CHAPITRE 14 : Ellis

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–    Bien, Harrison ! Sacrée forme aujourd'hui !

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– Bien, Harrison ! Sacrée forme aujourd'hui !

Pourtant, je suis vidé. En sueurs, je tire avec mes dents sur la fermeture d'un de mes gants de boxe pour pouvoir l'enlever. Billy tape sur mon épaule et je descends du ring après lui.

– Bravo, Ellis !

Léo me tend une bouteille d'eau que je bois d'une traite en me laissant tomber sur le banc à côté de lui.

– Tu es fatigué ?
– Un peu, ouais.

Je peine à calmer ma respiration, j'ai vraiment tout donné et j'en avais besoin, même si je suis fichu, ça fait tellement de bien !

– Miller ! T'as peur de t'envoler ou quoi ? C'est beaucoup trop lourd pour toi comme charge !

Je ris en même temps que Léo en observant Billy courir pour porter secours à un jeune qui ne doit même pas avoir dix-huit ans et qui s'imaginait apparemment qu'il allait réussir à soulever une haltère beaucoup plus lourde que nécessaire.
J'adore venir ici, la salle de Billy est peut-être même le seul endroit avec l'appartement d'Adriana où j'arrive à me sentir bien. J'aime le béton brut au sol, les murs en briques rouges et les grosses lampes industrielles accrochées aux poutres en bois du haut plafond. Il y a tout ce qu'il faut pour pouvoir se défouler dans l'immense salle principale, un coin avec des tapis de course, un autre avec des rameurs et des vélos, toute une rangée de sacs de frappe et surtout,  deux rings.

– On travaillera l'endurance demain, dit Billy en revenant près de nous.
– Je travaille.
– Alors je veux que tu fasses un footing d'au moins 10, voir 15km !

Je fais un salut militaire en guise de réponse. Billy est exigeant mais c'est le meilleur. Ancien champion de boxe prometteur, il a tout arrêté pour devenir entraîneur quand le sien est mort brutalement d'une crise cardiaque. Il s'est battu pour que cette salle qui l'avait quasiment vu grandir ne ferme pas ses portes et trente ans plus tard on peut dire qu'il a réussi son pari, il l'a même agrandie et a investi dans du matériel haut de gamme qui a attiré des sportifs de bon niveau. Sa réputation fait beaucoup aussi, personne ne transmet son savoir avec autant de passion que lui. Comme ça, avec ses cheveux blancs coupés comme ceux d'un militaire, son nez un peu tordu et sa mâchoire carrée, on dirait un parfait Monsieur Tout-le-monde alors que même s'il s'est un peu arrondi avec le temps et qu'il n'est pas bien grand, il mise tout sur sa rapidité et sa force et ça fonctionne, il est capable de me mettre une raclée en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Sa voix rauque et puissante fait bien comprendre qu'avec lui on ne rigole pas mais il a le cœur sur la main. Il est sévère et juste, personne ne peut dire le contraire.

– Il faut que tu gardes cette forme pour ton combat, dit-il en me pointant du doigt tout en rangeant des kettlebell.
– Je pourrai venir ? demande Léo.
– Non !

Billy et moi avons répondu à l'unisson, au grand désespoir de mon petit frère.

– Mais quand est-ce que je pourrai ?
– Quand tu auras 21 ans, lui répond mon entraîneur.
– Tu dis 18 ans d'habitude !

Je croise le regard de Billy qui rigole silencieusement. Léo ne lâchera pas l'affaire tant qu'on ne l'aura pas emmené, nous le savons tous les deux. Je lui fais signe de la tête de se lever pour que nous puissions partir.

– Tu veux bien chercher mon sac au vestiaire, s'il te plaît ?

Il part en courant et Billy revient vers moi avec une mine grave qui ne me dit rien qui vaille.

– Tu es sûr que ça ira, Ellis ?
– Pourquoi ça n'irait pas ?
– Léo m'a dit ce qui s'est passé.

À quel sujet... ? Si je pose la question, Billy va comprendre qu'il y aurait plusieurs choses compromettantes à raconter et je n'ai pas besoin de me faire sermonner, j'ai Adriana pour ça.

– C'est bien beau de jouer les héros mais ça aurait pu mal finir, tu sais qu'ils sont particulièrement stupides les cousins Baranov ! reprend-il d'une voix discrète mais forte, en s'approchant un peu plus de moi.

D'accord, on parle de ça.

– Justement, ils sont stupides. Et je n'étais pas seul, Ga...
– Depuis quand tu apprends à Léo qu'il faut se faire justice soi-même ? me coupe-t-il avec un regard sévère.

Là, il marque un point, pour ne pas changer. En même temps, si mon cher petit frère évitait de fouiner, il ne serait pas au courant de tout ça.

– C'est qui cette fille que tu as voulu aider ?
– Personne.
– Léo m'a dit où tu l'as connue...

Pourquoi, pourquoi je n'arrive pas à faire comprendre à cette demi-portion infernale qu'il doit tenir sa langue ? Je pousse un soupir que je ne tente même pas de cacher.

– Quand est-ce que tu vas te décider à faire quelque chose ? N'attends pas qu'il t'arrive malheur ! Mort, tu ne pourras plus rien faire pour Léo ! dit-il en serrant mon bras et en me regardant droit dans les yeux. 

Je sais qu'il a raison mais je suis pieds et poings liés. Léo revient avec mon sac sur l'épaule, beaucoup trop encombrant pour lui, alors je tends mon bras pour l'aider et le remercie avec un sourire qu'il me rend.
C'est pour lui tout ça, tout ce que je fais c'est pour lui et même si ce n'est pas parfait, on continuera comme ça tant qu'on le pourra. On n'a pas le choix. Je n'ai pas le choix.

C'est toi pour moi et moi pour toi Où les histoires vivent. Découvrez maintenant