Prologue

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La porte se referme dans son dos et elle rejoint son lit à tâtons. Ici, il fait tellement noir qu'elle ne sait jamais si ses yeux sont ouverts. Les premiers jours, elle avait si peur qu'elle n'arrivait pas à s'endormir. Elle voulait juste rentrer chez elle, revoir son papa et sa maman. Elle voulait retrouver la petite veilleuse en forme de lune qui éclairait sa chambre toute la nuit et la protégeait des monstres.

Maintenant, elle sait que les monstres, ce n'est pas dans le noir qu'ils se cachent, et c'est le moment où la porte s'ouvre sur la lumière du couloir qui l'effraie le plus. Dormir, c'est ce qu'il y a de plus facile, dans cette prison. Mais avant, il faut penser à répéter les mots pour se souvenir. Pour ne pas devenir comme les autres enfants qui oublient qui ils sont, ou comment parler.

« Je m'appelle Justine Dubois. Je suis née le 23 mars. Mon papa s'appelle Antoine. Ma maman s'appelle Marie. Et j'habite au château rouge. »


Une voix forte la réveille. Ce n'est pas normal. Justine colle son dos au mur contre lequel est placé son lit, serrant ses jambes contre son petit corps. Sa couverture remue, Justine peut entendre les frottements contre le vieux matelas puant. Sa main tâtonne pour l'attraper et la tirer vers elle. Elle ferme les yeux très fort pour se calmer et la couverture arrête de bouger. Dans le couloir, les voix sont nombreuses. Justine ne comprend pas ce qu'elles disent.

Quand elle entend le verrou, elle rouvre les yeux. La lumière blanche l'aveugle un moment, mais elle voit vite que quelqu'un se tient à la porte. La personne fait un pas en avant et Justine essaie de reculer encore plus contre le mur.

« N'aie pas peur. Je m'appelle Axel. »

Il s'approche et Justine remarque qu'il est habillé bizarrement, mais pas comme ceux qui lui font du mal. Il pose un genou au sol à côté du lit et tend les bras vers elle. Pourquoi ? Elle n'ose pas bouger, et il recommence à parler :

« Je suis là pour te ramener chez toi. Comment t'appelles-tu ? »

Il a la voix douce. Ça fait longtemps qu'on n'a pas parlé si calmement à Justine. Il ressemble à un gentil. Est-ce qu'il va vraiment la ramener chez elle ? Elle lâche la couverture et rampe jusqu'au bord du lit. Elle le laisse la porter dans ses bras chauds, rassurants, si rassurants qu'elle pose la tête contre son épaule pour murmurer : « Je m'appelle Justine Dubois. Je suis née le 23 mars... »

JustineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant