Chapitre 7

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Ayleen

Le vigile est toujours posté à l'entrée du Ritz et me laisse passer sans broncher cette fois. J'ai retourné la situation dans tous les sens cette nuit mais je n'ai qu'une option : parler à Reed. S'il n'est pas ouvert à la discussion, peu importe, je partirai, même si l'idée d'abandonner ma seconde maison me fend le cœur.

Lorsque je traverse la salle, la musique et les lumières sont estompées. Quelques hommes ivres morts sont affalés sur les canapés et deux danseuses se trémoussent encore contre leur barre de pole dance. À en croire les carcasses de bouteille et les bris de verre qui jonchent le sol et les tables, j'en déduis que la nuit a été mouvementée. Je ne m'attarde pas plus longtemps et monte à mon bureau.

Mais lorsque j'y pénètre, je ne le reconnais plus et me demande un moment si je ne me suis pas trompée de porte. À la place de mon bureau en bois massif se trouve désormais une table ovale noire et à la surface lisse et des sièges au revêtement doux et rose pâle. Le parquet a été remplacé par une moquette si moelleuse que je suis tentée une seconde de retirer mes talons pour venir y enfoncer mes pieds nus. Bien que magnifique, le relooking complet de mon bureau ravive mon aigreur et je dois me faire violence pour ne pas tout balancer par la fenêtre.

Je me dirige d'un pied ferme en direction de l'ancien bureau de mon parrain qui, j'imagine, est maintenant occupé par Reed. Mais lorsque je frappe à la porte, pas de réponse. Je tente d'ouvrir mais la poignée résiste m'indiquant que le bureau a été fermé à clé.

-Il n'est pas là, Aylee, m'interpelle la voix d'Ash derrière moi.

-Quand sera-t-il là?

-D'ici une heure.

Je serre les dents avant de le dépasser et retourner à mon bureau, résignée. Pour faire passer le temps, j'allume mon PC pour vérifier les comptes. À ma grande surprise, la soirée d'hier a permis de générer plusieurs milliers d'euros, le tout provenant uniquement de la consommation de boissons. Cela n'était encore jamais arrivé au Ritz, la majorité de notre chiffre d'affaires reposant principalement sur la réservation de chambres. Je me prends alors à me demander si celles-ci sont occupées.

Je me décide à vérifier et longe le couloir pour écouter aux portes. Je crois entendre des voix derrière l'une d'entre elles et je bondis lorsque celle-ci s'ouvre sur un homme d'une cinquantaine d'années au crâne dégarni et qui me regarde avec curiosité. Derrière lui, je distingue une femme en petite tenue assise sur un lit king size et entrain d'enfiler un peignoir. L'homme me regarde avec un sourire en coin avant de fermer la porte derrière lui et disparaître au rez-de-chaussée.

Ce qui vient de se passer dans cette chambre semble plutôt évident et c'est la rage au ventre que je retourne m'enfermer dans mon bureau. Est-ce donc à cela que servira le Ritz désormais ? Pour que des pervers affamés puissent vider leurs pulsions sexuelles sur des femmes ? Cette nouvelle découverte me répugne au plus haut point. Je me rassois rageusement sur mon siège et dois me faire violence pour me reconcentrer sur ma tâche.

Quelques minutes plus tard, j'entends toquer à ma porte et John entre et vient déposer des enveloppes sur mon bureau.

-Le courrier, me dit-il.

Je m'en empare et commence à l'ouvrir.

-Comment trouves-tu ton nouveau bureau ? s'enquiert-il.

-Hideux, feins-je, portant mon attention sur le contenu des lettres.

Je sens le regard penaud de mon collègue sur moi, mais je l'ignore. J'ai encore le goût amer de sa trahison et il me faudra du temps pour le digérer.

-Aylee, je sais que tu vis ces changements plutôt mal et je le comprends. Mais je suis là pour toi, ok ? m'assure-t-il.

Ses mots me serrent le ventre. Il semble sincèrement s'inquiéter pour moi et je devine que, si ce n'était pour sa famille, il n'aurait jamais encouragé la reconversion du Ritz.

-Ça va aller, ne t'en fais pas, finis-je par lui dire pour le déculpabiliser.

Il me jette une dernière œillade inquiète avant de me laisser de nouveau seule. Je reporte mon attention sur le courrier et ma mâchoire se contracte tandis que je découvre des factures aux montants exorbitants. Jamais le Ritz n'a autant dépensé en une fois. Même l'argent récolté la veille ne permettra pas de tout couvrir. C'est la goutte. Je ne le laisserai pas faire et je suis plus que déterminée à balancer les quatre vérités au bougre qui me sert maintenant de patron.

Never get me [Dark romance]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant