Acte I - Scène 2

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« À moins de lutter jusqu'au rivage, vous sombrerez dans les flots »

Des rafales de grêle criblaient mon corps. Frénétique, la mitraille glaciale brouillait mon champ de vision, annihilait mes sens et toute tentative de communiquer avec Arek. Une main fermement serrée sur son bras, l'autre sur le cordage d'un nœud, je tentai de me rééquilibrer sur le pont vacillant du navire.

« Hirose ! Vous allez nous t- »

Le tonnerre abrégea sa phrase. Le fracas d'une seconde détonation resserra ma poigne sur son bras tremblant. Le hurlement d'un marin décroché de sa prise surplomba un instant le grondement du vent, un tonneau fusa comme un projectile, me frôla et le plancher couvert d'éclats de givre s'inclina dans un sens avant de basculer dans l'autre. Le navire soumis à la houle abdiquait et nous étions ses captifs.

La poigne agrippée au cordage, je jetai un regard vers l'escalier qui menait au château de proue dans l'espoir de nous arracher à un naufrage certain.

« Il faut bouger ! hurlai-je à pleins poumons dans le creux de l'oreille d'Arek. »

Je tirai sur son bras. Il résista. Sous ses cheveux bruns détrempés, son regard ambré s'était figé sur le large. Était-il sonné ou complètement pétrifié par la peur ? Ça tombait mal, je devais progresser et je ne pouvais m'y résoudre sans lui. Je suivis la ligne de son regard en plissant les yeux pour contrer les rafales. Je me sentis pâlir. Les nuages obscurs parsemés d'éclairs frénétiques qui surplombaient l'océan tournoyaient en un immense cyclone, prêt à déferler sur nous.

Bon sang de...

Je secouai Arek pour le sortir de sa torpeur. Il m'adressa un regard terrorisé, jamais encore je ne l'avais vu aussi livide, et pourtant...

« On doit avancer ! hurlai-je. Lâchez ce foutu cordage ! »

L'intempérie redoubla de violence. Mon champ de vision se réduit encore, je clignai furieusement des yeux pour visualiser par à-coups la main d'Arek fermement verrouillée sur le cordage. Il s'y accrochait comme il s'accrochait à la vie. 

Je me résolus à lâcher le cordage pour lui dénouer les doigts, de force. Aussitôt sa main libérée, le navire s'éleva subitement par l'avant et nous glissâmes dans un mouvement parfaitement synchrone. Nous dévalâmes le pont sur le flanc. Je matérialisai aussitôt une nuée d'ombres pour nous transposer sur le château de proue.

Raté. Évidemment.

D'un geste prompt, je me servis de la glace pour former une barrière dans l'espoir de freiner notre chute. Nos deux corps s'y fracassèrent douloureusement dans un même craquement, la barrière céda. J'en matérialisai une deuxième. Même résultat. La troisième nous arrêta en se brisant partiellement, amortissant un choc frontal avec la cabine arrière. La foudre m'éblouit une fraction de seconde avant d'éclater à cent mètres.

Le pont se cabra en sens inverse. Nous glissâmes aussitôt, emportés par le mouvement. Je plissai les yeux, verrouillai ma vision sur la rampe de l'escalier qui menait à la proue : nous déboulions droit dessus.

Parfait !

L'escalier s'approcha à toute vitesse avant de ralentir : l'avant du navire remontait déjà. Je pris appui sur mes bras pour me redresser à la hâte. De toute ma force, je poussai Arek vers la rampe à laquelle il s'accrocha maladroitement tandis que... je perdis l'équilibre.

Merde ! En désespoir de cause, je tentai un bond en avant, mais une légère glissade avait annihilé ma force de propulsion. Je bondis, oui. Mais pas assez loin. Contre toute attente, des doigts agrippèrent mon poignet, stoppant ma chute . Arek m'avait rattrapé et de toute sa force, il me tira contre lui. Je le remerciai intérieurement.

La Symphonie des Âmes Errantes [ League of Legends fanfiction ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant