Chapitre 3

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C'est pas bon, pas bon du tout même.

Je reste figée sur place, à le regarder bouger, tourner en rond, paralysée.

-Liz, je t'en supplie, dit quelque chose, tu vas me rendre fou à force de rester silencieuse.

Je ne pouvais pas, les larmes me montaient aux yeux et ma gorge se serrait.

Une larme coula, puis une deuxième, et avant qu'un flot en coule, il m'attrapa pas la taille et et me serra contre poitrine.

-Putain... Dit-il. Comment en est on arrivé là ?

La pluie s'est arrêtée, cela faisait presque une semaine que l'on avait pas vu le soleil. Je regarde les gens passer dans la rue, je peux enfin voir leur visage, sans capuche ni parapluie.

Peut-être que placer ma table à manger en face de ma fenêtre n'était pas une bonne idée, je passe trop de mon temps devant cette baie-vitrée. J'aimerai pouvoir dire que je passe mes journées comme une étudiante en tout genre mais ce serait faux. Au lieu de prendre mon petit déjeuner, je suis absorbée par mon ordinateur portable avec un café en main. Je ne vais pas prétendre que je suis une élève studieuse, non plus. Je ne travaille pas.

Non, je suis sur Instagram, plus précisément sur le compte Jace_wlm, et je n'arrive pas à me résoudre à le demander en ami. Après tout, étant donné la façon avec laquelle il m'a adressé la parole la semaine dernière, il ne veut rien à voir avec moi. Et c'est réciproque.

Le 15 octobre 2020, voilà ou je suis. Mentalement. Constamment, en cours, au sport, je ne pense qu'à ça. On m'avait dit que ça passerait, pourtant. "Il y a 5 stages du deuil, puis c'est finis" m'avait-on assuré.

Alors qu'est-ce que je fous encore là-bas ?

Certes, ma vie ne tourne pas autour de ça, pour être honnête, cela faisait même quelques temps que je me sentais plus légère, j'y pensais mais sans ce sentiment de culpabilité qui m'engouffrait si souvent auparavant.

Mais lui, le revoir, ça a tout gâché.

Quel con.

Le nombre de fois ou j'ai repensé à cette altercation, les pleurs, la colère, le regret, tout me submergeait.

Mais je ne laisserais pas de piètres retrouvailles gâcher tout ce que j'ai construit, il n'en est pas question. Et puis pour qui il se prend pour me donner des ordres ?

Si je retourne pas dans ce bar miteux, ce ne sera pas parce qu'il m'a dit de ne pas le faire, ce serait de ma propre volonté. Je ne lui ai jamais obéit au doigt et à l'œil, ce n'est pas maintenant que ça va commencer.

Perdue dans mes pensées, je sursaute lorsque mon téléphone sonne.

Je soulève mon téléphone et répond à ma mère.

-Allô ?

J'entends quelques bruissements avant de comprendre les bribes de voix.

-Lizzie ? Comment ça va ?

Ma mère m'appelle tous les mercredis, pour demander de mes nouvelles, généralement je n'ai pas grand chose à lui dire en dehors de mes cours, mais je sais pertinemment qu'il vaudrait mieux ne pas évoquer ma rencontre avec Jace.

Nous parlons de tout et de rien pendant quelques heures, c'est surtout elle qui parle, je sens qu'elle a besoin de quelqu'un à qui tout dire. Et il se trouve que ce quelqu'un est moi. Heureusement que je fais des études pour devenir psy, sinon elle me rendrait folle.

Au bout d'un certain temps, je me rend compte que nous n'avons toujours pas évoqué mon père, ni qu'elle m'a proposé de lui parler. J'évoque alors le sujet.

-Et papa ? Ou est-il ?

Elle marque une pause, et j'entends ses respirations lourdes à travers l'émetteur.

-Il est...euh... Tu sais, il fait sa balade du mois, il est parti acheté les fleurs ce matin et maintenant il se "promène".

Je pousse un soupir, non, mon père ne trompe pas ma mère, c'est bien plus compliqué que ça, et par moment j'aurais préféré que cela ne soit que ça.

La conversation dure encore quelques instants jusqu'à-ce qu'on se dise au revoir et que l'on raccroche.

Je retourne sur mon ordinateur, mais cette fois-ci pour travailler, j'ai un partiel qui arrive et je ne peux pas me permettre de le rater.

Je n'y arrive pas, Il est déjà 19h et tout ce que j'ai fait c'est penser a lui, à Mon père et à ma mère. Notre conversation ne m'a pas plu, sa fin encore moins, si je veux passer à autre chose, il faut mettre les poins sur les i une bonne fois pour toute.

Je sors de ma chambre dans laquelle je me sentais étouffée par mes propres questions, j'enfile le premier manteaux que je trouve et je descend, encore une fois, marche par marche, tous mes escaliers.

Mon cœur bas vite, trop vite. Ca fait 5 ans, je suis censée être passée à autre chose, ce n'est pas normal de se sentir mourir pour quelque chose qui date de tant d'années.

Je descend de ma voiture et rentre dans le bar en trombe, sans laisser le temps au videur de m'interpeller. Comme la dernière fois, je me retrouve face à une foule de gens saouls, drogués, dansant.

L'odeur de la sueur et de l'alcool envahit mes narines mais je concentre mais efforts pour essayer de l'apercevoir dans la foule.

Ne le voyant pas, je commence à perdre espoir.

Pourquoi serait-il dans ce bar un mercredi soir ? Pourquoi reviendrait-il dans ce bar tout court ?

Tout en avalant mon shot de vodka, j'aperçois le dos d'une chemise blanche traverser la foule pour se diriger vers une porte au fond de la salle.

Je reconnais trop bien ces cheveux et cette carrure pour l'ignorer, c'est lui.

Je me précipite aussi vite que je le peux et m'élance à sa poursuite.

J'arrive devant la porte par laquelle il vient de passer et l'ouvre, je me retrouve dans un couloir étroit très mal éclairé. Je m'avance jusqu'au bout de ce couloir.

Je sais que se promener dans ce genre d'endroit n'est probablement pas une bonne idée. Mais j'ai besoin d'en finir, puis il est probablement juste en train de fumer dans un coin paumé.

J'arrive à une porte de secours et l'ouvre discrètement, elle donne sur une ruelle sombre et vide. Je commence à me diriger plus loin quand j'entends des voix qui me font figer.

-Donne moi une bonne raison pour laquelle je devrais te laisser partir.

Une voix lente et grave, pleine de haine prononce ces quelques mots. Reconnaissant Jace, je passe la tête de l'autre côté du mur.

Ce que je vis me glaça le sang.

Un homme plaqué contre le mur par la gorge, étranglé, il essaie de se débattre, en secouant ses jambes pour atteindre son agresseur. 

A ses pieds, un corps, gisant, le visage défiguré, le sang coulant jusqu'à atteindre les chaussures de Jace.

Je suis tétanisée, la chemise blanche que j'ai reconnu plus tôt est maintenant tachée d'un rouge sombre et épais.



Enfin, l'histoire peut vraiment commencer....

Bye  !

Verre à moitié videOù les histoires vivent. Découvrez maintenant