Chapitre I , Prémices de la colère

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23 octobre. 

La soirée était froide par ce temps d'octobre et la nuit tomba promptement. La rentrée avait débuté il y déjà deux mois environ, et les lycéens et les étudiants n'avaient qu'un désir : se saouler ! Les lampadaires illuminaient chaleureusement de leur lumière pâle et jaunâtre les passants, puisqu'il était déjà aux alentours de 21h. Dans la rue étroite, marchaient deux jeunes femmes au visage rougit par l'effort. La pente était raide et les adolescentes portaient à la force de leur bras des sacs de courses remplis de nourritures et de boissons diverses : vodka, bière, panaché, chips, bretzels, cake, etc.

- T'es vraiment forte toi avec tes plans Tracey ! Je sais pas dans quoi tu nous as embarqués encore, mais je suis sûre qu'il n'y aura personne !

 - Nos efforts ne seront pas vains, Kyra ! Regarde là-haut au bout de cette rue, la maison de Tristan ! Elle est allumée !

 - Je trouve ça quand même louche qu'on ait été invitées. Je te parie qu'ils vont juste nous prendre l'alcool et que personne ne nous parlera, on va s'ennuyer toutes les deux ! - Au moins, Kyra, on va s'ennuyer à deux ! Et puis je suis sûre qu'on va s'amuser !

 - Je pense pas m'amuser dans une fête ou Tristan et Mathilde sont présents physiquement.

 - Oui je comprends mais quand même ! Pour une fois qu'on est invités à une soirée de ce genre.

 - Je croyais que les soirées ça ne t'intéressait pas ! Tu m'as toujours dit ça !

 - Figure toi que j'ai changé d'avis, il faut s'ouvrir à d'autres choses !

Les deux jeunes filles rigolèrent ensemble joyeusement sur la route goudronnée. L'atmosphère restait cependant pesante car les arbres, les buissons, et les astres eux-mêmes semblaient les observer. Les sapins, chênes, et pins étaient parsemés ici et là, l'obscurité était si épaisse que les troncs semblaient manger les arbres au fur et à mesure que la lumière des lampadaires s'affaiblissait. Malgré cela ils demeuraient stables et immobiles, en surplombant les cailloux, les insectes et les humains. Un seul cri du vent suffisait à faire sursauter les deux passantes, tant la nature était calme, prête à s'endormir. Les feuilles flottaient dans le vide, comme si on les caressait et qu'elles se laissaient porter par leurs désirs. Les insectes rampaient sur les troncs de la forêt, d'autres se cachaient dans la terre pour se réfugier des prédateurs nyctalopes. Aux pieds des filles, la route était jonchée de petits cailloux, sur lesquels des fourmis couraient et grouillaient.

Un grand portail les surplomba d'un coup, et soudain Kyra se retrouve nez à nez avec des barreaux de fer et elle se cogna dessus avec le front. De la fumée crépitait depuis l'intérieur du jardin, et l'odeur du feu se mélangeait à l'odeur enivrante des hortensias de couleur bleue. La chaleur du feu raidit les yeux des jeunes femmes. Sur ce feu, des adolescents agitaient des saucisses sur des piques, à l'instar d'autres qui tenaient des verres en plastiques en gesticulant. Les filles pouvaient humer le parfum des viandes, à la fois celles encore crues et d'autres grillées. De part et d'autre sur le sol, se trouvaient des tables basses avec un buffet. Des tas de boissons diverses, aussi bien de l'alcool, que des sodas ou des jus de fruit. La couleur des bouteilles était cependant cachée par les flammes du feu qui brouillaient les lignes du paysage, et les formes du jardin. Les ondulations faites par la chaleur s'agitaient en même temps que les étudiants dansaient de partout. Leur nombre était difficile à connaître, à cause de la fumée et de l'ivresse. Tout se mélangeait et les étudiants semblaient s'unifier, se séparer entre eux en un coup de rire et de réflexions bien placées. L'ivresse des sens gagnaient les actions des personnes, avec des gestes déplacés, des sons incompréhensibles, des couleurs qui apparaissent dans la vision des nuages au-dessus d'eux. Au fond du jardin des jeunes en retraits rigolaient sans raison, mais ils avaient à la main ce qui ressemblaient à des cigarettes ou bien des joints. L'odeur de la drogue gâchaient parfois le parfum tendre et réconfortant des fleurs : des roses, des lilas, des hortensias. Les cœurs d'amour en cage restaient cachés dans les ténèbres bleutées de la nuit qui s'abattait sur eux, tel un désir qui prend possession d'une chair, sans aucune limite.

La reine des EnfersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant