La lumière est pale dans la chambre, j'entrouvre les yeux pour apercevoir à ma droite ma "colocataire". Clémence ne parle jamais. Elle se contente de te fixer dans les yeux comme si elle essayait d'y déceler une part de vérité en toi. Elle sait parler, mais elle n'a rien à dire. Ça fait bientôt 3 ans qu'elle est internée ici, elle enchaîne tentatives sur tentatives, pendue aux rideaux de douches, une fourchette dans le poignet ou encore une boîte entière de Valium dans le sang. Je crois que ça fait longtemps qu'elle est morte au fond, mais je suis pas sure que le personnel de l'hôpital soit d'accord avec ça. C'est dur à admettre.
Je tenterai jamais le suicide, j'ai pas envie de mourir.C'est complètement fou de vouloir mourir en réalité, la vie c'est pas facile mais c'est vraiment un truc de faible de vouloir partir.
Toi tu voulais pas vraiment partir je crois.
Tu t'abîmais les poignets pour attirer l'attention, mais j'aurais jamais eu le culot de te le dire en face. Tu me traitais d'hypocrite mais tu me m'as jamais remercié de t'avoir toujours dis ce que tu voulais entendre. Les médecins disent que tu es vivante, que je n'ai jamais tué personne.
Mais c'était bien réel j'en suis sûre. Ça paraissait tellement réel.
Il fait froid mais je transpire comme si j'étais de retour à cette nuit où je suis allée chez toi, foutue Clim en août c'est vraiment irresponsable de se ficher à ce point du climat quand on travaille pour le bien être des gens (soit disant).
Je ne sens pas battre mon cœur, mais la perfusion qui longe mon bras m'indique que je suis sûrement sous morphine. Je ne le sentais déjà plus battre avant d'arriver ici, je n'ai pas besoin d'anti douleurs d'ailleurs je ne suis pas blessée. Les pensées commencent à fuser dans ma tête et j'ai l'impression que je vais étouffer, je suis noyée dans ma peau et je me sens à l'étroit, comme si mon corps me retenait prisonnière. J'ai envie de hurler, de me lever, de prendre l'air. Mais je suis attachée.
Comme toujours.
Comme si l'humanité elle même n'était pas qu'une multitude d'inhibitions qui m'empêchait d'être libre, il faut en plus que je soit attachée.Rdv chez la psychologue, 8h30
J'entre dans un bureau ancien, sombre et boisé qui détonne avec le reste du bâtiment, dont l'architecture des années 70 donne une ambiance particulièrement effrayante.
Ma psychologue, madame Buisson, me lance déjà un regard réprobateur qui m'agresse comme pour me dire, « te revoilà ? ».
Elle m'accueille et m'invite à m'allonger sur ce vieux divan bleu roi, inconfortable, qui je le sais m'accompagnera 3 fois par semaine pendant des mois si je ne trouve pas un moyen de partir d'ici.« Welcome back, j'avais l'espoir de ne plus te revoir Nora c'est assez décevant, prononce-t-elle, mi-amusée, mi-déconfite.
-J'avais l'espoir de ne plus revenir, je prononce, mi-accablée, mi-complètement-vide-d'émotions.
Je ne sais pas ce que je fais là si ça peut vous rassurer, ils doivent être vraiment fan de moi pour me re-interner sans raison.
-Sans raisons ? Sure ?
-Bah oui puisque apparement j'ai tué personne.
-Nora.
-Je vous jure que je suis allée chez elle, je l'ai égorgé j'en suis sûre.
-Non elle est bien vivante, mais ne me fais pas croire que tu t'es poignardé par accident, par pitié.
-Moi? Me poignarder ? Mais vous déraillez complètement je ne suis pas suicidaire.
-Nora je te crois, tu sais. Je vois bien que tu es persuadée d'aller bien, mais il faut te rendre à l'évidence, c'est ta deuxième tentative, ton troisième internement et tu es persuadée d'avoir tuer quelqu'un. »Je tombe
Qu'est ce qu'elle raconte ?
Tout se mélange tout crie tout hurle en moi.
Pas une larme ne coule, plus de larmes dans le corps.Et ça recommence, je me vois assise sur le divan comme si je me regardais à travers une autre, d'autres yeux.
J'ai ce sentiment d'être habitée par quelqu'un d'autre que moi qui me tiraille.Qu'est ce que je suis sensée faire quand je ne suis même plus maître de mes propres actions ?
J'ai peur que tu sois en vie et j'ai peur de vouloir mourir.
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J'irai danser sur vos tombes
Teen FictionJe t'ai tué ce sera peut-être différent cette fois-ci. Nora ne craint personne, enfermée dans un monde dont elle est la protagoniste, elle entends ses pensées raisonner comme si elle était seule au monde. Perdue entre les événements fictifs et réels...