1.Réveil

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Aujourd'hui.

Pour la centième fois il me semble, mes yeux finissent par s'ouvrir bien que j'aie passé toute la soirée précédente à prier pour enfin pouvoir le rejoindre.

Huit mois.

Huit mois qu'il est parti, me laissant seule avec mes démons, et sans lui, le monde semble avoir perdu toute ses couleurs. Je sais que c'est ce que dirait n'importe quelle adolescente dont le petit-ami vient de se jeter d'un pont, mais je peux vous assurer que c'est affreux, et cette fois, c'est différent.

Lui, il était tout, il rendait tout mieux, même moi. Il était drôle, il guérissait tous les maux possibles.

Il aimait me regarder m'habiller, me préparer, il aimait m'embêter, beaucoup.

Nos mères, meilleures amies depuis l'enfance avaient été les plus heureuses du monde lorsque Cole et moi leur avions appris, ensemble, que nous ne nous portions pas l'amour qu'elles pensaient que nous nous portions.

Il m'avait guéri. Avec lui, j'avais enfin réussi à mettre fin à ce cycle dans lequel je ne cessais de m'enrôler, et avec lui, j'avais été jeter cette lame une bonne fois pour toutes.

Et après ça, quand on faisait l'amour, il embrassait une par une chacune des cicatrices imprimées sur ma peau.

Il me disait tout le temps qu'il m'aimait, et pourtant, du jour au lendemain, il avait disparu, laissant derrière lui une liasse de lettre qui ne contenaient en rien les explications dont nous avions tous besoin.

Cette lettre qu'il m'a laissée, je la relis sans cesse, car c'est tout ce qu'il me reste de celui qui a su m'aimer comme personne avant.

Lila,

Mon amour, ne m'en veux pas. Je sais que je pars sans te donner la moindre explication, mais voilà ce que j'avais préparé pour toi.

Mon ange, toute ma vie je me serais souvenu du jour où tes lèvres avaient touché les miennes pour la première fois, et soudainement, mon monde et ma vie étaient éclairé différemment. Car tu étais celle qui les éclairait.

Je n'ai jamais su si tu ressentais les choses de la façon dont je les ressentais moi, et quelques fois, j'aurais voulu m'immiscer dans ta tête parce que, mon ange, comme tu es mystérieuse et difficile à comprendre.

Pourtant, j'y étais arrivé. Et toi, tu étais tout, tu m'aimais, alors je m'aimais et je t'aimais encore davantage.

Ta façon de penser, de t'exprimer, de dire tout ce qu'il te passait par la tête, offrant à tous la plus nue de toutes les vérités possibles. La manière que tu avais de te réfugier dans les livres à chaque fois que les choses te surpassaient, et les écouteurs que tu t'obstinais à garder dans les oreilles.

Un jour, bien avant que tu ne tombe amoureuse de moi comme je l'avais fait plus tôt, tu m'avais confié que si tu portais en permanence tes écouteurs, c'était parce que tu ne voulais pas entendre les bruits que ton cœur faisait en se brisant.

Mon amour, je ne te l'ai jamais dit, mais dès ce jour, je me suis donnée pour mission de réparer ton cœur, de réparer ton âme, et de chérir ton corps car tu l'avais tant fait souffrir.

Ce monde, il n'était fait pour aucun de nous deux.

Je sais que tu adores les étoiles, s'il te plaît mon amour, lorsque tu te rendras compte que je suis bel et bien parti, continue de les regarder car je serais parmi elles, à veiller sur toi.

Avec tout mon amour, mon ange, je t'aimais et je t'aimerai parmi les étoiles,

Cole.

Pour la énième fois depuis son décès, je relis ces mots comme un religieux le ferait de ses prières.

Je sens une larme rouler sur ma joue alors que la froideur de l'étau de son absence se resserre autour de moi, étouffant toute autre sensation alors que mon cœur se brise encore et encore et encore et encore et encore....

Je me replie sur moi même, me roule en boule alors que les familiers signes avant coureurs de la crise d'angoisse commencent à faire leur apparition.

Mon corps se fige, et même si je fais de nombreuses tentatives pour respirer, mes poumons se refusent à laisser l'air y entrer, me faisant suffoquer dans une lente agonie, alors que mes larmes continuent de dévaler la pente infinie de mes joues, silencieuses, et que mon esprit, lui, me hurle de partir le rejoindre, que mon âme, elle, ne veut que retrouver celui qui l'a guérie.

Tout mon être le réclame, pourtant, il manque à mon corps la chaleur de ses mains et la douceur de ses baisers, la promesse d'un jour puis d'une vie meilleurs.

Puis petit à petit, alors que mon corps se fait plus lourd et que ma tête se met à tourner, je sens que mes poumons se desserrent pour enfin laisser entrer l'air que je me tue à essayer de faire rentrer depuis de longues secondes, et ma respiration reprend un rythme normal, comme si la Mort me narguait et se plaisait à me faire espérer que j'allais enfin pouvoir le rejoindre.

Mais non. Et c'était pareil à chaque fois.

Un filet de lumière atteint mon visage et me brûle la rétine, me faisant grimacer.

Une ombre se dessine dans l'encadrement de la porte, et je crois reconnaître là la silhouette de ma mère.

Elle se rapproche de moi et me caresse les cheveux d'une main légère, comme tous les matins depuis huit mois.

Huit mois qu'elle vient chaque matin vérifier que je survis à la perte de mon bien aimé.

Huit mois que régulièrement, sa mère à lui me rejoint pour m'accompagner dans mes pleurs sans fin, et que parfois, ses bras viennent entourer mon corps comme le faisaient autrefois ceux de son fils.

Huit mois que je ne vais plus en cours, que je ne suis plus capable de voir qui que ce soit, parce que la seule personne que je voudrais voir maintenant c'est lui.

Huit longs mois que mes larmes ne se tarissent, brûlant à longueur de temps mes yeux fatigués par des nuits peuplées de cauchemars dans lesquels Cole se suicide sous mes yeux sans que je ne puisse y faire quoi que ce soit, tout en me hurlant que ce n'est pas de ma faute.

Huit mois que je n'ai plus aucun contact avec le monde, tout simplement parce que je n'en suis pas capable, et que le monde sans lui à mes côtés ne me fait pas envie et me paraît terne, dénué de toute vie.

Huit mois que je n'ai pas quitté ce lit ni changé les draps sur lesquels il m'avait fait l'amour avant de partir pour toujours.

Que ma vie est un enfer et que tout ce qu'il me reste de lui sont les souvenirs que nous avions créés ensembles..

Cole était làOù les histoires vivent. Découvrez maintenant