Chapitre 1 : Ma vie...

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J'étais à nouveau assise, là, dans cette même salle de classe que j'haïssais du plus profond de mon être, à ce bureau qui ne m'eut apporté que stresse, larmes, angoisse, et désespoir. Pourquoi étais-je encore ici ? La professeure m'interrogea alors, voyant que j'étais perdue dans mes pensées, ne faisant plus attention à son cours. Sa voix mesquine résonna dans la salle :

- Lia, viens résoudre l'équation au tableau. Si tu ne suis pas, c'est que tu dois maîtriser parfaitement le sujet.

Je me levai donc. Mes camarades de classe, toujours aussi aimables riaient en silence pour la plupart, ou alors me lançaient des sourires narquois, plus qu'heureux de pouvoir me voir me ridiculiser en public. Cela ne m'étonnait guère. Après tout, n'était-ce pas le propre de l'homme que de se moquer du malheur de ses congénères ? Je n'en savais rien. Je voulais croire que non, que nous valions mieux que ça, qu'un jour nous serions tous solidaires, unis, mais le spectacle devant moi était loin de confirmer mon idéal.

Une fois devant le tableau, je l'observai momentanément. Il s'agissait d'une équation de second degré. On avait commencé ce cours hier et je n'étais pas vraiment attentive. Heureusement je l'avais déjà étudié de mon côté. Je suivi donc la méthode pour calculer le discriminant puis, m'étant débarrasser du plus compliqué, finis le calcul sans encombres.

J'écrivis alors les différentes étapes de la résolution de l'équation au tableau, tout en expliquant oralement ma démarche. J'eus fini au bout de cinq minutes. La professeure s'approcha, tout d'abord sûre d'elle, croyant que j'allais me tromper, puis arbora un air mécontent en voyant que le résultat était le bon, et prit la parole :

- C'est bon, tu peux retourner à ta place. Sois plus attentive la prochaine fois ou je ne serais pas aussi gentille.

Mes camarades adorés maugréaient aussi dans leur coin. J'entendis alors un murmure :

- Toute façon elle est née comme ça, y a pas de quoi être fière.

Cette remarque me fit sortir de mes gonds bien que je ne le montrai pas. Il ne savait pas ce que je vivais. Tout ce qu'il voyait, tout ce qu'ils pouvaient voir, c'était Lia, la petite intello à lunettes, brune au yeux marrons, première de la classe. Ils ne me connaissaient pas, seulement ma façade, ma persona, et pas la personne brisée aussi bien par la pression scolaire que par les mauvais traitements, juste en dessous. Ces personnes là ne voyaient que ce qui les arrangeaient, bien trop lâches pour ne serait-ce qu'accepter la face cachée de ce monde. Il en serait toujours ainsi. Il était bien plus facile d'ignorer le malheur des autres que d'essayer d'y faire face.

Je soupirai, désespérée d'être coincé ici, et m'assis à ma place. Le cours continua normalement pour moi, quelqu'un ayant l'amabilité de m'écrire des petits mots sur des morceaux de papier, les roulant en boules pour me les lancer. Ceux ci faisaient preuve d'une gentillesse infinie pour m'insulter de divers manières. C'est ce que je découvris en y jetant un œil.

Ayant fait l'erreur de les lire, je dû retenir un sanglot. Après tout, je n'étais pas insensible, une accumulation de haine pouvait briser même la plus courageuse des personnes, c'était ce qu'il était en train de m'arriver. Je respirai lentement pour me calmer puis, je me retournai vers le coupable et lui affichai mon plus beau sourire. Je devais être forte, la chasseuse et non la chassée, la prédatrice au lieu de la proie. Au fond, c'était comme un jeux. Si je montrais un quelconque signe de faiblesse, je perdais, le but étant d'empêcher mon masque de se fissurer jusqu'à la fin, ma fin, la fin de tout.

La sonnerie, salvatrice, retentit quelques minutes plus tard. Toutefois je restai à ma place et attendis que tout le monde sorte. Les élèves se bousculèrent presque, impatients d'être enfin libérés de ce calvaire qu'était un cours de mathématiques pour eux. Je me surpris à envier cette insouciance, cette banalité, voulant les rejoindre. Pourtant je le savais, si je m'en allais en même temps que les autres, ils me charrieraient inévitablement.

Une odieuse utopieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant