Chapitre 4

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La voiture finit par se garder le long d'un vaste bâtiment tout en bois. L'air frais et pur de la Laponie ne parvenait pas à apaiser le tourbillon d'émotions qui agitait Kay. Ses parents s'imaginaient apparemment que vivre dans cette contrée désolée lui ferait du bien. Lui ne voyait guère où était le bien dans cet exil. Il ne pouvait imaginer d'autres perspectives que celles de périr d'ennui. Si le froid ne l'achevait pas auparavant, parka ou non.

Ses grands-parents étaient déjà sortis de la voiture lorsqu'il finit par se résigner à les imiter. Son humeur maussade semblait se refléter dans le froid pénétrant qui le mordait à travers ses vêtements et s'infiltrait jusqu'à ses os comme pour souligner à quel point il n'était pas le bienvenu ici. Kay était habitué à la chaleur relative de Copenhague, à ses rues animées, aux néons éblouissants des boutiques et à l'incessant murmure de la vie urbaine. Ici, il se trouvait projeté dans le trou perdu le plus isolé du monde, entouré par des forêts enneigées à perte de vue et par un silence oppressant.

La ferme familiale se dressait devant lui, rustique et traditionnelle avec son bois résistant et ses murs peints en rouge qui semblaient absorber la lumière presque inexistante du crépuscule. Une légère fumée s'échappait de la cheminée, seule touche de chaleur dans ce paysage désertique.

— Bienvenue à la maison, mon chéri, lui dit sa grand-mère. Rien n'a vraiment changé depuis ton départ. Nous avons simplement fait installer des panneaux solaires sur le toit. Evidemment, ils ne servent pas beaucoup en cette saison.

Kay n'avait que des souvenirs assez épars de ses séjours d'enfance. Les lieux lui apparurent cependant comme figés dans le temps. C'était lui qui n'était plus le même. Il ne ressemblait pas du tout à ses propres grands-parents qui se dirigeaient calmement vers la maison en symbiose parfaite avec le paysage. Il se sentait plus que jamais comme un étranger et cette sensation ne fut que renforcée lorsqu'un immense chien blanc se précipita vers lui en aboyant férocement. C'était un berger finnois imposant, le poil tout hérissé.

— Lumi, sage ! cria M. Randji.

Le chien s'arrêta à quelques centimètres de Kay, les babines retroussées. De la buée s'échappait de sa gueule.

— Lumi est notre chien de garde, expliqua son grand-père en flattant la tête de l'animal. Il sait distinguer les amis des étrangers. Laisse-le te sentir pour qu'il s'habitue à toi.

Kay tendit le bras de mauvaise grâce. Le chien s'approcha avec un mélange de curiosité et de prudence et renifla sa main. L'odeur du jeune homme parut lui convenir, car il se coucha à quelques pas de lui en battant aimablement de la queue.

M. Randji en parut ravi.

— Tu vois ? Il t'aime déjà.

Kay essaya de sourire.

— Parfait.

Il voulut sortir ses bagages du coffre, mais son grand-père s'en empara avant lui.

— Je m'en occupe. Va donc te dégourdir un peu les jambes et dire bonjour aux rennes. Il est encore tôt.

Malgré le froid qui lui transperçait les os, Kay se résolut à obéir dans le simple but de ne pas créer immédiatement de conflit avec ses grands-parents. Il aurait préféré aller se réfugier dans sa chambre, tel l'exilé qu'il était, et non aller admirer des ruminants.

Le jeune homme enfonça non sans mal ses mains dans les poches de sa parka et fit quelques pas sur l'épaisse couche de neige. Il n'aurait rien vu du tout sans les luminaires accrochés sur les murs en bois de la ferme.

L'enclos des rennes se fondait dans le paysage nocturne. Kay pouvait à peine distinguer leurs silhouettes accompagnées d'une odeur musquée. Il entendait de temps à autres le son d'un sabot grattant la neige. Il préféra ne pas s'approcher davantage de l'enclos. La puanteur que dégageaient ces grosses bestioles lui était déjà perceptible à cette distance.

Le Roi des Neiges [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant