Chapitre 1

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Je m'étais vraiment bien fait avoir !

Je n'en revenais toujours pas d'avoir accepté d'accompagner Castel pour réceptionner une cargaison dont j'ignorais la nature. Je maudissais ma naïveté.

Il était une heure du matin et au lieu d'être confortablement installée au chaud, sous ma couette, dans mon lit king size, je me retrouvais forcée de sillonner la ville jusqu'à un stupide entrepôt.

Chevauchant ma moto, seule la lueur de la lune et les phares de ma Triumph Rocket III m'éclairaient dans la nuit noire. Je zigzaguais entre les automobilistes qui encombraient la route, ne dépassant la limitation de vitesse que seulement d'une quarantaine de kilomètres heure, ce qui était relativement raisonnable pour moi. D'autant plus que je n'avais aucune patience ce soir, ou plutôt ce matin, une réalité qui m'agaçait d'autant plus.

La sonnerie de mon téléphone me tira brutalement de mes pensées. Tentant de déboutonner la poche de ma veste dans laquelle il était enfoui, je pestais intérieurement contre ce moment mal choisi. Mes vaines tentatives soldées par un échec ne firent qu'accentuer mon agacement, de sorte que je lâchai finalement le guidon afin de glisser mes doigts dans le tissu pour en extirper l'appareil.

Lorsque je relevais les yeux vers la circulation, je réalisais que je dérivais dangereusement vers le fossé qui longeait la route. Je donnai un brusque coup de guidon vers la gauche, évitant de justesse la glissière de sécurité. Je repris le contrôle de ma Triumph Rocket III, relâchant légèrement la poignée des gaz sur laquelle mes doigts étaient crispés.

Je ne comptais pas rendre l'âme de si tôt, j'étais jeune et j'avais encore de nombreuses choses à accomplir. Une liste se dressa lentement dans ma tête ; faire des études de médecine à l'université, acheter une luxueuse villa dans l'un de ces quartiers de bourges sur les hauteurs de la ville et le plus important, adopter un chien que j'appellerais Ravioli.

Le bruit incessant qui continuait de s'échapper de mon téléphone me ramena à la réalité. En jetant un coup d'œil à l'écran, je reconnus le nom familier de Castel. Un grognement involontaire s'échappa de mes lèvres. Il avait beau être mon meilleur ami, en cet instant, j'avais une furieuse envie de l'étriper.

- Comment va mon acolyte préféré ? S'exclama-t-il à l'instant même où j'eus décroché.

- J'espère que tu as une bonne raison de m'appeler ! M'exclamais-je, toujours sous tension à cause de l'accident évité de justesse.

- Hum... Je m'ennuyais ? Dit-il d'une voix hésitante, sentant mon exaspération.

- Tu te moques de moi ? J'ai failli finir encastré dans l'asphalte parce que tu t'ennuyais ! M'écriais-je au comble de l'exaspération.

- Ça, ça aurait été divertissant ! Déclara-t-il d'un ton enjoué.

- Tu sais que rien ne m'empêche de faire demi-tour pour retrouver mon lit qui est actuellement d'une compagnie beaucoup plus appréciée que la tienne. Répliquais-je, outrée.

- Tu me blesses

- Et toi, tu gâches toutes mes soirées avec tes plans foireux.

- Mes plans ne sont pas foireux ! Et je sais que tu aimes nos petites virées en duo autant que moi ! S'exclama-t-il offusqué.

Il marquait un point.

Castel et moi nous connaissions depuis toujours ; il était la personne à qui je tenais le plus au monde. Deux enfants perdus au cœur d'un monde de violence, contraints de grandir bien trop vite.

Nous avions tous les deux été élevés au milieu de la violence implacable et de la corruption endémique qui caractérisaient Denver. Au milieu des gangs, des meurtres et des guerres de territoires, notre existence quotidienne était imprégnée par le danger. Une réalité à laquelle on est contraint de s'habituer bien plus rapidement qu'on ne l'aurait imaginé.

AchilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant