XXIV

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APRIL

L'heure filait telle une flèche, je ne voulais pas rentrer. Je me sentais bien mais le malheur nous rattrape toujours. Je me levais tout doucement, Dume semblait fatigué.
"Je pense qu'il vaut mieux y aller.
-C'est vrai qu'il se fait tard. Je te raccompagne.
-Non c'est pas la peine je vais ren-
-C'était pas une question, Smith.
-T'es sûr ? Ça te va parcourir plus de chemin que prévu et je voudrais pas te déranger.
-T'en fais pas. En route."
Nous quittâmes le parc, les rues de Washington étaient désertes. Il était tard, la lune complète se dressait sous nos yeux. J'ai toujours été fasciné par l'astronomie, c'est inexplicable mais tellement beau.
Dume n'était pas très bavard. Il semblait distrait, à dire vrai.
"Tu sembles distrait. À quoi penses-tu ?
Il me regarda, un rictus se forma sur ses lèvres.
-Je pense à tellement de choses, Smith.
Il tenta de me faire un regard...séducteur ? Le genre de regard qui donne envie de fuir si tu n'aimes pas la personne. Je virai au rouge écarlate, pourquoi ?
-Arrête ça, ça te va tellement pas.
Nous rîmes tous les deux. C'était vrai, se regard le rendait complètement idiot. Il donnerait un n'importe qui cette envie de fuir ou de se taper une barre. Tout dépend de la personne.
-Sérieusement, lâchais-je en lui donnant une tape à l'épaule.
Il soupira, reprenant son air sérieux.
-Je me suis toujours demandé, que se serait-il passé si ton père n'avait pas...
Il baissa la tête avant de finir sa phrase. Je savais ce qu'il voulait dire et il savait que j'avais compris. Ce n'est pas le genre de chose à dire facilement. Je le regardais attentivement, il avait cette lueur de tristesse dans son regard.
-Je veux dire, ça aurait peut être été différent entre nous, on aurait jamais eu à se détester. Je n'aurais jamais eu à te blesser.
Ses paroles me firent l'effet d'un couteau dans le ventre. Je repensais chaque nuit à la façon dont ça aurait pu être meilleur, même si quelque part je sais que l'enfer chez moi aurait continué.
-Ça aurait pu être différent d'un côté, mais d'un autre rien n'aurait changé.
-Qu'est-ce que tu veux dire ?
-L'enfer Dume, voilà ce que je veux dire."
La fatigue avait parlé à ma place et je savais que je le regretterai. Je ne comprenais pas ce qu'il m'arrivait mais chaque jour je mourrais d'envie de tout lui dévoiler pour qu'il me vienne en aide. Mais peut être me laisserait-il tomber voyant à quel point je suis devenue complexe.

Dume se tenait devant moi, attendant que je rentre pour repartir. Sans réfléchir, je l'enlaçais. Je le remerciais intérieurement d'avoir été là aujourd'hui. Je m'avançais vers la porte d'entrée et poussais la poignée. Rien. Je réessayais. Toujours rien. Je regardais Dume qui fronça les sourcils, ne comprenant pas.
"Elle était ouverte tout à l'heure ?
-Oui et...et ils dormaient tous...
-Tous ? T'es sure et certaine qu'aucun ne se serait levé pour fermer la porte April ?
-L'œuvre de Jack...chuchotais-je."
Cet enfoiré m'avait probablement entendu descendre. Je regardais Dume tout en cherchant une solution.
"T'as une fenêtre dans ta chambre April ?
-Oui.
Je lui pointais la fenêtre du doigt et compris aussitôt son idée.
-Dume elle est trop haute, j'ai pas d'échelle.
-Et moi j'ai des épaules.
Ma tête se pencha vers mon épaule. Je crois que je n'avais pas correctement compris son idée. Il était taré ce gosse.
-Jamais je monterai sur tes épaules Dume.
-C'est soit ça soit tu rentres pas.
-Mais t'as complètement perdu la tête !
-Ça va c'est bon mes épaules sont solides t'en fais pas, tu vas pas tomber.
-C'est pas ça je veux dire, je suis trop lourd et..et je vais tâcher tes affaires avec mes chaussures pleines de terre.
-C'est pas grave, aller monte.
Cinq petites secondes passèrent tandis que je réfléchissais.
-T'attends le déluge ou quoi ?
Je le fusillais du regard. Une chose est sûre, Dume Millers est toujours aussi impatient.
-Je pense sincèrement que ton impatience ne changera jamais, lâchais-je tandis que je grimpais sur ses épaules.
Il attrapa mes chevilles de sorte à ce que je ne glisse pas.
-T'as le rebord de la fenêtre ? S'empressa-t-il de demander.
-Oui c'est bon.
Il me poussa d'un coup et j'atterrissais dans ma chambre. Je me relevais et me penchais pour le voir.
-T'as rien ?
-Ce serait à moi de te le demander, rétorquais-je. Je n'ai rien, merci. Désolée pour la terre.
-C'est rien. Bonne nuit, Smith."
Je le regardais partir avant de fermer ma fenêtre. Je retirai mon sweat-shirt avant de me glisser dans mon lit. Nous voilà de retour en enfer.
Je détestais cette maison et tout ce qu'elle inspirait. Je savais qu'il y aurait des conséquences à mes actions. Je voulais m'enfuir, loin d'ici.
Je sombrais petit peu par petit peu dans le sommeil lorsque le grincement d'une porte se fit entendre. J'aperçus une silhouette dans l'embrasure de la porte, un instrument à la main, je ne saurais le décrire. Je devinais sans surprise qu'il s'agissait de Jack. Bien évidemment.
Il verrouilla la porte avant de s'approcher à pas lents, jusqu'à arriver au bord de mon lit. Il se pencha vers moi et chuchota dans mon oreille :
"Je sais que tu ne dors pas. Pauvre petite conne, tu es tombée dans mon piège.
Conne
Conne
Conne.
-Et tu sais que les actions ont des conséquences...
Sa voix était remplie de joie, de désirs. Il savait ce qu'il allait faire. Il attendait simplement le bon moment comme justification.
-Je t'en supplie...
Je me sentais dorénavant faible face à lui.
-Supplie, c'est bien. J'ai prévu deux choses pour toi.
Il brandit le rouleau à pâtisserie avec fierté. Je détestais cet outil, il faisait atrocement mal.
-Sur le dos, tout de suite."
Je m'exécutais et me mis à quatre pattes sur le dos. Il m'asséna un premier coup, puis un deuxième. Il me frappa ensuite les bras sans oublier l'estomac. Je me sentais partir, des douleurs naissaient partout dans mon corps. Il n'avait pas terminer et continua avec une série de coups tous plus forts les uns que les autres. Il me regardait souffrir, le sourire aux lèvres. Je ne parvenais à me lever tant j'avais mal. Il me fixa pendant encore cinq minutes.
"Lève-toi, on en a pas terminé.
-Je...j'ai...ma...mal...
-Lève-toi putain, arrête ton cinéma !"
Je me tenais le ventre et me tordais de douleur.
Il était planté là, devant moi à attendre que je me relève. Mais c'était impossible.

In Four Seasons Où les histoires vivent. Découvrez maintenant