♞ Aujourd'hui
✧.* Point de vue d'Anastazia
Une nouvelle fois, les garçons m'ont abandonnée sur l'île saisonnière, me laissant, moi et ma pauvre cabane en fin de vie, de côté. Cette sensation de solitude, bien que familière, n'en est pas moins déchirante à chaque départ. Je me retrouve seule, face à la majesté brute de cette île sauvage, avec pour seule compagnie le murmure du vent dans les arbres et le roulement lointain des vagues se brisant sur le rivage.
Ma cabane, témoin muet de tant d'histoires et de souvenirs, montre les signes évidents de son âge avancé. Le bois, autrefois robuste et solide, est maintenant sacrément rongé par les éléments implacables de la nature. Les piliers vacillent légèrement sous mon poids, et le plancher craque sous mes pas, comme s'il était sur le point de céder à tout moment. Le toit, patchwork de tôles et de morceaux de bois hâtivement fixés, doit être changé régulièrement pour éviter les fuites pendant la saison des pluies.
Vivre dans cette cabane, surtout en saison humide, relève d'un défi quotidien. L'humidité s'infiltre partout, imprégnant chaque centimètre carré de mon modeste foyer. Mes vêtements sont constamment humides, mes couvertures moites de condensation. Le moisi s'attaque à tout ce qui ne bouge pas assez vite, envahissant les coins sombres et oubliés de ma cabane.
Charles et August n'ont aucune considération pour moi. Ils ne m'ont jamais laissé l'opportunité de leur montrer mon sens de l'aventure. Est-ce parce que je suis une femme ? Les Oubliées de sexe féminin sont rares. Rien que d'y penser, je bouillonne. Tant pis, je vais devoir leur montrer moi-même ce dont je suis capable. Ce bateau, je le construirai moi-même.
Depuis deux jours, je m'y essaie. J'ai tout d'abord commencé par choisir le bon bois, celui qui peut tenir face à l'eau. Ce sont des choses que j'ai apprises avec l'un des livres que j'ai dans ma cabane. La sélection du bois est cruciale : le cèdre, par exemple, est réputé pour sa résistance à l'eau et aux insectes. Je me suis donc tournée vers celui-ci, même si je n'ai pas pu me procurer les meilleures planches, faute de moyens et de disponibilité.
Ensuite, j'ai commencé à les assembler. Ne disposant que de quelques outils rudimentaires, mon travail manque de précision. J'ai opté pour une petite barque comme projet initial, pensant que ce serait une bonne base d'apprentissage avant de m'attaquer à une construction plus ambitieuse. Je n'ai pas cherché à aller dans les détails, me disant que pour un premier essai, ce n'était pas nécessaire. Mon objectif principal était de comprendre les bases de la construction navale.
Une fois la barque terminée, je l'ai examinée. Elle ne ressemblait à rien de vraiment fonctionnel, mais j'étais quand même curieuse de voir si elle pouvait flotter. Je l'ai poussée dans le sable pour la mettre à l'eau, sous les regards intrigués de quelques enfants d'agriculteurs au loin. À ma grande surprise, la barque semblait flotter, ce qui m'a donné un regain d'espoir. J'ai continué à la pousser jusqu'à ce que l'eau atteigne ma taille, puis j'ai sauté à l'intérieur.
C'est là que tout tourne mal. La barque commence immédiatement à couler, malgré le fait que je ne sois pas très lourde. « Merde, elle est foutue ! » Si j'étais sur l'île Meublière, je pourrais en obtenir une nouvelle en échangeant quelques objets de valeur volés. Dépitée, je sors la barque de l'eau et la retourne sur le sable pour la vider. Les enfants, même s'ils m'ignorent pour l'instant, seraient sûrement heureux de jouer aux pirates dessus.
Je dois réfléchir plus intelligemment. Le principal problème, c'est le manque d'outils adaptés.
J'ai donc décidé de me rendre à Bremin, en espérant trouver des outils bon marché auprès de l'Antiquaire. Bremin, même s'il n'y a pas la mer, est un endroit animé où il est plus facile de trouver ce dont on a besoin, ou même de voler discrètement quelques objets.
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Les Oubliés d'Ægir [Ré-écriture en cours]
Mistério / SuspenseLes océans ont englouti la plupart des terres humaines et continuent de monter sans raison explicable, réduisant la vie à de petits îlots dispersés et laissant très peu de survivants. Chacune de ces îles lutte pour sa survie avec ses maigres ressour...