CHAPITRE TROIS

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Il est déjà bien plus d'une heure lorsque je termine ma journée de travail. Elle fut longue et assez pénible, de nombreux clients tout au long de l'après midi, surtout vers 21h, juste avant le couvre feu, ils viennent tous faire leur provision d'alcool, à croire que se soûler va changer leur vie. Ils me disent que ça les aide à oublier qu'ils vivent ici, mais ça ne dure qu'un instant. Moi aussi j'aimerai oublier cette ville, ce gouvernement, cette peur constante, mais je ne peux me le permettre, pas avec Ben et maman.

La porte se referme derrière moi, le froid me gèle sur place et me surprends. J'oublie à quel point il peut être terrifiant. Le vent glacial s'infiltre par tous les espaces ne couvrant pas mon corps, je remonte rapidement mon écharpe sur mon nez et ressers les pans de mon manteau. Maintenant il faut que je regagne la maison que j'ai repéré hier, elle est très éloignée de la maison, ça va me prendre du temps, mais je sais que ce ne sera pas en vain. J'ai vu qu'il y avait un accès assez facile depuis le salon, le plus difficile va être le trajet du retour avec les sacs lourds. Mes pas résonnent sur le bitume froid et dur, je m'engouffre plus profondément dans la ville je suis à mi chemin de ma cible, tellement concentré sur mes pensées je ne remarque même pas que j'en suis une. Jusqu'à ce que j'entende ces bruits, ces bruits familiers que j'entends durant mes rêves. Est-ce un rêve ? Un cauchemar ? Ou bien la réalité ? Je prie pour que ce soit l'un des deux premiers, que je me réveille en sueur dans mon lit, près de Ben.

Il fait sombre, la ruelle dans laquelle je m'engage n'est pratiquement pas éclairée, elle est complètement déserte. Je dois fuir, je les entends arriver, il faut que je m'enfuis, j'accélère le pas, le cœur tambourinant dans ma poitrine. Ma gorge se serre, mon souffle devient court, j'ai peur, je tremble. C'est comme dans mon rêve, les bruits de pas se rapprochent, ils deviennent de plus en plus proche... Je me mets à courir, sans regarder derrière moi, je n'arrive même plus à respirer, ni à avoir une vision claire des choses. Mon esprit est embué, mon cerveau n'arrive pas à assimiler les informations qui arrivent. Une grande main froide s'abat sur ma bouche, d'autres m'agrippent les bras, les jambes. Je ne peux plus bouger, par peur. Je pourrais me débattre mais je sais que c'est inutile. Un visage s'approche de mon oreille, un rire morbide vient irriter mes tympans et d'une voix à me glacer le sang cette voix me murmura:

- C'est pour toi l'heure de jouer !

J'attends le réveil, j'attends de retrouver mon lit, Ben à mes côtés, ma chambre, si petite mais pourtant si chaleureuse. Mais rien, j'attends en vain, je sais bien que cette fois-ci ce n'est pas un rêve, c'est bel et bien la réalité. Ils m'ont attrapés, je me suis fait attrapé par les rafleurs. Je n'ai pas le temps de réagir face à eux, ni même de me rendre compte de la situation, une masse s'abat sur l'arrière de mon crâne, m'arrachant un cri de douleur. L'objet métallique provoque un raisonnement sourd à l'intérieur de ma tête, ça me brûle, un second coup. Je m'effondre lourdement sur le sol froid de la ruelle, je regarde le ciel, les étoiles une dernière fois, je sais que je ne les reverrai plus jamais...

Je ne saurais dire quelle heure il était lorsque je me suis réveillé, je ne me préoccupais juste de cette douleur lancinante sur l'arrière de mon crâne. A vrai dire je ne voyais rien, il faisait complètement noir, je n'entendais que le bruit de respirations lentes. Où étais-je ? Je portai ma main à ma blessure, tentant de percevoir l'ampleur des dégâts, je pu sentir une croûte, sûrement du sang sec. Combien de temps étais-je resté inconscient ? Qu'est-ce qu'ils m'ont fait ? Ben ? Maman ? 

Une boule se forma au fond de ma gorge, une subite envie de pleurer. Ils devaient s'inquiéter, peut-être qu'ils avaient déjà compris ce qui m'est arrivé. Qu'allaient-ils devenir sans moi ? Qui irait chercher Ben à l'école ? Qui remplirait les placards vides ? Merde ! S'il leur arrivait quelque chose je ne me le pardonnerai jamais, je dois m'en sortir, même si c'est impossible, je dois sortir vivant de ce jeu de la mort. Ils ont besoin de moi, je ne peux pas les laisser tomber ! Lentement je passai ma main sur la poche de mon jean, la forme sous le tissu me rassura, j'avais encore mon canif. Il n'est pas gros, ce n'est pas une arme phénoménale, il n'est pas aiguisé mais je me sens mieux avec, j'aurais de quoi me défendre. Ce n'est rien comparé à ce que je devrais affronter, aux armes de pointes, aux fusils, mais je ferai de mon mieux pour ne pas me laisser mourir sans rien faire. D'après certains ce jeu est sans issu. Une fois participant, de ton plein gré ou non, ton destin est tracé: on meurt. Je ne mourrai pas sans avoir combattu, je te le promets Ben. Je vais faire mon possible pour revenir à la maison.

Death GameOù les histoires vivent. Découvrez maintenant