Octobre 2020,Au-dessus de la ville, l'orage grondait et la pluie battait contre les fenêtres de mon nouvel appartement. Je venais à peine de poser les derniers cartons, le lieu me semblait froid et étranger. Ce n'était pas chez moi, pas encore. Les murs résonnaient, dénudés de décoration, du vide de ma solitude. C'était d'un calme trop profond, d'un silence pesant, comme si les secondes avaient cessé de s'écouler.
Je déballais mes affaires sans hâte, laissant mes doigts glisser sur des objets qui, autrefois, avaient eu un sens. Chaque carton ouvert exhumait des fragments de ma vie passée, des morceaux de souvenirs auxquels je m'accrochais sans vraiment les comprendre.
Tic, tac, tic, tac...
C'est alors que mes doigts frôlèrent un petit objet en bois, sculpté à la main. Mon cœur s'était mis à battre. Il m'avait offert cet objet à l'université. Il l'avait déniché dans une boutique d'antiquités, me disant que sa cadence régulière lui rappelait la manière dont nos cœurs battaient en harmonie quand il me regardait jouer du piano. C'était un objet délicat, gravé de fines arabesques représentant des vagues, symbole de liberté et que rien n'est figé, avait-il dit. J'avais gardé cet objet pendant tout ce temps, même après son départ, sans pouvoir m'en détacher.
Le métronome, témoin silencieux de notre histoire, se balançait doucement sous mes doigts.
Tic, tac, tic, tac...
À chaque tic, un doux souvenir revenait. À chaque tac, une douleur familière s'installait. Je le reposais avec soin sur son nouvel emplacement, l'étagère de mon couloir.
Une vieille photo glissa d'un carton, tordue, écornée. Je la regardai sans la voir, le cœur serré. Elle me manque. Une absence si vaste qu'elle m'avait engloutie. Mais je refusais d'y penser. Pas maintenant. Je n'étais pas encore prête à affronter ce vide, à nommer ce que j'avais perdu. Alors, je refermai le carton, mes mains tremblantes malgré moi, et me laissai envahir par le murmure de la pluie contre les vitres.
C'était trop étouffant, je devais sortir. En ouvrant la porte de l'immeuble, une bouffée d'air frais m'avait frappé le visage. Je n'avais rien emporté pour me protéger de la pluie. Cela m'importait peu. Au pire, je serais mouillé, au mieux, mes larmes ne se verront pas sous cette averse. Les gouttes ruisselaient le long de mes cheveux, trempant le haut de ma veste. Le froid m'apaisa, noyant un instant le tumulte de mes pensées mélancoliques.
Je marchais dans les rues désertes de Portland, les pas légers, perdue dans mes pensées, sans savoir où j'allais. J'étais comme une âme errante cherchant un refuge. Les feuilles d'automne, détrempées par l'averse, se collaient aux pavés. Leurs teintes flamboyantes se mêlant à la noirceur de la tombée de la nuit. Ce quartier me rappelait des jours plus simples, mais également des souvenirs que j'aurais aimé oublier. Le vent hurlait alors dans les branches, l'écho d'une tempête pointait le bout de son nez. Était-ce celle que je portais dans mon cœur depuis bien trop longtemps ? Celle qui avait enfin besoin de se libérer ?
Chaque pas sur les pavés mouillés me semblait plus difficile que le précédent. Le quartier était désert, plongé dans une obscurité que seules les rares lumières des réverbères perçaient faiblement. Absorbée par la mélodie rythmée des gouttes frappant le sol, je ne remarquai pas la silhouette qui se dessinait devant moi. Ce ne fut que lorsque je heurtai quelqu'un de plein fouet que je levai brusquement la tête. Le choc me fit perdre l'équilibre un instant, mais une main ferme me rattrapa avant que je ne tombe. Mon regard croisa le sien, et le monde s'arrêta.
Tic, tac, tic, tac...
C'était lui.
Il était là, figé comme une silhouette que le monde avait abandonnée. Le visage, trempé par la pluie, semblait à la fois familier et étranger. Mon cœur s'arrêta net. Ses traits étaient à peine éclairés par les lueurs vacillantes des lampadaires. Tant d'années s'étaient écoulées, et pourtant, à cet instant, c'était comme si le temps s'était effondré sur nous. Je savais que c'était lui. Je l'aurais reconnu entre mille, même sept années plus tard. Je restais immobile, incapable de bouger et de dire quoi que ce soit. Tout me revenait d'un seul coup, comme si une mitraillette chargée me visait en plein cœur.
— Willow, murmura-t-il, sa voix à peine audible étouffée par le bruit de la pluie.
Un frisson me parcourut, mais pas à cause du froid. Il s'approcha de nouveau, et je ne pouvais plus bouger. Mon cœur battait sous ma poitrine, et l'eau ruisselait sur ma peau pâle. Ses yeux captèrent les miens, et pendant un instant, c'était comme si l'orage grondait entre nous deux. Comme s'il n'avait jamais cessé. Il s'arrêta à quelques centimètres de moi, et je sentis la distance immense entre nos vies, entre tout ce qui avait été et ce qui ne serait plus jamais.
— Il semblerait que mes mots soient restés sans écho.
Les mots glissèrent de ses lèvres avec une douceur qui me surprit. Je grimaçais, pas certaine de savoir de quoi il voulait me parler.
— Ma lettre, reprenait-il voyant la confusion sur mon visage. Tu n'as même pas daigné répondre...
Une lettre ? Mon esprit vacilla. Je le regardai, cherchant une explication dans son regard, mais il n'y avait que ce silence étrange entre nous, empli d'énigmes et de regrets. Putain...
— Quelle lettre ? soufflai-je paniquée, incapable de comprendre.
La question resta suspendue dans l'air humide, alors que la pluie continuait de tomber, indifférente à tout ce que nous étions en train de vivre. Un éclair zébra le ciel au-dessus de nous, illuminant brièvement son visage et cette nouvelle barbe de trois jours. Ses traits étaient marqués par le temps, mais surtout la douleur. C'était à cet instant que je réalisais : nous étions tous les deux des âmes égarées.
Tic, tac, tic, tac...
Brusquement, l'obscurité s'installa à nouveau, comme un voile lourd sur mon cœur...
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SEVEN ASHES
RomanceWillow n'a qu'un seul mot d'ordre : la musique. Étudiante à Portland, elle aspire à une vie simple, loin des projecteurs. Mais tout change le jour où elle croise Seven Griffin, l'arrogant prodige musicale. Entre eux, le mépris est immédiat. Willow d...