΅ XXXII ΅

4 2 0
                                    

Allez, on peut le faire.

Ils étaient le vingt-sept décembre, Noël était il y a deux jours, il était encore à CUHA la veille, il venait de faire un rêve long de plusieurs semaines, et il était maintenant officiellement en vacances.

Comment vous dire que quand vie = travail, les vacances, pourtant rares, apparaissent comme une éternité d'ennui. Surtout que ce rêve super long donnait maintenant l'impression à l'orèvre que le temps passait super lentement.

Quelle impression détestable. Et les gens s'étonnent encore quand il dit qu'il n'aime pas les vacances.

Alors, comme il n'avait pas grand-chose à faire chez lui, ni grand-chose à manger, il s'était décidé à aller faire les courses pour la semaine et se prendre deux-trois viennoiseries histoire de fêter les vacances.

Mais saviez-vous que Pierrot est quelqu'un de très indécis dans sa vie d'une manière générale ? Oui, il est devant les délices de son boulanger préféré depuis un quart d'heure et ne sait toujours pas quoi choisir.

Ce. N'est. Pas. Putain. De. Difficile.

Mais ses yeux dérivent encore sur l'étalage de choix, et il soupire de désespoir. Ces vacances commencent merveilleusement mal. Et vu la tête du vendeur, Pierrot est en train de refaire sa matinée.

« Vous savez que vous pouvez en prendre plusieurs ? S'amusa ledit vendeur en replaçant des baguettes sur les présentoirs derrière lui. »

Bien sûr que Pierrot le savait, seulement il n'aurait jamais la place de manger autant de bouffe, aussi délicieuse soit-elle. Pierrot a toujours eu un petit appétit.

« Si je commence dans cette optique, cet endroit sera bientôt mon lieu de perdition, marmonna-t-il dans sa barbe inexistante. »

Le vendeur l'entendit et ça le fit bien marrer — mais discrètement. Pierrot n'en pensait pas moins, qu'est-ce qu'il devait avoir l'air con.

« Et sinon, vous faites quoi dans la vie ? Lui demanda soudainement le vendeur, alors qu'il feuilletait son carnet de commandes sagement posé sur son plan de travail à côté de son ordinateur et de la caisse. Vu que vous êtes parti pour hésiter un moment, on a le temps de faire connaissance. »

Ha. Ha. Ha. En vrai, bonne vanne, fut forcé de reconnaître Pierrot en craquant un sourire, remontant son regard dans celui du vendeur — qu'il n'avait jamais vu ici, à la réflexion.

D'habitude, celui qui le servait était un vieux boulanger passionné et passionnant, chez qui Pierrot était déjà allé pour voir sa collection de coupes et médailles de meilleur artisan de France, en plus de sa bibliothèque immense et de ses rampes d'escalier merveilleusement ouvragées. De mémoire, il ne voulait pas partir à la retraite avant au moins cinq ans, et n'avait pas tant envie de se faire épauler, grand fan de solitude et de contrôle en cuisine.

Pierrot avait toujours voulu l'avoir comme grand-père.

Mais du coup, qui était ce jeune homme à la caisse ? Il ne pouvait pas être de la famille, le boulanger était veuf et sans enfants, et sa sœur, que Pierrot avait déjà rencontrée, était clairement raciste, alors si son fils avait épousé une arabe, Pierrot l'aurait su — il faut comprendre que le vendeur avait un teint et une forme du visage assez atypique, mais tout à fait charmants.

« Excusez-moi, mais vous êtes nouveau ici ? Demanda enfin Pierrot pour ne faire subir qu'un seul questionnement existentiel à la fois à son pauvre cerveau. Monsieur Journ est malade ? »

Monsieur Journ c'était le boulanger.

« Hm ? Non, il va très bien, répondit le gars, un fin sourire aux lèvres. Il devait s'absenter un peu aujourd'hui alors il m'a demandé de le remplacer. Vous voulez lui parler ? »

Funny Little World Où les histoires vivent. Découvrez maintenant