Chapitre 3

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 Lucien n'avait pas réussi à dormir correctement. Ses songés étaient hantés par la vision des magnifiques yeux de son âme sœur, pleins de terreur, et de son corps inconscient dans les bras de Lenny. Il s'était plusieurs fois réveillé avec l'envie d'aller la chercher qui le tenaillait comme des griffes infernales. Depuis son réveil, il se sentait d'humeur rageuse, et aurait bien laissé son loup courir dans la forêt si la situation de la meute n'avait pas été aussi précaire. Depuis l'assassinat barbare de la compagne humaine d'un de ses loups, la meute entière était sur les dents. La rage grossissait de jour en jour, et il devenait de plus en plus difficile de retenir les siens.

Lisbeth, un des soldats de la meute, entra dans son bureau, un dossier dans la main. En tant qu'ancien agent de police, elle était le plus souvent chargée d'effectuer des recherches ou des vérifications afin de s'assurer que rien de négatif ou de mauvais n'arrive à la meute.

— Tu as trouvé quelque chose, demanda-t-il en s'asseyant derrière son bureau.

— Pas grand-chose, répondit-elle en lui tendant une photo.

Lucien fut saisi par la beauté de la femme, qui avait probablement été photographiée à son insu. De profil, elle se tenait à côté d'une moto qui ne pouvait être autrement qualifiée que de splendeur mécanique. Le casque à mi-chemin de son visage, elle semblait énervée. Le corps raide, ferme sur ses appuis, ses gestes, pourtant immobiles, trahissait de son énervement. Même de profil, elle était saisissante. Le bout de son nez était légèrement retroussait et donnait à son visage rond un petit air elfique. Debout à côté de sa moto, Lucien remarqua à quel point elle était petite.

— Alors ?

— Rien, répondit Lisbeth en dansant d'un pied sur l'autre.

— Comment ça rien ?

— Il n'y a aucune information sur elle. C'est comme si elle n'existait pas. Pas d'état civil, pas d'acte de naissance, pas de photo de classe. Cette chasseuse, Opale, n'existe pas. J'ai piraté les serveurs de la Confrérie, et j'ai trouvé quelque chose.

Voyant qu'elle n'en disait pas plus, Lucien plissa les yeux. Lisbeth n'était pas du genre à hésiter. Plutôt franche de nature, sa transformation en loup-garou n'avait pas adouci son franc parlé.

— Qu'est-ce que tu n'oses pas me dire ?

— Je n'ai pas pu aller très loin dans leur dossier avant d'être éjectée de leur système, mais j'en ai vu suffisamment. Elle est entrée dans la Confrérie à l'âge de dix-huit ans, et a été promue vétérane cinq ans plus tard. Elle semble avoir un taux de résolution de 100 % et est catégorisée comme une experte en combat rapproché, et spécialiste du tir à l'arc.

Ce n'était pas tout, ces informations n'étaient pas sensibles et ne pouvaient être la cause du malaise de son soldat.

— Qui a-t-il d'autre ?

— Dans leur dossier, elle est enregistrée comme s'appelant Opale Carmin, épouse de Paul Carmin.

La rage s'empara de Lucien si rapidement qu'il ne put empêcher la transformation partielle de ses mains, ni même retenir le grondement sourd qui fit vibrer sa cage thoracique.

— Quoi ? grogna-t-il inintelligible.

— L'acte de mariage date d'il y a huit ans. Ils se sont mariés quinze jours après qu'elle soit devenue une Chasseuse.

Paul, l'agent de liaison de la meute, l'homme à qui il s'était livré concernant son destin, était le mari de son âme sœur ! C'était inadmissible. Comment pouvaient-ils être mariés ? D'ailleurs Paul devait avoir dix ou quinze ans de plus qu'Opale, comment avait-il put épouser une femme de dix-huit ans alors qu'il avait été âgé de presque trente ans.

Un amour d'OmégaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant