Ch. 4 - Fais pas ton cinéma

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Apolline.

Quatre jours sont passés depuis sa putain d'idée à la con. S'il pense réellement que je suis née de la dernière pluie, alors il se trompe. Pourtant, il n'y verra que du feu. Pourquoi ? Tout simplement parce que nous n'avons pas la même tactique. Et surtout, puisqu'il aime le souligner, nous ne jouons pas dans la même cour.

— Apolline, ton portable, s'il te plaît. Je te signale qu'on est toujours à table.

Mon regard se dresse et plonge sans plus attendre dans les iris de mon père. Quand il opte pour cette intonation, c'est qu'il a passé une sale journée. Et que fait-il dans ces moments-là ? Et bien, il ne trouve rien de mieux que de se servir un verre de plus. Comme à chaque fois, il reste sur un bon rouge.

— Pour rappel, quand j'habitais seule je —

— Tu n'étais plus en sécurité, Apolline.

Ma mâchoire se serre à l'entente des mots de ma mère. 

Si d'apparence mon monde ne paraît que paillettes, ce n'est qu'une illusion. En s'approchant de plus près, on se rend compte qu'il ne faut pas se fier aux apparences. Effectivement, ce ne sont que de simples bouts de plastique polis par le temps et usés par la vie. Alors parfois, il m'arrive moi aussi d'avoir l'impression d'être une simple paillette.

— J'ai 21 ans, maman. Je suis une jeune adulte maintenant et je dois me débrouiller par moi-même. En même temps que mes études, je prendrais un petit boulot le soir pour —.

— Chérie, chérie, chérie... me coupe ironiquement mon père. Pourquoi tu aimes te compliquer la vie à ce point ?

Il dresse son verre en cristal sans dévier son regard du mien. Il n'hésite pas à me lancer son fameux clin d'œil qui en dit long. Sans me le dire ouvertement, il juge mes choix.

Mon attention se porte à présent sur ma mère qui préfère rester muette. À force de se taire en public, elle oublie que son avis compte dans le cercle intime. Lumineuse à l'extérieur lors des soirées cocktails, elle s'éteint après que ses talons à semelles rouges soient retirés.

Alors, je prends son silence comme une réponse.

— Ne m'attendez pas. Ce soir, je sors.

— Av... avec qui ? Et quelle est donc cette soirée dont tu —

Que ça leur plaise ou non, j'ai besoin d'air. Je ne suis plus la petite fille qu'il protège depuis toujours. En fait, j'ai besoin d'air et ils ont du mal à le comprendre.

Ils crient avant d'avoir mal.

Ils me guérissent sans que je sois blessée.

Et ça, je n'en peux plus.

— Maman, c'est soirée cinéma. Mes hobbies ne changent pas.

Un souffle d'agacement se propage dans l'atmosphère. Ça, c'est quand elle décide d'appeler son mari à la rescousse.

— Je te signale que tu as cours demain, la mère d'Elena vient te récupérer d'ailleurs. On ne peut pas s'organiser autrement.

Elena est la fille d'un collègue de boulot à mon père. Je l'ai vu à deux ou trois reprises, mais c'est le genre de fille qui ne m'intéresse pas. Si on doit utiliser une expression pour la qualifier, c'est une véritable source d'emmerdes. Je me retrouve forcée de faire le trajet avec eux, alors que j'ai ma propre voiture.

Ça sera la dernière fois. J'en ai marre que mes parents veulent avoir le contrôle sur mes déplacements. Par chance, je regorge d'idées et d'astuces pour pouvoir les berner. Heureusement, parce que je ne suis pas certaine qu'ils accepteraient mes virées avec cet abruti d'Exton.

Et siOù les histoires vivent. Découvrez maintenant