DÉBUT CHAOTIQUE
— ♠ —— Tu ne vas pas en cours ?
Je me fige avant de me retourner.
Maxence.
Évidemment.
Il me scrute, les bras croisés, l'air faussement concerné.
— Malheureusement, je ne sais même pas où se trouve ma classe, lâché-je d'un ton sec.
Puis, je me détourne immédiatement, enfonçant mes mains dans les poches de mon pull.
Je refuse de lui donner plus d'attention que nécessaire.
Depuis notre rupture, j'ai coupé tout lien avec lui. Ce n'est pas maintenant, au début d'une nouvelle année, qu'il va recommencer à m'embrouiller.
Il ne t'a jamais aimée.
Je sais.
Un mouvement derrière lui attire mon regard.
L'abruti.
Toujours aussi impassible, il avance d'un pas nonchalant, comme si le monde autour de lui ne méritait même pas son attention. Maxence le suit des yeux, le détaillant avec méfiance tandis que l'autre passe devant lui sans même le regarder.
Puis, d'un seul mouvement fluide, l'abruti dévale les escaliers et disparaît à l'étage du dessous.
Maxence s'approche légèrement, fixant encore l'endroit où il vient de passer.
— Il est bizarre, dit-il, comme pour briser le silence.
Je l'ignore royalement, préférant me concentrer sur ma mission : trouver mon emploi du temps et quitter cette conversation inutile.
Je commence à descendre les escaliers, entendant ses pas derrière moi, ce qui m'agace encore plus.
Mais alors que j'atteins la dernière marche, mon regard capte une scène inattendue.
Le proviseur.
En grande discussion avec l'abruti.
Oh, merde.
Par pur réflexe, je recule d'un pas rapide, cherchant à me planquer avant que l'administration ne me remarque en train d'errer sans justification.
Sauf que dans mon mouvement précipité...
Je percute de plein fouet Maxence.
— Putain ! chuchotai-je, totalement collée contre lui.
Il s'apprête à parler, probablement pour balancer une connerie, mais je l'arrête immédiatement.
Sans réfléchir, je pose mon index sur ses lèvres.
— Ta gueule, murmurai-je entre mes dents.
Maxence écarquille les yeux, surpris. Sans doute pas habitué à un contact aussi direct venant de moi.
Mais je n'ai pas le temps de m'attarder sur son expression, parce que son regard glisse rapidement derrière moi.
Lentement, je me retourne.
Et je tombe nez à nez avec...
Le proviseur.
Et à ses côtés, le traître.
L'abruti me fixe calmement, sans la moindre expression. Puis, avec une lenteur exagérée, il tourne légèrement la tête vers le proviseur et...
Balance la pire trahison du siècle.
— Oui, monsieur. Comme moi, eux aussi ne sont pas en classe, parce qu'ils sèchent.
Je cligne des yeux.
Pardon ?
Le choc me frappe en pleine poitrine, comme si je venais de recevoir un ballon de foot en plein visage.
Il nous a dénoncés.
Ce fils de... !
J'inspire profondément pour ne pas exploser sur-le-champ.
Mais dans ma tête, je viens officiellement d'inscrire son surnom sur ma liste noire.
Une liste très exclusive, qui ne contient que les pires spécimens de l'humanité.
Et lui, désormais, est en première place.
Une personne de plus que je vais tamponner quand j'aurai mon permis.
— ♠ —À cause d'un imbécile et d'un abruti.
À cause de ces deux énergumènes, j'ai été punie par le proviseur et me retrouve affublée d'un bonnet de cantinière, d'une blouse ridicule et de gants en plastique qui me donnent l'air d'une chirurgienne ratée.
Le tout avec un regard aussi blasé qu'un lundi matin sous la pluie.
Eux, les véritables coupables, sont en train de s'occuper des poubelles. Pendant que moi, j'ai eu le choix entre nettoyer les toilettes et servir à la cafétéria.
Autant dire que j'ai pris l'option la moins traumatisante.
Et maintenant, mes chers amis, ces traîtres, se présentent devant moi comme si de rien n'était.
Mario est le premier à s'avancer, avec son éternel sourire vissé aux lèvres. Il me tend son plateau avec l'air de celui qui s'apprête à commander dans un restaurant étoilé.
Je les regarde tous tour à tour, la mâchoire serrée.
— Vous m'expliquez pourquoi vous ne m'avez pas réveillée ?
Silence.
Puis, Gaël grimace comme si je venais de dire une absurdité. Il se tourne vers les autres en me désignant du pouce, l'air exaspéré.
— Elle est folle, ou c'est moi ?
Cassie rigole doucement, tandis qu'Addison secoue la tête.
— J'ai essayé de te réveiller, explique Cassie, mais t'as insulté la génération de mes ancêtres. Alors j'ai préféré abandonner.
Je plisse les yeux.
— Pardon ?
Addison hoche la tête avec un air faussement sérieux.
— Tu devrais apprendre à avoir un langage plus correct.
— Ouais, elle a raison, ajoute Mario en croisant les bras. M
Je les fixe, l'air impassible.
Puis un sourire mauvais étire lentement mes lèvres.
— Vous pensez ?
Tous hochent la tête en chœur... sauf Gaël, qui tapote son pied contre le sol avec impatience, visiblement plus préoccupé par son estomac que par la conversation.
— Moi, j'pense pas, dis-je en haussant les épaules.
Ils roulent tous des yeux, exaspérés.
Finalement, je les sers un à un, prenant mon temps juste pour les embêter.
Puis j'arrive à Gaël.
Je sais déjà qu'il ne va rien prendre.
Parce que son père lui a fait détester le porc avec un zèle tel qu'il a fini par rejeter tout ce qui touche de près ou de loin à cette viande.
Il me tend son plateau, l'air bougon.
— Y a rien d'autre ? demande-t-il, méfiant.
Je jette un regard à la cantine, puis reviens vers lui avec un sourire faussement désolé.
— Seulement du porc. Et du vide. Tu préfères lequel ?
Gaël me fusille du regard.
— Tu sais quoi ? J'vais manger de l'air.
— Régale-toi bien, alors, dis-je en lui tendant un plateau... vide.
Mario explose de rire, tandis que Gaël grogne quelque chose d'incompréhensible avant de s'éloigner en marmonnant.
Je lève mon plateau en guise de victoire, un sourire triomphant aux lèvres.
Servir à la cafétéria n'est peut-être pas si mal, finalement.
Un service... particulier
En parlant de porc, deux spécimens s'approchent.
L'abruti et Maxence.
Tout propres, tout clean, en train de discuter tranquillement.
Attends... ils s'entendent maintenant ?
Je les regarde, sceptique, avant de plisser les yeux.
— Vous n'êtes pas censés vous occuper de vos semblables ? demandai-je, une pointe de sarcasme dans la voix. Je parle des poubelles.
Maxence rit légèrement, visiblement amusé, tandis que l'abruti me fixe sans un mot, impassible.
— C'est après la pause qu'on ira, répond Maxence en haussant les épaules. Tes répliques m'ont manqué, Lysie.
Un ricanement amer m'échappe.
— Tu sais quoi d'autre m'a manqué ? répondis-je, croisant les bras. Le fait qu'on s'ignorait tous les deux. Toi, tu te tapais des meufs, et moi, je me foutais royalement de ta vie.
Il fronce légèrement les sourcils, comme s'il ne comprenait pas où je voulais en venir.
Mais avant qu'il ne puisse ouvrir la bouche, je le coupe :
— Tu sais quoi ? commençai-je en haussant les épaules avec désinvolture. En fait, je ne veux même pas t'adresser la parole.
D'un geste sec, je balance les morceaux de porc sur son plateau.
— Dégage.
Maxence reste figé un instant, me fixant comme s'il espérait une réaction différente.
Mais il ne dit rien.
Il recule lentement, prend son plateau et s'éloigne. Juste avant de disparaître, il me jette un dernier regard en arrière.
Un regard que je refuse d'interpréter.
C'est fini, Lysiane. C'est fini entre vous.
Je ferme brièvement les yeux, le temps de rassembler mes pensées.
Puis, je me tourne vers l'abruti.
Il est toujours là.
Toujours aussi impassible.
Toujours aussi silencieux.
Toujours aussi agaçant.
Je prends une grande inspiration, levant légèrement le menton.
— Tu veux du porc ?
Il ne répond pas tout de suite.
Son regard soutient le mien. Scrutateur. Insondable. Comme s'il essayait de déchiffrer quelque chose en moi.
Je me sens défaillir sous l'intensité de ses yeux, comme s'ils étaient capables de voir à travers moi.
Pourquoi il ne parle pas ?
Pourquoi il reste planté là ?
Enfin, il cligne lentement des yeux, détache son regard du mien...
...et tourne les talons sans un mot.
Quel étrange garçon.
— ♠ —
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If you knew [ EN CORRECTION ]
Romance« DEUX ÂMES PERDUES » C'est ainsi que certains résument les histoires d'amour : deux êtres égarés, dérivant dans l'immensité de leur solitude, jusqu'à ce que leurs errances se croisent. Elle aussi était perdue. Mais contrairement à ces récits enjoli...