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Les secondes défilent et deviennent des minutes. Je décide alors de lever la tête pour enfin voir sa réaction. Le visage posé dans le creux de sa main, bloquant sa mâchoire, elle regarde dans le vide. Je décide donc d'attendre encore un peu et de la laisser assimiler.

J'ai l'impression d'être à l'école et d'attendre de me faire gronder. C'est assez stressant, et je ne sais pas vraiment comm...

- D'accord.

- Comment ?

- Je ne vais pas te mentir, j'ai d'abord éprouvé de la surprise avec un mélange de déception. Puis, en prenant en compte la situation, je ne peux pas non plus t'en vouloir. Ce qui est fait est fait, et tu étais sous l'emprise de l'alcool. Je ne peux pas te dire grand-chose.

Je souffle de soulagement et déculpabilité.

- Ça m'enlève un poids, mais je veux quand même m'excuser. Que ce soit ta sœur ou n'importe qui d'autre, je n'aurais pas dû. Je sais qu'on n'est pas ensemble, et je ne veux pas précipiter les choses, mais je tiens beaucoup à toi et je ne voudrais pas gâcher ce qu'il se passe entre nous.

- J'apprécie tes excuses, et moi aussi je tiens à ce qu'il y a en ce moment. Je ne vais pas laisser ce petit incident gâcher ça. Mais tout de même, parmi tout le monde... ma sœur ? Elle ne t'a pas fait du rentre-dedans, rassure-moi.

Je ris nerveusement et détourne le regard, gêné.

- Elle n'en manque pas une, alors. Je ne peux pas la blâmer non plus, tu es charmante.

- Ah, c'est mon arrêt. Ici, je prends le compliment, terminus dans mon cœur.

Je la regarde avec un grand sourire, et on se met à rire d'un coup.

- Bon, passons au repas, j'ai une faim de loup. Tout est fait maison, alors je veux ton avis en toute transparence.

- Ok, mode critique culinaire activé. Mon avis sera sûrement biaisé, mais je vais essayer.

- Je ne vois pas pourquoi tu dis ça, me dit-elle en me servant.

- La chef voit très bien de quoi je veux parler, mais je vais être irréprochable.

Je prends une première bouchée sous les yeux de la chef en question, et c'est bon. Comment rater des pâtes bolognaises, me direz-vous, mais quand on sait que certaines personnes n'arrivent pas à cuire des pâtes, je m'attendais à tout.

- C'est pas mal, je mets un 7 sur 10.

- Ok, je prends. Quels seraient les points à améliorer, très cher critique ?

- Déjà, avoir utilisé des penne est un bon point. On a plus de sauce quand on prend une bouchée, mais du coup, la viande étant un peu trop grosse, soit ça bouche la pâte, soit il n'y a que de la sauce.

- C'est précis.

- Tu me demandes mon avis, je te le donne.

On continue notre repas sur cette note des plus joyeuses, évitant soigneusement les sujets qui pourraient raviver la tension. En fin de repas, elle me propose de regarder un film. J'accepte et la laisse choisir pendant que je fais la vaisselle.

- Tu es plus comédie ou action ?

- Comédie, je dirais.

- Animation ou pas ?

- Ça ne me dérange pas.

- Ok.

Je l'entends revenir du salon et sens son menton se poser sur mon épaule.

- Tu aurais pu laisser, je l'aurais fait.

- On m'a appris à faire comme si j'étais une enfant modèle chez les autres, alors je ne te l'aurais pas laissée dans tous les cas.

- Une enfant modèle ?

- Tu sais, le moment où tu ne sais pas si tu dois garder ta bonne image, parce que la première impression est décisive.

- Donc, avec le temps, ça ne va pas durer ?

- Ça dépend de combien j'apprécie la personne.

- C'est ton indicateur d'appréciation ?

- On peut voir ça comme ça.

- J'espère que tu feras toujours la vaisselle, alors.

Elle dépose un petit bisou sur ma joue et me serre légèrement par la taille. Je ne peux m'empêcher de sourire, ces petits gestes suffisent à me rendre heureuse, et je ne peux pas empêcher mon cœur de battre moins vite. Je l'entends ricaner, ce qui me rappelle notre moment sur le banc.

- Pourquoi tu rigoles toujours quand tu es près de moi ?

- J'écoute juste.

- Écouter quoi ?

- Ça, c'est mon petit plaisir à moi.

Elle se détache de moi et part vers le salon.

- Dépêche-toi, je lance le film.

Je termine de nettoyer le plan de travail et la rejoins sur le canapé. La journée a dû être plus fatigante que prévu, car je m'endors après quelques minutes devant le film, blottie contre Karina.

......

Une intense lumière m'éblouit. Je frotte mes yeux pour prendre le temps de m'adapter à la lumière. Une fois fait, je regarde autour de moi, ne reconnaissant pas bien les lieux, puis je me rappelle la soirée d'hier. Je suis encore sur le canapé de Karina. En voulant me lever, je remarque un petit mot sur la table.

"Bonjour, petite marmotte. Je suis partie au travail, prends ton temps. Je reviens te voir au déjeuner si tu es encore là. Envoie-moi un message quand tu te réveilles."

Elle est si mignonne. Je remarque maintenant que j'ai un plaid sur moi, pour me couvrir. Je lui envoie un message pour lui dire que je suis réveillée.

K : À 11h30, juste avant que je me prépare pour te rejoindre.

Tu veux que je fasse quelque chose ?

K : Si tu trouves quelque chose dans les placards, fais-toi plaisir.

Je souris à sa remarque et pars à la recherche de quelque chose à nous mettre sous la dent. À force de chercher, je suis étonnée de voir si peu de choses à manger. Elle m'a pourtant dit prendre soin d'elle, de faire du sport, et la nutrition devrait être un point important aussi, il me semble. Je me débrouille avec ce que j'ai et je commence la préparation. Juste le temps de finir, j'entends Karina arriver chez elle.

- Coucou, ça sent très bon. Je suis passée prendre quelques fruits à côté, au cas où, mais je vois que tu as déjà tout préparé.

- Tu n'es pas la seule à avoir un savoir-faire culinaire.

- Je vois ça. Qu'est-ce que tu nous as préparé ?

- Du riz avec du poulet et du lait de coco. Tu n'as pas grand-chose dans ton placard, mais tu as pas mal de choses inattendues.

- Je dois avouer que pour les fêtes, j'étais le plus souvent invitée, donc je n'ai pas fait les courses depuis un moment. En tout cas, j'ai hâte de goûter tout ça.

On déjeune dans un calme apaisant, agrémenté de petites conversations qui peuvent sembler futiles, mais qui nous permettent de nous connaître un peu mieux à chaque fois. Après ce fabuleux repas, nous quittons son appartement ensemble, en se disant un petit au revoir, sachant très bien qu'on se reverra demain au travail. C'est avec un petit bisou sur la joue que je rentre chez moi, un sourire plaqué sur le visage. 

𝑬𝒍𝒍𝒆 °ʷᶤᶰʳᶤᶰᵃ°Où les histoires vivent. Découvrez maintenant