Prologue

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Par une nuit orageuse dans le bord de mer de la Nouvelle-Espagne de  l'année 1811, une jeune femme avait mit au monde une ravissante petite  fille, en parfaite santé et de constitution solide. Le père, était  rentré très tard de la forge familiale et il était envahi d'un sentiment  de culpabilité d'avoir laissé sa femme accoucher toute seule. Mais  celle-ci lui répondit qu'il ne pouvait pas savoir que cela allait se  produire si rapidement.

-Mira que hermosa es, soupira la jeune femme en tenant son bébé dans ses bras.

Le  père, el padre, ne pouvait s'empêcher de sourire à la vision du  nourrisson et la pris immédiatement dans ses bras. Malheureusement, ce  bonheur fut de courte durée car la mère ferma les yeux, elle s'endormit  pour ne plus pouvoir se réveiller. Le père, au lien d'être envahi d'un  profond sentiment de haine envers le bébé qui avait tué sa femme, se dit que lui et sa femme connaissaient les risques qu'allait  endurer l'accouchement et que la seule chose à faire, était d'élever sa  fille afin qu'elle devienne une femme forte mais empathique à la fois.  Il posa sa main sur celle de sa défunte bien-aimé en prononçant ces mots  :

-Su nombre es Anahi, Isabel Teresa, nuestra hermosa hija. (Son nom est Anahi, Isabel Teresa, notre belle fille.)

Une larme coula sur sa joue pour passer sur son menton et atterrir sur le front d'Anahi qui venait de naitre.

Les  années passèrent, la petite grandissait hélas sans sa mère mais son  père lui donnait tout l'amour du monde. Il l'élevait du mieux qu'il  pouvait, à sa façon. Il lui apprenait à forger, à combattre à l'épée, à  tirer à l'arc et à se défendre tout en gardant sa grâce et son élégance.  Ayant atteint l'âge de huit ans, Anahi avait déjà choisi son arme de  prédilection mais la maniait avec quelques lacunes. Elle avait hérité de la chevelure et des yeux de sa mère, une franco-espagnole qui avait fuit un mariage arrangé avec vieux Lord Espagnol pour s'installer au Mexique où elle avait trouvé refuge chez les forgerons mais ça, c'est une autre histoire. Anahi était gentille mais téméraire, empathique et courageuse ce qui pouvait parfois lui attirer des ennuis à son jeune âge. Un jour, son père la convia dans la salle d'exposition de la forge et sortit d'une grande étagère en bois la plus belle rapière du monde ( aux yeux d'Anahi évidemment).

-Es un metal único, la espada más fuerte del mundo. Y me gustaría dártelo, dit le père en montrant l'épée sous les yeux remplis d'étoiles de sa fille. (C'est un métal unique, l'épée la plus puissante au monde. Et je voudrais te la donner)

Il la remit dans l'étui et la tendit à Anahi. Évidemment celle-ci avait du mal à la tenir tellement elle était grande.

-Feliz cumpleaños Anahi pero tengo un otro regalo para ti (Joyeux anniversaire Anahi mais j'ai un autre cadeau pour toi)

-¿Qué es entonces?(Qu'est-ce que c'est alors ?)

Le trentenaire sortit un parchemin soigneusement roulé de la poche de son tablier pour ensuite le dérouler afin d'en lire le contenue.

- "Αγαπητέ μου φίλε, σου στέλνω αυτήν την αποστολή για να μοιραστώ μαζί σου κάποια ευχάριστα νέα. Η κόρη μου Haydée μόλις έφτασε τα δύο και σε παρακαλώ, φίλε μου, να αφήσεις το μικρό σου παιδί να γίνει η νονά μου. Ξέρω ότι είναι νέα, αλλά δεν βλέπω άλλους ανθρώπους. Σας στέλνω τους πιο εκλεκτούς χαιρετισμούς μου.

Αλή Πασάς των Τζανίνων"

("Mon cher ami, je t'envoie ce message pour te partager une heureuse nouvelle. Ma fille Haydée vient d'avoir deux ans et s'il te plaît, mon ami, laisse ton petit enfant être ma marraine. Je sais qu'elle est jeune, mais je ne vois pas d'autres personnes. Je vous envoie mes meilleures salutations.

