Chapitre 7

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L'apparition de ce véhicule fit remonter en moi une vague de souvenirs, certains plus sombres que d'autres. Lucian, avec sa silhouette imposante et son aura de mystère et de danger, était une ombre constante dans ma vie. Toujours présente, même lorsqu'il était absent. Contrairement à mes parents, les visites de mon frère n'étaient jamais anodines. Ses retours étaient rares, méticuleusement planifiés, et porteurs de lourdes conséquences.

Un soupir m'échappa tandis qu'une tension sourde commençait déjà à me serrer la poitrine. Je n'avais aucune idée de ce qui l'avait poussé à revenir cette fois-ci, mais je savais une chose : Lucian n'apparaissait jamais sans raison. Ses visites n'étaient jamais le fruit d'un simple désir de retrouvailles familiales. Il revenait toujours pour une raison précise, une raison qui, invariablement, jetait une ombre sur ce manoir déjà trop souvent plongé dans les ténèbres.

Me préparant mentalement, je montai les marches du perron, chaque pas résonnant dans le silence glacé qui m'entourait. Le vent s'était levé, glissant autour de moi comme un présage funeste, ou peut-être était-ce simplement l'effet de cette voiture sombre qui donnait à l'air une froideur supplémentaire.

Je me retrouvai bientôt devant la porte massive, un obstacle symbolique autant que physique. Derrière cette porte se trouvait Lucian, et avec lui, tout ce qu'il apportait : secrets, intrigues, et menaces voilées. Prenant une inspiration, je posai la main sur la poignée, m'efforçant d'ignorer les battements précipités de mon cœur.

Alors que je franchissais le seuil, le crissement des graviers sous mes pieds fut remplacé par le son feutré de mes pas sur le marbre blanc du hall d'entrée. D'habitude, ce manoir était figé dans une tranquillité presque oppressante, mais ce soir, il semblait animé d'une présence invisible, comme si les murs eux-mêmes retenaient leur souffle dans l'attente. Mes pensées se bousculaient dans mon esprit. Qu'est-ce qui avait ramené mon frère ici, lui qui s'éloignait de cette maison aussi souvent qu'il y revenait ?

Le manoir, avec ses longs couloirs sombres et ses vastes pièces silencieuses, m'avait toujours évoqué un piège. Ce soir, cette impression était plus forte que jamais. Je montai rapidement l'escalier en marbre, espérant atteindre ma chambre sans croiser Lucian. C'était une stratégie futile, je le savais. Éviter mon frère n'était qu'un moyen de retarder l'inévitable. Mais je n'étais pas prête à le revoir. Pas maintenant. Pas sans avoir pris le temps de remettre mes idées en ordre.

Mes pas étaient calculés, mes mouvements furtifs, alors que je progressais dans les couloirs plongés dans la pénombre. Chaque pas me rapprochait de ma chambre, de cette illusion de sécurité que j'espérais atteindre avant que Lucian ne me retrouve. Mais mes espoirs s'effondrèrent en un instant lorsque le grincement d'une porte sur ma gauche brisa le silence.

Je m'arrêtai net, le cœur battant à tout rompre, alors que mon frère apparaissait dans l'encadrement de la porte, sa silhouette imposante se découpant dans la lumière tamisée de la pièce. Son regard se posa immédiatement sur moi, aussi perçant et intransigeant qu'une lame.

J'aurais dû m'y attendre. La chance ne m'avait jamais souri. Dès qu'il s'agissait d'éviter une confrontation, elle me fuyait comme la peste.

Lorsque Lucian tourna son regard vers moi, nos yeux se verrouillèrent instantanément. Il avait changé depuis son dernier départ. Ses cheveux noirs, plus longs désormais, tombaient en mèches indisciplinées sur son front, et j'aurais juré qu'il avait encore pris quelques centimètres. Mais malgré ces changements minimes, je savais que l'être impitoyable dissimulé sous cette apparence restait inchangé. Il était toujours le même, cette figure sombre et impénétrable, l'incarnation de la cruauté et de la manipulation.

En une fraction de seconde, j'enfilai mon masque d'innocence. Je contraignis mes lèvres à se courber en un sourire large et éclatant, transformant toute la haine et le dégoût qu'il m'inspirait en une expression de bonheur simple et enfantin. Je redevenais Ashley Allister, la petite sœur candide et naïve qu'il avait toujours connue.

AchilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant