Chapitre Premier

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Ma main guide strictement le rasoir partout où se trouve de la mousse sur mon visage marqué par l'épuisement. Le bruit répétitif du rasoir résonne dans mes oreilles et mon regard reste plongé dans le miroir.
J'ai perdu la date de la dernière fois que je me suis rasé. J'ai commencé à avoir cette barbe qui me démange souvent, alors j'ai décidé de l'irradier.

Une fois le côté gauche rasé, je ne me reconnais plus. Durant quelques secondes, dans ma tête, j'ai cru apercevoir un inconnu devant le miroir. Et puis toutes ces questions envahissent mon esprit. Pourquoi je fais tout ça si je sais que je vais finir devant le palier de la voisine bourré et à moitié mort ?
Bonne question dont je n'ai pas de réponse, malheureusement. Il y a des jours dont on a envie de prendre soin de soi sans raison valable. Comme il y en a d'autres où la seule échappatoire reste de fermer les yeux.

Ainsi, je reprends ma mise en valeur masculine. Plus je me regarde, plus je me dis que j'aurais dû rester dans mon lit. Je suis tellement fatigué de rien faire que dès que je tente quelque chose, ça me fatigue encore plus. Décidément, la vie a ses préférés, et je n'en fais pas partie.
Un cri fait vibrer ma salle de bain et moi-même avant même que je termine l'autre moitié de ma joue.
Un grondement agacé s'échappe de mes lèvres, car je sais parfaitement à qui appartient ce cri. 

C'est bien sûr madame Palma, la vieille cruche qui se trouve au-dessus de moi. Elle a empoisonné son mari pour l'argent, tout le monde le sait sauf la police. Et depuis cet évènement, la dame se tape des crises parce que, soi-disant, son mari est revenu de l'enfer pour la punir.
Tous mes autres voisins ne la prennent pas au sérieux. J'ai bien sûr essayé de faire de même, mais son jeu d'acteur m'amuse plus que tout.
De cette façon, les cris s’évanouissent pour laisser place à un silence angoissant. Mais je m'en fous, ce n'est pas comme si ça ne durait pas depuis que j'habite ici.

Une fois ma barbe éliminée, j'ai retrouvé mes traits de jeunesse, notamment mes joues creuses et la mâchoire bien définie. 
Je me retrouve avec un sourire absurde passant ma main sur mon menton. Mon téléphone vibre dans ma poche au moment opportun.
Je réponds sans regarder qui sait quand j'entends la voix d'un ami proche.
— Luc, je te dérange ?
Me dit la voix de Slim, un gars que je connais depuis longtemps et dont j'ai étirement confiance.
— Non, quoi de neuf ? Je réponds en sortant de la salle de main pour aller me jeter sur le canapé.
— Ça te dit de prendre un verre ce soir ?
Me pose comme question Slim tandis que je jette un rapide coup d'œil vers les bouteilles vagabondant au pied du canapé.
Comme toute personne logique, je devrais dire non, parce que l'alcool est addictif et dangereux. Mais je ne crains que de Dieu, alors, je m'en fous. On n'a jamais assez d'alcool dans la vie, après tout.
— Si c'est toi qui paies, je réponds, provocant ainsi un petit ricanement de la part de Slim.

Après l'appel, je me laisse un peu aller en fumant deux clopes sur le balcon. J'ai une belle vue sur la rue animée. Je suis au premier étage et franchement je m'y plaît.
Le soir tombe plus vite que prévu, je terminais de mettre ma chemise avant de finalement sortir et de commencer la soirée.
Slim m'attendait devant la boîte de nuit en question. Il porte un joli costume qui le fait paraître idiot, mais pour les femmes, ça doit être une autre histoire.
— Vu ta tête, on dirait que tu as déjà bu une bouteille de tequila.
Me lance-t-il avec un sourire moqueur qui le fait lever les yeux en réponse.
Sans tarder, on entre et on se met dans le bain. Slim se dirige vers le barman, mais moi, je suis d'humeur à bouger.
Je repères une belle femme aux cheveux couleur or accompagnée de son groupe d'amies. 
On échange plusieurs contacts, faisant ainsi que ses joues rougissent avant qu'on se rejoigne sur la piste de danse.

Nos corps se mélangent pour une danse endiablée avant que nos langues fassent de même. Elle s'accroche à mes épaules et moi à ses hanches. Je la sens se presser contre moi et j'en fais de même avant de décider qu'on se dirige dans un endroit plus privé, je dirais.
Mais par malheur, Slim m'attrape, faisant ainsi que la mademoiselle s'en aille. Je me tourne vers lui, prêt à le frapper, mais il le frappe en premier aux côtés, amicalement.
— Je n'ai pas envie que tu finisses, père.
Je lui lance un regard noir, il m'agace de jour en jour.
On a passé le reste de la soirée à boire et à fumer ensemble. Slim faisait des blagues de merde, mais au fur et à mesure, je rigolais, l'alcool me montait à la tête.
Seulement quelques minutes plus tard, Slim me tient par les épaules, car je ne le tiens plus debout. J'aurais aimé éviter ce genre de situation embarrassante, mais j'en suis arrivé dans la vie à un stade irrécupérable.

Slim me tend un verre d'eau que je refuse et à la place, je reprends une gorgée de whisky. Mon blanc d'œil est maintenant rouge et mes mains trembles. Je repousse les mains de Slim pour aller vomir un bon coup aux toilettes.
Alors que je traînais mon corps qui pesait des tonnes, je sens une douleur aiguë me parcourir le dos. Mes paupières lourdes se posent sur l'homme qui en est la cause.
J'attrape le col de l'homme en le poussant contre un mur à proximité. Dans l'élan, je fais tomber une table et les verres dessus, provocant des coupures.
L'homme, décidément moins ivre que moi, répond en enfonçant ses ongles dans ma chair, ce qui me froisse le visage de douleur.
Les gens se précipitent vers nous pour nous séparer et je sens l'alcool me monter à la tête pour la première fois dans la soirée. Tout autour de moi n'est que des bruits sourds ou des images floues. Je sais, et pourtant, je ne fais rien pour changer. Si je continue comme ça, je finirai toxico.
Mais c'est tout simplement trop compliqué pour moi d'oublier. Ma blessure est tellement ouverte que la seule façon de la soulager est de se shooter.

Un quart d'heure seulement passé que Slim me ramène chez moi. Il ressemble à une mère en colère contre son fils.
Je boite et mes bras sont coupés, on dirait presque que je me fais du mal et même dans cette situation, j'arrive à merder. Slim me fait m'assoir sur mon palier tandis qu'il fouille à la recherche de ma clé. Dieu sait où je l'ai mise. À son expression, c'est la dernière fois qu'il m'invite à boire.
Pendant ce temps qui semble interminable, mon attention se tourne vers dehors. J'entends un bruit de voiture, ce qui est anormal.
Je vis ici depuis que je suis né, je connais mes voisins mieux que ma famille. Je sais les dates de sorties et d'entrées de chacun, et aucun ne sort après le minuit passé.
Slim doit remarquer aussi, je peux voir à son expression qu'il est surpris de me voir se lever après tout ce merdier. Je maintiens mon égard sur la porte d'entrée, mais pendant ce temps, ma vessie décide de rejoindre la bande et de se foutre de moi. Alors, sans me gêner, je commence à pisser sur le palier. Slim, lui, est habitué à mes conneries : il secoue la tête en fermant les yeux pour se priver de la vue séduisante ou pas.

Mais tel un avertissement de Dieu, la porte d'entrée s'ouvre et un petit bonhomme fait son apparition telle une fleur. Un chinois ou coréen qui a une frange stupide, on aurait dit qu'il sort dans un de ses Novel coréens. La peau lisse et le teint clair attirent mon attention avant que je l'en rende compte que mon engin est toujours en dehors de sa maison. Le bonhomme me regarde choqué, il lâche sa valise qui retombe grossièrement au sol tandis qu'il fait quelques pas en arrière.
Je rincarne, le gars ne sait pas dans quel merdier il se met en venant dans cet enfer. Il n'est sûrement pas prêt pour ce qui va venir, alors, je décide de lui donner un avant-goût.

— Quoi, tu veux la sucer ?


Not Perfection  Chris x LucOù les histoires vivent. Découvrez maintenant