Les Chroniques des Thepesh

La piscine: partie 4

Solime se réveilla la première fois trois heures plus tard, à la lueur sombre d'un feu qui s'était fait timide, après un sommeil agité, entrecoupé de frissons et de tremblements. Il ouvrit les yeux et son regard se verrouilla immédiatement sur le pot de soupe en terre posé par terre à quelques mètres de sa tête. Il cligna les paupières en regardant le repas disposé sur le sol vertical. Le son des cuillères de fer contre les bols et du liquide se faisant aspirer par des bouches peu bavardes lui parvint au travers le voile de sa fatigue. Les odeurs de légumes et des cendres se mélangeaient dans le nez du jeune homme. Il en inspira une bouffée, puis il referma les yeux. La vie autour de lui s'effaça petit à petit, le berçant jusqu'à ce qu'elle disparaisse au loin.

La deuxième fois, il se leva pour de bon. Forçant son corps transit à sortir du sommeil et à reprendre sa connexion avec son cerveau. Il se redressa lentement avec un grommellement somnolent. Assis, les jambes tendues recouverts de la fourrure que lui avait donné sa mère, le torse maintenu droit par ses deux mains qui poussaient contre le sol, habillé d'un simple drap, Solime regarda autour de lui en plissant les yeux. Il avait un affreux mal de tête qui lui lançait des ondes glacées dans son crâne. Il serra les dents.

Il n'y avait personne autour. Le silence régnait et recouvrait le sol de bois de la maison comme de la brume, s'étalant en volute autour de ses pieds. Mais s'il tendait l'oreille, il pouvait entendre, au loin, la voix d'Elezire. Elle semblait venir de l'extérieur. Il continua à observer la pièce autour de lui. Le pot de soupe avait disparu, et le souvenir flou d'avoir vu sa mère, sa tante et la vieille femme en manger à côté de lui revint à l'esprit. Mais sa mémoire était si imprécise qu'il n'était pas sûr qu'il ne l'avait pas rêvé.

Au-dessus du feu mourant, pendue sur un bout de bois maintenue au-dessus de faibles braises, reposaient ses vêtements. Son manteau était, lui, étalé devant la cheminée, car il était trop épais et trop long et aurait brûlé s'il avait été placé avec le reste de ses habits. Il se défit de la fourrure et se leva, les jambes faibles et les bras à bout de force. Quand il fut enfin debout, son souffle était court. Il lui semblait que toutes ses forces l'avaient quitté, chassées de son corps par le froid et le vent. Son corps quémandait un repos plus long, malgré sa sieste, ses muscles tiraient sous sa peau, ses pieds lui brulaient. Par-dessus tout, il avait un creux dans l'estomac qui envoyait des vertiges dans son cerveau.

Avec des pas indécis et hasardeux, le drap toujours sur les épaules il s'approcha de ses affaires et les ramassa. Il les inspecta ; elles avaient été grossièrement lavées, comme si elles avaient simplement été trempés dans de l'eau à moitié propre, à peine frottés puis laissés à séchés sans plus de considérations. Elles sentaient encore le sang, mais l'odeur n'avait de toute façon pas quitté le nez de Solime depuis qu'il avait plongé dans la piscine, le gout sur sa langue ne s'était lui non plus pas atténué. On pouvait toujours voire clairement des traces pourpres un peu partout, le boulot avait été fait avec très peu d'enthousiasme. Cela ne pouvait pas être Elezire, autant que Solime l'aurait voulue, elle faisait toujours ce qu'on lui demandait avec le plus grand soin et la plus grande dédication. Ce devait être sa mère, et dès qu'il arriva à cette conclusion, le jeune homme se convint que c'était mieux ainsi et qu'ils n'avaient pas de temps à perdre pour quelque chose d'aussi futile que d'avoir des vêtements propres. Sa mère avait sûrement eu des choses plus importantes à faire que de laver ses habits. Solime commença à se sentir honteux de s'être endormis, il avait laissé son sale boulot à Apsim, en plus de lui avoir laissé une eau sale. Mais en même temps, il ne pouvait s'empêcher de se sentir touché, ce qui amplifia son embrassement.

Sans perdre plus de temps, Il remua les épaules pour se débarrasser du drap qui tomba sur le sol, à ses pieds, puis il s'habilla.