Axel Cook

Chapitre 12

Je rentre chez moi. Je suis trempé. Je déteste ça. Je reprends forme humaine pour sécher plus vite, et aussi pour profiter de mes pouces opposables, et ainsi tourner le robinet d'eau chaude de la douche. Je jauge la température. C'est parfait. Je me glisse sous le jet sous la forme d'un python. Y'a aucune sensation de réchauffement qui soit plus agréable que sous la peau d'un reptile. Le sang froid, c'n'est pas super agréable, sauf quand tu glisses ton ventre sur une pierre chaude, ou que tu passes dans un rayon de soleil. Ou encore quand tu te love en boule sous une bonne douche bouillante. C'est très réconfortant, et là, tout de suite, j'ai vraiment besoin de réconfort.

Les serpents sont de vraies divas. Leur bain ne doit pas excéder les 32°C et pas plus d'une heure. Sans compter l'hygrométrie mathématiquement calculée au poil de cul, pour ceux qui vivent en captivité. Heureusement, moi, tout ça, je m'en fou.

J'ai de la chance d'être une espèce bizarre, parce qu'en vrai serpent, je souffrirais probablement de brûlures et de maladies de peau diverses vu la température élevée qui fournit beaucoup de vapeur à ma salle de bain, et surtout vu le temps que je passe sous cette eau réconfortante.

Je sors finalement. Je ne sais pas combien de temps j'ai passé sous la douche, mais bon sang, c'que ça fait du bien !

J'ai retourné tous les évènements de la soirée dans ma tête. Je me suis torturé l'esprit en cherchant toutes les façons possibles et imaginables de retourner voir Sarah. De chercher un moyen de savoir si elle avait vu, si elle avait compris, si elle m'en voulait. Peut-être que j'aurais pu lui faire croire qu'elle s'était trompée, que le stress de la situation lui avait fait voir des choses impossibles, de la persuader que cela arrivait souvent lorsqu'on se faisait agresser, etc... Mais... comment lui expliquer de quelle manière j'ai réussi à quitter son appartement ? 

Non, je crois que la seule solution de tout ce merdier, c'est que je me barre, sans rien dire, que je disparaisse de sa vie en ne lui laissant de moi que l'incertitude que j'existe vraiment.

À contrecœur, je sors un sac de sous mon lit et je commence à mettre mes habits dedans. Il va falloir que je trouve un box pour ranger tout ce bordel, et surtout un proprio qui accepte le cash sans poser de question. J'vais abandonner l'apparence d'humain pendant quelques temps. J'vais aller vivre dans la forêt, en loup, vers l'Italie, ou le Portugal, je ne sais pas encore. Peut-être que j'irais plus loin, sur un autre continent. Je ne sais pas.

Sarah me manque déjà. J'aurais tellement aimé pouvoir prolonger ce que nous avons vécu ensemble. Je la revois dans ce canapé, avec cette robe noire que son corps rendait encore plus sexy. Ses cheveux auburn qui encadrent son visage rond, souriant. Ses grand yeux verts qui me fixe. Sa peau douce et parfumée. Un frisson me parcourt tout entier.

Le jour se lève. Et je n'ai même pas dormi encore. Bah, je m'autoriserai bien une sieste mais j'ai trop de choses à faire, à commencer par m'habiller. Je pose le collier de Lucius - sur lequel je méditais douloureusement depuis plusieurs minutes - au sommet de la pile de fringue dans ma valise et attrape un jean, lorsque j'entends qu'on frappe à la porte.

- C'est ouvert ! » Je réponds négligemment en me dirigeant vers la salle de bain pour m'habiller. Ça doit être Carlos, le propriétaire de l'appartement, qui vient chercher son loyer. J'vais pouvoir lui dire que j'me barre. Je l'entends ouvrir la porte et entrer timidement.

Avec toute cette histoire, j'ai une boule dans la gorge. J'ai envie de m'arracher la pomme d'Adam tant j'ai l'impression qu'elle m'étrangle.

Soudain, quelque chose m'électrise : un parfum. Je reste aux aguets, pour être sûr que je ne me trompe pas. Non... Non, non ! Impossible ! 

Je me rue sur la porte de la salle de bain pour la fermer à clé. Merde ! Mais pourquoi j'ai fait ça ? Je suis enfermé dans ma propre salle de bain maintenant ! Et Sarah dehors, qui n'a qu'à m'attendre. Qu'est-ce que je vais lui dire putain ? Elle doit être tellement furax !