Chapitre 2

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Plus tard – BigFlo & Oli

À nos souvenirs – Trois Cafés Gourmands

CÉSAR

Ce matin, alors que j'étais en réunion avec le Comité de Sauvegarde des Traditions du village, mon portable a sonné et le numéro du lycée s'est affiché. Pris de panique à l'idée qu'il soit arrivé quelque chose à Juliette, j'ai sauté sur l'appareil et me suis éclipsé pour entendre ce que mon interlocuteur avait à me dire.

Apparemment, ma fille ne se comporte pas bien depuis quelque temps et sa proviseure a demandé à me voir. Bon sang, pourquoi est-ce qu'elle ne me parle pas ? Nous étions pourtant si proches, tous les deux, avant...

Quoi qu'il en soit, je ne peux pas la laisser partir à la dérive. C'est mon devoir de père de la remettre sur le droit chemin. En plus, je ne suis pas contre un coup de main à la ferme. La punition est donc toute trouvée.

Me voici donc en route pour le lycée afin de rejoindre la chair de ma chair et de me prendre une avoinée par la principale. Si vous saviez comme j'ai hâte... Enfin, ce n'est qu'un mauvais moment à passer. Et heureusement que ma mère est là pour récupérer ma petite Louise. Comment aurais-je fait sans elle ?

C'est vraiment difficile d'être sur tous les fronts... Depuis qu'Alice est partie, deux ans plus tôt, nous ne sommes plus que trois. Enfin, quatre, si l'on compte ma charmante maman. Après tout, sa maisonnette se trouve sur le même terrain que nous. Et son aide au quotidien m'est extrêmement précieuse.

Sur le trajet, j'écoute ma playlist « variété française » tout en me délectant de ces paysages dont je ne me lasse pas ; ces champs de lavande colorés qui bordent mes chères Alpilles à la verdure digne de la Comté de Tolkien. Certains se plaignent de l'étroitesse des routes et des virages, préférant ainsi prendre la voie rapide, mais je ne peux m'empêcher de passer par la départementale : il y a tellement de belles choses à admirer... Même les platanes qui encadrent les chemins n'ont rien à envier aux forêts montagnardes. Quant au merveilleux chant des cigales, sa mélodie est si douce à mes oreilles que je ne pourrais jamais m'en passer. J'ai vraiment beaucoup de chance d'être né dans cette région. Là où les autres viennent en vacances – pour nous emmerder, la plupart du temps, d'ailleurs.

En arrivant devant le lycée, je prie pour trouver une place rapidement car je suis un peu à la bourre. Par je ne sais quel miracle, mon vœu est exaucé et je me gare juste en face de l'entrée. Malgré tout, me retrouver ici provoque des palpitations dans tout mon corps et je déglutis en demandant mon chemin à l'accueil, où une gentille dame m'indique que le bureau que je cherche se situe au premier étage. À l'époque où j'étudiais dans ce lycée, le couloir réservé à l'administration se situait au rez-de-chaussée. Décidément, tout a bien changé. Par chance, la proviseure aussi...

Presque essoufflé, je me précipite à l'étage dans l'espoir de rattraper ne serait-ce qu'une minute de mon retard, si bien que je bouscule un couple de lycéens en train de se bécoter.

Beurk. J'espère que ma fille n'en est pas là...

Lorsque je passe la porte, je jette d'emblée un regard entendu à ma fille collée à sa chaise, les yeux rivés sur le sol, tandis que la principale, elle, a un mouvement de recul avant de me toiser en croisant les bras. À vrai dire, j'ai l'habitude. De nos jours, il est peu commun de voir un papa de trente-cinq ans s'occuper de sa fille lycéenne. La plupart de mes amis n'ont même pas encore d'enfants...

Alice est tombée enceinte de Juliette quand nous avions dix-neuf ans. Nous étions amoureux, nous travaillions tous les deux et nous pouvions donc assumer ce bébé. Pour nous, il n'a jamais été question de s'en séparer. Et en aucun cas je ne regretterais ce choix, car jusqu'à maintenant, j'ai toujours eu une relation privilégiée avec ma fille aînée. Et puis, c'est cool d'avoir un papa si jeune, non ?

Le mas de l'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant