Chapitre 101: De vieilles connaissances

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"Salut, petite fille de la mafia."

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La voix de l'homme est aussi grave et rapeuse que dans tes souvenirs. C'est comme si aucun moment n'était passé depuis, et qu'aucun de vous n'avez grandi. Il est encore le jeune garçon portant un masque chirurgical noir qui était parti acheter des produits d'entretien ménager afin de satisfaire son obsession. Et tu es toujours la même fille calme et mûre, terrifiée à l'idée de la mort.

Tu ne réponds pas à sa salutation: tu ne sais pas ce que tu dois dire. Chisaki attend quelques secondes avant de comprendre que tu lui répondras rien, et il demande: "Tu te souviens de moi?"

Comme si tu pouvais l'oublier.

Il le sait ça aussi: il sait que tu te souviens de lui bien plus qu'assez. Peut-être qu'il peut même deviner, si il a au moins, au fond de lui, un minimum de compréhension des sentiments humains, la profondeur de la marque qu'il a laissée en toi. Mais il te le demande quand même, pour agrandir ce trou encore plus, pour te forcer à faire face à des souvenirs que tu aimerais tellement laisser plus profondément enfouis dans ton cœur. Avec des simples mots il a rouvert un trou béant que tu avais pris des années à colmater, mais qui ne s'était jamais vraiment fermé : immédiatement il s'écartèle, saigne et brûle, alors qu'il rentre ses doigts à l'intérieur et les tord dans tous les sens jusqu'à qu'ils soient couverts de sang.

Tu sais que c'est uniquement de ta faute : tu n'as jamais vraiment réussi à guérir. Tu n'as même jamais admis son existence. Non, à la place tu l'as juste enroulé de bandages vite faits et tu as rapidement détourné le regard. Et si il s'est rouvert si rapidement c'est parce qu'en premier lieu, il ne s'était jamais vraiment fermé.

T'abandonnant à tes instincts, tu te lèves pour piquer un sprint, mais cinq autres yakuza te bloquent toutes issus de secours. Tu te sens incapable de parler, la gorge serrée de peur alors que tu ne peux que fixer désespérément leur masque qui leur enlèvent toute humanité. Ils n'hésiteraient pas une seconde avant de le laisser te tuer. Ils n'hésiteraient pas une seconde avant de te tuer eux-même.

Réalisant que tu ne peux pas t'échapper, et qu'il va donc falloir te battre, tes yeux foncent sur la plus grosse menace. Overhaul est allongé contre son dossier, les jambes croisées élégamment, observant avec un léger dégoût les minuscules traces de poussière sur les fenêtres du salon de thé. Il se tourne pour croiser ton regard, son calme contrastant avec le désespoir fourmillant qui éveillent tes sens.

Tu te sens comme une bête en cage et il le sait très clairement. Il adore. Si tu pouvais, tu lui foutrais volontiers un coup de poing dans la mâchoire.

"Assis-toi, petite fille de la mafia," il t'invite, désignant d'un mouvement de tête la place que tu viens d'abandonner.

Tu n'avais pas réaliser que tu te tenais encore sur tes jambes tremblantes, faibles. De l'adrénaline a pris possession de tous tes membres, y mettant le feu.

Chisaki claque de la langue, n'aimant clairement ton manque de réponse.

"Assis-toi," il répète.

C'est ce que tu fais, comme si ton corps agissait de lui-même, l'esprit bien trop loin pour savoir quoi faire. Il doit y avoir quelque chose que tu peux faire, quelque chose à faire pour sortir de là- mais qu'est-ce que c'est ? Pourquoi est-ce que c'est en train d'arriver ? Comment est-ce qu'il t'a retrouvée ? Pourquoi est-ce qu'il t'a cherchée ? Ca semble trop prémédité pour être une coïncidence; t'es sensée croire qu'il était juste parti faire une petite balade ? Si tôt, et accompagné de tous ces membres du Shie Hassaikai ? Ouais, genre, une petite balade. C'était prévu de longue date.

Changing History (xlecteur)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant