Chapitre 1

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Chapitre 1


Yasha se réveilla en sursaut, totalement désorientée. Elle était allongée dans un lit de fortune, dans une petite pièce sans fenêtre à peine plus grande que sa couche. Les murs en pierre lisse ne lui offraient aucune possibilité de fuite. Pas plus que le lourd panneau de bois qui en verrouillait la sortie.

Elle soupira de soulagement en constatant qu'elle portait toujours ses vêtements. La tension revint cependant très vite à la charge lorsqu'elle entendit le cliquetis d'une clé dans la serrure de sa porte. Elle était prisonnière... et elle allait rencontrer son geôlier.

Une femme entra calmement et lui offrit un sourire éclatant quand elle constata son mouvement de recul. Elle s'assit au bord du lit et se figea, de cette immobilité flippante qui était tout sauf naturelle. Elle était grande, blonde avec des yeux bleus qui auraient pu être renversants s'ils n'étaient pas si vides. Yasha en avait  l’estomac retourné. Ce qu'elle voyait était une aberration, elle le ressentait instinctivement. Jamais une couleur d'aura ne lui avait fait cet effet là et son cerveau lui hurlait que ce vert vicié qui entourait l'inconnue annonçait qu'elle devrait être morte.

Elle réalisa à ce moment là ce qu'était sa vis-à-vis. Une morte-vivante, un zombie... mais à peine l'idée lui effleura l’esprit que sa raison lui martela que c'était impossible. Le coup qu'elle avait reçu sur la tête avait sacrément du la secouer si ce genre de fantaisie tout droit sortie d'un mauvais film de série B lui semblait envisageable. L'idée ne la quitta pas pour autant.

La porte s'ouvrit à nouveau, sur un homme cette fois. Et si la couleur autour de la femme l'avait dégoutée, celle de ce monstre la fit littéralement vomir. Elle eut juste le temps de se pencher par dessus la couverture et  déversa le contenu de son estomac sur le sol. Il lui sourit et prit la parole avec une voix douce.

- Bienvenue, petite sensitive. Je suis Anton, le Maître des lieux. Tu es mon invitée, fais comme chez toi mais ne t'approche pas des sorties, les gardes à l'extérieur te feraient du mal. Voici Aliénor, dit-il en désignant la femme. Elle est à ton service. Tu peux lui demander tout ce que tu veux, sauf de te faire sortir bien sur. À partir de maintenant, elle est à toi et fera tout ce que tu lui demande. Je vais devoir te laisser, n'hésites pas à t'adresser à n'importe lequel de mes serviteurs si tu as besoin de quoi que ce soit. Aliénor ! Conduis ta maitresse jusqu'à sa chambre !

La blonde sursauta lorsqu'il aboya son nom et se redressa, l'air à nouveau vivante. Anton avait quitté la pièce en lançant son dernier ordre. Étrange, d'ailleurs, l'aura d'Aliénor était passée d'un vert maladif à un profond vert forêt. Ce n'était toujours pas naturel mais, au moins, elle ne ressentait plus ce besoin impérieux de ramper à l'autre bout de la pièce quand elle la regardait.

Alienor lui sourit gentiment et lui fit signe de la suivre. N'ayant pas vraiment d'autre choix, elle obtempéra et quitta le refuge du lit avec précaution, ne voulant surtout pas s'étaler dans son propre vomi. Elle fut conduite dans une autre aile du manoir. (Sérieux ?! Qui habitait un manoir de nos jours ?) Sa guide l'emmena dans ce qu'elle constata être une suite avec salon et boudoir, à l'aménagement suranné. Yasha finit par atteindre ce qui allait apparemment être sa chambre.

Elle entra dans une pièce décorée avec goût, comme tout ce qu'elle avait vu jusque là, et se dirigea tout droit vers le miroir en pied pour s'observer. Lui avaient-ils fait quelque chose ? Physiquement, rien n'avait changé, toujours les mêmes cheveux noirs ébouriffés, un visage fin et pâle, aucune marque visible sur son corps élancé. Elle rencontra alors son regard bleu glacé dans la surface réfléchissante et gémit intérieurement.

Ses pupilles luisaient d'un éclat argenté, sa propre aura était plus prononcée que jamais. Le scintillement, habituellement bleu, était piqueté du mauve de la peur, mais le contraire aurait été inquiétant. Il fallait qu'elle se reprenne. Une fois rassurée sur son état physique, elle se tourna vers la blonde.

La vie d'une sorcière, c'est galèreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant