Le Roi du Silence

3.

Hope

Nouvelle-Orléans, Louisiane, 21h13

Un verre d'alcool devant moi, j'attends avec impatience l'arrivée de mes amis. Comme toujours ils sont en retard, et je sais pertinemment qu'ils ne sont pas prêts d'arriver.

Après leur avoir envoyé un message en fin de matinée, je suis reparti travailler sur mon planning et j'ai pris de l'avance sur mes cours. Il devait être 17 heures quand j'ai enfin quitté la bibliothèque.

À peine rentrée dans mon appartement, je me suis écroulée pour faire une sieste avant de me réveiller 3 heures plus tard, paniquée d'avoir loupé notre rendez- vous. Malgré ça je me suis quand même pointé avant eux.

Je n'ai cependant pas encore envoyé de réponse à mon messager mystère. J'ai passé la journée à chercher la meilleure réponse à envoyer - une réponse qui est par définition simple - mais rien ne me convenait.

C'était trop "gnangnan", trop simple, pas assez professionnelle. On aurait dit une gamine qui venait de recevoir un bol rempli de bonbons. Je n'arrivais pas à contenir ma joie et ça se voyait clairement dans ma réponse.

Et putain qu'est-ce que ça me fait chier ! Ça fait des mois que je réclame à ma petite étoile ce genre d'affaires et quand ça arrive enfin, quand je me sens revivre, quand ma passion se réactive, je suis incapble de formuler une réponse simple et concise. C'est comme si j'avais perdu toute mes compétences et que j'étais retournée au statut de débutante.

Il faut tout de même que je me décide avant demain sur ce que j'envoie au risque de perdre l'affaire du siècle. Généralement dans ce genre de réseau si on n'obtient pas de réponse dans les 12 ou 24 heures on sait que c'est mort. Les nouveaux n'en savent rien et nous relancent tous les deux jours en attendant de savoir si on s'occupera d'eux, alors qu'on les ignore volontairement.

Ici, je n'ai pas affaire à un débutant. Il a l'air de connaître les codes de ce monde et je ne veux pas avoir l'air d'une amatrice, je ne veux pas non plus le décevoir et me décevoir. Je veux donner le meilleur de moi-même, je veux être fière de ce que je fais.

Je me reconnecte rapidement à la réalité quand un serveur dépose un verre devant moi. Plus le temps passe, plus je m'impatiente. Je me mets à regarder l'heure toutes les deux minutes comme si le temps allait passer plus vite. Bien évidemment, il ne se passe rien. J'observe les secondes tourner sur l'horloge murale, mais à trop les fixer, j'ai la sensation que les aiguilles tournent dans le sens contraire.

Arghhhh pourquoi ça me semble si long.

J'observe l'intérieur du bar mais rien n'a changé depuis la dernière fois que je suis venue. Toujours aussi insalubre, toujours les mêmes personnes qui viennent noyer leurs problèmes dans l'alcool, toujours les mêmes regards persistants de la part d'homme qui pourrait être mon père. Si j'en avais un évidement...

Je finis mon verre et en recommande un autre immédiatement. Au bout du quatrième, je commence à m'impatienter et me décide à partir.

- Où est-ce que tu vas comme ça princesse ?

Jace...

- À un endroit où la princesse que je suis est traité comme elle le mérite, je lui répond avec un sourire malicieux naissant sur mon visage

Il s'approche et me prend dans ses bras avant même que je ne me retourne face à lui. Une sensation de bien-être m'enveloppe aussitôt. 

- Ça faisait longtemps ptite tête, dit Jace en me serrant aussi fort qu'il le peut