1: Permission

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18H47, Rocamadour, Aéroport de Brive-Vallée de la Dordogne.

Ce qui est sûr c'est que je ne regrette pas le climat étouffant du Mali, lors de notre dernière mission nous avons été envoyé mes camarades et moi en première ligne des combats, c'était l'enfer, maintenant je comprends la phrase de Nitzsch que mon professeur de philosophie n'avait de cesse de nous répéter en terminale : "l'enfer c'est les autres". La population du Mali m'a marqué surtout les enfants en réalité, ils n'avaient plus rien, leurs maisons avaient été détruite à cause des bombardements des djihadistes, la plupart étaient orphelins mais lorsqu'ils se retrouvaient entre eux, pour se partager un morceau de pain, de la soupe apportés par des aides humanitaires, j'ai pû voir leurs sourires, la solidarité entre eux, le réconfort qu'ils s'apportent les uns aux autres, une lueur d'espoir au sein du cahot, c'était magnifique. Les enfants sont ce qu'il y a de plus pur dans ce monde infesté de cruauté. Mon ami et frère d'arme Warren me bouscule du coude en me disant:

- Ça fait du bien de rentrer pas vrai ?

Oui en effet, rentrer chez soi, dans son pays c'est comme retrouver sa respiration après être resté en apnée un certain temps. Bien sûr j'adore mon métier, m'être engager dans l'armée française à était la plus belle décision que j'ai pû prendre dans ma vie, je me rappelle encore de la devise que l'on a réciter tant de fois lors de notre formation " Soldat français, je m'engage à servir mon pays. En toutes circonstances, je me conduis avec honneur, courage et dignité. Toujours disponible et discipliné, je suis exemplaire dans mon comportement comme dans ma tenue. Respectueux des lois et des règlements, je m'exprime avec la réserve qu'exige mon état militaire." Nous ne passons pas inaperçue à l'aéroport, cinq gars plutôt costaud, avec des paquetages et le crâne rasé, c'est comme s'il y avait inscrit "militaire" en lettre majuscule sur notre front. Mon unité et moi nous dirigeons à l'extérieur, plusieurs voitures sont garées en file indienne, je reconnais alors plusieurs des visages qui attendent proche des voitures, ce sont la famille de mes camarades et pour certains leurs femmes. Je vois alors le sourire de ma mère, depuis le décès de mon père qui a succombé à ses blessures lors d'une mission il y a de cela dix ans, je ne vois que très rarement ce sourire sincère sur son doux visage vieilli par les épreuves de la vie. Une fois arrivé à sa hauteur je la serre dans mes bras afin de sentir son parfum réconfortant, il n'y a pas de doute je suis bien rentré chez moi. Lorsque nous arrivons à la maison, je constate qu'en huit mois rien n'a changé et c'est assez rassurant je dois dire, de retourner au sein d'un environnement stable. Je monte déposer rapidement mon paquetage dans ma chambre et file sous la douche. En descendant les marches de l'escalier menant à la cuisine, je sens alors l'odeure du fameux gratins de pommes de terre de ma mère, elle me fait ce plat à chaque retour de mission et du haut de mes vingt-cinq ans je ne m'en lasse toujours pas et pourtant cela fait depuis mes dix-huit ans que je me suis engagé dans l'armée.  La télévision crachait les dernières informations à ne pas louper mais ce n'est en réalité qu'un bruit de fond, à chaque retour il me faut plusieurs heures pour me dire que je suis bien rentré sain et sauf, heureusement pour notre peloton il n'y eu aucun mort durant ces huits-mois à affronter nos ennemies sans relâche cependant plusieurs blessés sont à déplorer. Ma mère n'est pas non plus très attentive à ce qui se dit à la télévision, elle ne cesse de me regarder de peur que je ne disparaisse si elle clignait ne serait-ce qu'un œil.

- La semaine prochaine il y a la fête du village, tu sais pour les agriculteurs je me demandais si tu voudrais qu'on y fasse un tour ou si tu avais déjà prévu quelque chose, me demanda ma mère.

J'avais complètement oublié cette fête, comment s'appelle t-elle déjà ? la fête de la moisson, les agriculteurs nous proposent un large choix de stands nous faisant découvrir leurs manières de travailler, leurs produits, les dons sont souvent les bienvenues, le maire du village fait son petit coup de com et la soirée se termine sur un bal, le bal de la moisson. Lorsque j'étais petit mes parents m'emmenaient tous les ans à cette fête, j'aimais les regarder danser au clair de lune, je sais qu'elle tient à cette soirée.

Chère Rose Où les histoires vivent. Découvrez maintenant