Ali Pacha de Janina")

Anahi fronça les sourcils, elle avait compris la moitié de cette lettre écrite en grecque par l'ami de son père, elle ne parlait que deux langues couramment et avait commencé à apprendre le grecque. Allez savoir, son père était très exigent.

-¡Solo entendí la mitad, papá! Bougonna-t-elle (Je n'en ai compris que la moitié, papa !)

-Obviamente no es lo principal, rechigna le forgeron, Nuestro amigo Pacha de Janina te pide que seas madrina de su hija Haydée, ¿te acuerdas de ella?(Ce n'est évidemment pas l'essentiel,Notre ami Pacha de Janina te demande d'être la marraine de sa fille Haydée, tu te souviens d'elle ?

-Sí ! ¡Me sentiría honrado! ¡Le responderé yo mismo! ¡E incluso meteré una joya en el sobre como regalo! (Oui ! J'en serais honoré ! Je lui répondrai moi-même ! Et je mettrai même un bijou dans l'enveloppe en cadeau !)

-Es una buena idea, ve a buscar lo que necesitas (C'est une bonne idée, va chercher ce dont tu as besoin)

La petite fille s'était empressée d'aller chercher de quoi écrire et un collier fabriqué par une amie de la famille qui était souffleuse de verre. L'armature qui enveloppait la fleur en verre était en métal et était faite par les forgerons. Anahi saisit le stylo à plume maladroitement et commença à écrire la lettre à Haydée et au Pacha de Janina en disant qu'elle avait le même collier et que ce serait le signe de reconnaissance. Pourquoi elle en avait en double ? Tout simplement parce qu'Alejandro; car tel était son nom; avait la crainte que sa fille ne casse le sien. Anahi s'empressa de se rendre au service des Messageries Maritimes du pays pour faire porter cette lettre au Pacha de Janina. Quelques semaines plus tard, la famille Cadéron reçu une lettre du Pacha de Janina qui remerciait du cadeau. Ce fut leurs derniers instants de bonheur.

Un homme vêtu de rouge et les cheveux tirés en arrière se présenta à la forge, un français de grande taille et qui paraissait très sûr de lui. Il disait qu'il voulait le secret de la fabrication des armes Cadéron afin d'en produire en France pour l'armée française et ainsi, assurer la grandeur du roi de France. Alejandro, a refusé et la conversation s'est embrasée au point où Anahi a entendu des choses qu'elle ne devait entendre et a du se cacher dans son placard avec sa rapière pour échapper à cet inconnu. La porte entrouverte, elle vit le cadavre de son père tomber devant elle, une balle en plein cœur. Son père jeta un regard vers la fente du placard et prononça ces mots :

-Véngame, mi valiente hija. (Venge-moi, ma courageuse fille.)

Et il rendit l'âme. Sa bouche entrouverte et les yeux rivés vers le ciel. Anahi ne prononça aucun mot, pas un cri, rien. Elle était silencieuse et attendait le bon moment pour attaquer le méchant monsieur qui avait volé la vie de son papa. Elle n'avait que six ans et portait déjà des sentiments d'adultes. Elle n'eut le temps de réfléchir que le français ouvrit grand la porte du placard et voulu tirer sur la petite mais celle-ci, trop téméraire fonça sur lui en tenant maladroitement sa rapière trop lourde pour elle. Elle réussi à le blesser à la main et à prendre la fuite pour se réfugier dans une maison abandonnée à seulement quelques mètres. Essoufflée, désemparée, triste, en colère, beaucoup trop de sensations se mélangeait dans le corps de cette fillette de six ans. Elle n'avait pas le nom de cet homme mais elle avait retenu son visage et ses dernières paroles ( du moins ce qu'elle avait entendue) :

-Sale vermine ! Sale brute !Sale Espagnole !

S'en suivit de multiples péripéties pour Anahi, se forgeant une réputation digne des plus grands épéistes du monde. Cette fille est devenue la meilleure épéiste de la Nouvelle-Espagne à peine adolescente, cette fille habitait toujours en elle un profond désir de vengeance, cette fille pouvait parler une dizaine de langues pour pouvoir s'infiltrer n'importe où, cette fille était déterminée, cette fille, c'est moi, c'est Anahi. Pardonnez ce récit si bref mais ma tête a préféré effacer quelques souvenirs de ma mémoire afin de m'épargner les moments les plus traumatisants.

Le serment de l'épéisteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant