Chapitre 1

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Avez-vous déjà été frustré de voir que parfois les chapitres n'avaient pas plus de description que le numéro simple qu'on leur donne ? Moi, si. Quand je lis, voire avant de lire, je feuillette les pages, cherchant à savoir si l'histoire me plaira, si elle vaut la peine d'être lue, étudiée, réfléchie, aimée. Mais qui suis-je pour dire si un livre, une histoire, vaut la peine d'être prise ? Personne, non, personne. L'auteur fournit un travail sur ce livre, il réfléchit, pense, apprend, découvre, essaye, se trompe, recommence, et tout plein de verbes encore que je ne saurais citer. Cependant, je suis la personne qui achète, pour avoir cet argent, je fournis un effort, et mon effort a un prix, il n'est pas facile, je ne peux pas dépenser mon énergie pour des choses futiles, inutiles, qui ne me feront pas avancer, évoluer dans ma vie. J'ai toujours été impressionné par la culture, la compréhension de sujets complexes, l'étude du monde qui nous entoure. En fait, j'ai toujours voulu apprendre en continu, tout le temps, sur tous les sujets. Pour cela, il me faudrait une journée de plus de 24h, peut être 36h, peut être 48h, peut être 72h. Je ne sais pas, mais il m'arrive d'y réfléchir. De temps en temps.

Fixant longuement le livre en face de moi, je me demande s'il faut que je le lui achète. Est-ce que ça lui plairait ? Aucune idée. Nous nous apprécions et passons du bon temps ensemble, mais je ne sais pas ce qui lui fait plaisir dans la vie, ce qui l'envoute, lui donne envie d'avancer, d'aimer la vie.

Je me sens un peu, voire beaucoup, débile. Il m'arrive d'avoir l'impression d'être le personnage principal, mais souvent, je me sens comme l'auteur. Observant le livre en face de moi, je me permets d'imaginer ce qu'il y a dedans, à travers le titre que j'observe simplement. Pourrait-il m'aider à en apprendre plus ? Aucune idée. Je prends alors le livre, et m'autorise enfin à lire le résumé. Finalement, une courte présentation de l'auteur, et des soi-disant miracles qu'il aurait écrit, mais rien sur le livre lui-même.

Après cette petite perte de temps, je sors du centre commercial, les mains vides, tout comme l'esprit. Je divague souvent, trop souvent, mais ces derniers temps, un peu plus souvent. Je réfléchis souvent, me mettant parfois en danger. Une fois, j'ai failli me brûler la main, quand je cuisinais, j'avais laissé ma main sur la cuillère en fer brûlante que j'avais utilisé un certain temps pour mélanger mes pâtes. Heureusement, j'ai été rapidement "secouru".

- Oh, salut, me dit une voix simple, que je peine à reconnaître.
- Bonjour, comment tu vas, dis-je, mécontente de croiser une vieille connaissance.

Voulant vite couper court à la discussion, je me permets de me mettre en perpendiculaire par rapport à la position de la personne, pour faire simple, mon épaule gauche lui fait face, mais pas mon corps. Ainsi, je m'en irais plus facilement. La discussion se termine au bout de 5 longues minutes, et je reprends mon chemin, essayant de me rappeler ce que j'étais en train de faire avant qu'une discussion dérangeante vienne me chercher.

Rentrée chez moi, je passe ma soirée à me plaindre. Que faire ? Je me sens vraiment débile maintenant. Et si je le déçois ? En fait, je suis déçue de moi-même, alors je n'en attends pas moins de sa part.

Préparant le repas du soir, j'entends ses clés claquées légèrement contre la serrure de la porte. Il vient d'arriver, de rentrer, et je sens mon ventre se tordre comme un vieux chiffon.

- Bonsoir, je suis rentré, dit-il calmement.

Sans réponse, je me dirige vers lui, laissant le repas déjà prêt, refroidir. Face à lui, je me sens minuscule, ridicule, et débile. Alors qu'il doit sûrement attendre une réponse, il me voit hésiter, et me tend finalement les bras. Bêtement, comme si je l'aurais mérité, je me précipite dans ses bras fins, chaud et agréable.

- Tu es rentré, dis-je dans un soupir, étouffé par ses bras.
- Oui, je suis rentré, il me répète, comme pour l'affirmer, me rassurer, ou m'endormir dans ses mots doux.
- Tu viens ? On va manger, le diner va refroidir.
- Non, ça va aller, je n'ai pas faim.

Et il s'en va. Oui, il part, lentement, comme pour me laisser le temps de le rattraper. Sauf que non, je ne pourrais pas, je ne peux pas, je n'ai pas pu. Pour moi, quelle que soit sa vitesse, il ira trop vite, et à courir après lui, je finirais par m'épuiser au point de perdre la vie. Alors, comme depuis quelques soirs maintenant, je le laisse rentrer, prendre sa douche, et dormir dans notre lit que je n'ose plus partager.

Je me sens misérable, ignoble, au point de vouloir m'interdire de manger. Mais je ne peux pas, le gâchis a toujours été pour moi une faute grave, et je ne peux me permettre de changer pour ça, pour lui.

Assise dans le canapé, n'ayant pas la force de manger sur la table de la cuisine, je regarde calmement la télé, sans grands intérêts pour ce qu'il se passe dedans. En fait, c'est plus pour couper le silence lourd qui se forme. Je me sens parfois dans le déni, mais j'aurais trop peur d'affronter la réalité si je venais à sortir ces mots de ma bouche. Non, définitivement, je ne peux pas.

En entendant un bruit, je me retourne, et je le vois, de fines cernes sous les yeux, mais assez pour m'inquiéter. Finalement, je le regarde, insistante, confiante, et peut-être trop naïvement, je lui demande: "Tu vas bien ?".

Ces quelques mots, aussi fort qu'un premier coup de couteau, se révèlent être sûrement plus rassurants que ce que je le pensais. Je le vois sourire, un sourire triste, lourd de sens, qui ne m'est même pas adressé. Comme moi ce midi, il ne me fait pas face, il regarde en direction de la fenêtre, comme pour m'ignorer.

Emerald greenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant