Chapitre 2

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Bouge ! Bouge, bouge, bouge, bouge !

Opale ne cessait d'ordonner à son corps de bouger, sans le moindre succès. Ses pieds étaient rivés sur le sol et ses muscles ne faisaient pas le moindre petit mouvement. Elle était littéralement tétanisée par la peur, et ne pouvait rien faire d'autre que forcer ses poumons à se gonfler pour respirer, au risque de s'évanouir et d'être ainsi à la merci de l'inconnu. Non que cela aurait fait une quelconque différence avec la situation actuelle, dans la mesure où elle était totalement incapable de bouger et donc déjà à sa merci.

C'était humiliant. Après des années à survivre en affrontant des êtres de cette espèce, voilà qu'elle était totalement incapable de réagir face à un loup-garou. Elle était capable d'avoir le dessus même sur les démons les plus retords, elle était une si bonne Chasseuse qu'après seulement cinq ans dans l'ordre, elle avait été promue au rang de vétérane, une chose rare que peu de Chasseurs pouvaient se venter de vivre. La mort faisait partie de chaque mission et rares étaient ceux qui étaient nommés vétérans de leur vivant. Elle avait donc été reconnue par la Confrérie comme étant redoutable et efficace, et elle ne parvenait même pas à ordonner à ses pieds de bouger.

La frustration monta encore en elle, sans que cela ai un quelconque impact sur la situation. Son corps resta pris d'un immobilisme affolant. Le loup s'était rendu compte que quelque chose n'allait pas. Opale pouvait voir dans ses yeux et dans son attitude les questions qu'il ne posait pas à voix haute. Sa propre attitude la faisait probablement passer pour une proie à ses yeux, et il n'allait pas tarder à lui sauter dessus et à l'attaquer. Il fallait qu'elle bouge, elle était capable de le faire.

Mais rien... Pas le moindre mouvement.

Quand Paul, un Chasseur occupant le poste d'agent de liaison entra dans la salle d'entrainement, l'humiliation que vivait Opale fut encore plus profonde. Savoir qu'un de ses collègues allait la voir dans un tel état de faiblesse allait ajouter à l'humiliation. Peu de ses pairs étaient au courant pour le petit problème phobique de la jeune femme. L'équipe médicale, son patron, et quelques rares Chasseurs patrouillant régulièrement en ville, savaient qu'elle n'était pas capable de réagir convenablement face à un lycan. Paul, en sa qualité d'agent de liaison avec l'une des plus grosses meutes du secteur, savait. Cela expliqua qu'il se figea en la voyant, comprenant d'un coup d'œil la situation. S'il était malin, il escorterait le loup hors du QG.

Paul se plaça entre le loup et elle de façon à attirer le regard de l'intrus sur lui. L'homme ne se laissa cependant pas déconcentrer et garda ses yeux fixés sur elle. Par sa peur, elle s'était transformée en proie aux yeux d'un des pires prédateurs que cette Terre ait portés. Paul essayait d'attirer l'attention du loup sur lui, mais les yeux gris clair de cet homme restaient verrouillés sur elle. Il semblait voir en elle, percevoir ses faiblesses et se délecter de sa supériorité.

Ces animaux se plaisaient toujours à terroriser et faire valoir leur force par rapport aux autres. Si seulement ils savaient qu'il existait plus gros et plus dangereux qu'un petit loup galeux. Mais ce qui faisait la force des loups, c'était la meute, cet esprit de solidarité qui faisait que si vous en attaquiez un, vous vous retrouviez avec tous les loups-garous du continent à vos trousses. Opale ne le savait que trop.

Lenny les rejoignit dans la salle d'entrainement, l'air trop détendu pour que cela soit vrai. Lenny, en tant que patron de cette section et ancien Chasseur ayant survécu à sa carrière, n'était jamais aussi détendu. Il jugea la situation d'un regard, échangea quelques mots avec le loup et Paul, avant de se diriger droit vers elle. Il se positionna entre le lycan et elle de façon à bloquer la vue des deux.

Une soixantaine d'années, les cheveux blancs coupés court, Lenny avait conservé son physique de combattant malgré son inactivité sur le terrain depuis plusieurs années. Plutôt large d'épaule, et de taille moyenne, il était plus d'un genre athlétique que bodybuilder. Mais il ne fallait pas de fier à son âge : si l'envie le prenait, il serait capable de mettre au tapis n'importe lequel de ses Chasseurs, même les plus jeunes ou plus costaud. À ce point de vue, la Confrérie des Chasseurs fonctionnait comme les meutes lycanes et les clans vampires : celui qui était à la direction était le plus fort et le plus respecté. Lenny occupait ce poste depuis plus de dix ans, ce qui était un gage de sa force.

Un amour d'OmégaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant