Carita, Sirène ou humaine? Tome 2

Chapitre 19

Le royaume du roi de Stafir n'a jamais été si mouvementé. Des soldats courent dans tous les sens et dans tous les chemins pour satisfaire les demandes du roi qui ne fait qu'hurler de nouvelles ordres et s'indigne à tout. Malheur à la personne qui ose lui foncer dedans. Il lance encore quelques reproches à un soldat avant de finalement se mettre à respirer. Devant lui se tient le gamin qui porte la Rose de l'Enfer. Il est escorté par deux gardes et il leur fait signe de le suivre. Il entre dans son salon personnel et indique silencieusement aux deux gardes de les laisser seuls. Il s'assoie sur son fauteuil préféré et invite son interlocuteur à en faire de même. Il inspecte le garçon devant lui et soupire. Il est un beau garçon, mais il va devoir devenir un homme pour accomplir sa mission. Le roi ne laissera pas passer cette chance d'enfin vivre en parfaite harmonie avec les humains. Cela fait trop longtemps qu'ils vivent en hostilité que les humains ont même fini par renier leur existence. Cela doit cesser. Ils polluent de plus en plus leurs eaux et ne sont pas conscients de tout le mal qu'ils procurent. Les sirènes commencent à devenir de plus en plus malades à cause de toutes ces toxines qui sont déversées dans l'eau. C'est en son devoir d'arrêter cela, même au prix de la vie de l'un de ses sujets.

- Il n'y a aucun doute sur la raison de ta venue... n'est-ce pas? avance le roi.

Le garçon hoche la tête. Il aurait utilisé d'autres mots pour expliquer carrément comment on l'a forcé à venir, mais laisse passer ce détail.

Le roi veut de lui une entière collaboration. Il veut qu'il le suive de son plein gré pour finaliser la prophétie. Il sait bien que même s'il refusait, on l'obligerait à le faire. En revanche, il va essayer de tourner cela à son avantage. Il croit bien être en position de marchander... Mieux vaut essayer que rater une opportunité.

- J'ai une condition, par contre.

- Je t'écoute, l'invite le roi à parler.

- Je veux votre parole, votre Majesté, que peu importe le sort qui m'est réservé que vous allez donner une somme généreuse à ma famille. Vous devez savoir que les richesses commencent à manquer ici-bas et que cela nous serait d'une grande aide. Si vous accédez à ma requête, je vous suivrez volontairement dans le monde des humains et accepterez mon sort. Je ferai tout ce qu'il faut.

L'aplomb du jeune garçon prend le roi par surprise. Jamais on ne lui a parlé sur ce ton, un ton si commandant. Des pensées de sa femme enveloppent son esprit sans qu'il ne le veuille et il accepte sans réfléchir. Cela ne peut pas lui causer du mal... si?

Le roi se lève en tapant dans ses mains et hurle à ses gardes de venir. Ceux-ci entrent à toute vitesse dans la salle et demandent au roi ce qui se passe.

- Dites à tous de se préparer. Nous partons en direction du monde des humains dans quelques instants, le temps de finaliser les quelques derniers préparatifs.

Ils acquiescent tous en un simple mouvement de tête et se congédient eux-mêmes.

Le roi surveille le jeune garçon à côté de lui pour ne pas qu'il s'enfuit. Il sait pertinemment qu'il ne risque pas de s'en aller, mais il ne doit pas prendre de chance. La première fois qu'il l'a vu, le gamin était très fier de porter la Rose des Enfers. Il s'en ventait partout autour de lui et rayonnait de bonheur. Il se doute bien qu'à ce moment-là il ne devait pas savoir toutes les responsabilités que cela impliquaient et que maintenant il doit regretter d'avoir été si enjoué à l'idée d'être unique.

Le roi remplit son baluchon de tout ce qu'il pense qui pourrait lui être utile. Il demande inutilement au garçon s'il voudrait emporter quelque chose avec lui. Il secoue négativement la tête avant de soupirer. Il sait bien qu'il doit être courageux et se sacrifier pour la vie de tous les habitants du royaume de Stafir, mais il se trouve encore jeune. La vie lui réserve encore plein de surprise et il n'a pas encore avoué son amour à la fille qui fait battre son cœur. C'est l'authentique raison de pourquoi il a accepté : il veut qu'elle aille une longue vie remplie en avant d'elle sans craindre quoi que ce soit. Bien sûr, l'argent qui sera remis à sa famille l'a aidé à se décider aussi. L'argent mène le monde, dit-on.