Chapitre 1.

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La jeune femme ouvrit brusquement les yeux en expirant un souffle brûlant. Ses poumons étaient au bord de l'explosion. Sa poitrine montait et descendait au rythme de sa respiration effrénée. Des sueurs froides perlaient son front pâle.
 
Elle attendit quelques secondes, le temps de se calmer, avant de se redresser dans un grand lit moelleux qui lui était inconnu. Observant son environnement, elle remarqua qu'elle se trouvait dans une chambre gigantesque au mobilier somptueux; des meubles aux bois d'ébène polis, des rideaux pourpres. Le style gothique collait parfaitement à celui aisé des maisons de riches.

La jeune femme exhala un soupire tremblant en se passant une main incrédule dans ses boucles noires. Le souvenir de vivre dans un endroit pareil ne lui revenait pas, ni la façon dont elle y était arrivée non plus. Son sang se gela dans ses veines quand elle remarqua que même son dernier souvenir avait déserté sa mémoire.

Elle repoussa les draps de la couche pour sortir du lit. Mais son pied n'eut même pas le temps de toucher le sol que la porte qui isolait la pièce s'ouvrit sur une femme à la mine légèrement soucieuse. Elle n'était pas très grande, avoisinant sans doute les un mètre soixante-cinq. Ses cheveux noirs étaient bouclés et cascadaient sur sa poitrine généreuse. Modestement maquillée, son visage disait qu'elle devait avoir une vingtaine d'années, son style vestimentaire pompeux rassurait sur son statut élevé.

Un sourire angélique illumina son visage quand elle vit que la jeune femme était enfin revenue d'entre les morts. Une pointe de compassion toucha son coeur quand elle remarqua son air méfiant. Ses talons se mirent à claquer sur le plancher lustré.

« Vous êtes enfin réveillée, que les dieux soient loués! Comment vous sentez-vous? Souffla-t-elle.

— Qui êtes-vous? Demanda son interlocutrice en fronçant les sourcils.

Elle n'avait pas perdu de temps, et sa voix transpèrcait avec une détermination sans borne. Cela fit sourire Sarah. Stanislas n'avait pas menti sur le tempérament de feu de cette jeune fille.

La jeune femme aux boucles noires se baissa pour être à son niveau. Elle lui prit la main, ne s'étonnant pas une seconde de la voir être tirée par son propriétaire dont les sourcils se tordaient de plus en plus de méfiance. Apparemment, elle voulait savoir et non être rassurée.

« Je suis Sarah. Vous êtes au château de Forest Orlean. C'est le seigneur Stanislas qui vous a amenée ici.»

Le visage de la captive sembla se relâcher un peu.

« Pourquoi? Que m'est-il arrivé?

— Vous avez un énorme trou de mémoire, je présume, lança Sarah, vous saurez tout en temps et en heures, pas d'inquiétude. Stanislas va venir vous expliquer la situation.

— Vous ne pouvez pas le faire vous?

— Non. Ce n'est pas à moi de le faire. Donc (elle prit la jeune femme par les épaules pour la coucher sur le lit) en attendant vous allez vous reposer un peu… d'accord?.»

Sa peau chaude transpirait la vie, alors que la sienne avait depuis longtemps perdu de sa chaleur. Cela lui donnait une envie folle de mordre cette chaire fraîche qui s'offrait à elle sans aucune résistance. Pourtant elle se retint. Un geste aussi idiot lui vaudrait la mort non seulement à cause de la toxicité du sang de transformation, mais aussi à cause d'un Stanislas qui aurait abattu le poids de sa colère sur elle après qu'il eut tout mis en œuvre pour que la jeune femme reste en vie, enfin… aussi vivante que possible.

« Je reviens vous voir dans quelques heures. Reposez vous en attendant» ajouta-t-elle en remontant les couvertures jusqu'à ses épaules.

Sur ce, Sarah quitta la chambre, n'omettant pas de fermer la porte à clé. Ce cliquetis acheva d'alarmer la malade. Elle se passa une main nerveuse sur les yeux. Que lui arrivait-elle? Dans quel guêpier avait-elle bien pu tomber? Mais quelle idiote! Tu es une idiote…!

À la suite de cette pensée, tout à coup, elle se redressa entre les draps, les yeux grands ouverts. Comment s'appelait-elle déjà?! Son prénom lui était sorti de la tête, comme tout le reste d'ailleurs. Si avant elle était inquiète, maintenant elle était apeurée. Était-ce possible d'avoir tout oublié jusqu'à son propre nom? Elle peinait à y croire.

Le sentiment terrible que quelque chose de grave s'était probablement produit lui broyait l'estomac. Sinon pourquoi aurait-elle perdu sa si précieuse mémoire!? Elle sauta du lit pour rejoindre la porte, tentant vainement de l'ouvrir alors même que précédemment elle avait entendu une clé la condamnée. Pourtant il fallait qu'elle s'enfuisse. Pour aller où? Ah ça, elle l'ignorait, mais elle espérait s'en souvenir bientôt.

La sensation que quelque chose clochait était quasi palpable. La dame vu auparavant avait une aura étrange. Un vent glacial suivait ses moindres faits et gestes, et cela lui faisait froid dans le dos.

D'un pas précipité, la jeune femme alla se poster près d'une des fenêtres. Du bout des doigts elle écarta les pans de rideaux pour pouvoir examiner l'extérieur. Il semblait qu'elle était réellement dans un château, même qu'en obliquant la tête vers la droite elle aperçu une tour. À plusieurs mètres de sa fenêtre, un immense jardin entouré d'une forêt impénétrable s'étalait devant elle. Et loin, très loin, elle repérait une discontinuité dans la course de la végétation, un espace béant qui ne pouvait être qu'un village selon elle. Et le fait qu'elle ne puisse pas en savoir plus l'enrageait.

À cran, le cerveau travaillant à mille à l'heure, elle referma sèchement les rideaux avant de tourner la tête vers la coiffeuse - un mobilier tout ce qu'il y avait de plus princier - à proximité. L'image que lui renvoya le miroir lui parut étranger, pourtant il ne pouvait que la refléter. Voilà que je ne me souviens même plus de mon visage. Ô joie! Ô bonheur! Énervée, elle se frotta furieusement la tête, espérant que ce geste violent la remettrait en place. Mais elle ne réussit qu'à se provoquer un mal de crâne atroce.

Un craquement annonçant la réouverture de la porte attira son attention. Un homme aux cheveux noirs et à la beauté phénoménale venait de faire son entrée dans la pièce. Qu'était-ce donc ce cirque?

Dear Mallory Où les histoires vivent. Découvrez maintenant