ? Où vas-tu ?

Je soulevai les algues qui faisaient office de rideaux, ondulant dans l'onde. Je tournai mon visage vers elle.

- À la surface.

Elle devint blanche.

- Mais...

Je la défiai de me retenir. Dans un ultime regard émeraude et océan s'affrontaient une dernière fois, mélange de peur, d'inquiétude et d'amitié. Je passai à travers les tentacules végétaux et m'enlaçai dans l'océan en ignorant les supplications de celle qui était mon amie.

***

Je regardais par ma fenêtre. Le vent s'engouffrait dans la cuisine, mais je n'avais pas froid. Je ne ressentais rien d'autre que de la déception, comme à chaque lever de soleil. Elle était partie, comme dans chaque rêve. Pourtant, quand je me glissais dans le pays des songes, j'espérais toujours pouvoir lui parler. La brume se dissipait et je la voyais, assise sur un rocher, ses longues jambes d'écailles ondulé dans la mer. Elle me regardait, me souriait puis disparaissait emportée par le brouillard.

Le regard perdu dans l'horizon, je contemplais la mer. Le miroir d'eau, d'habitude si lisse se fripait sous les asseaux de la brise. Elle fouettait mon visage balayant espoirs et doutes, inquiétudes et espérances, croyances et certitudes.