4 - Éva

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Comme à mon habitude, je me lève avant le soleil. J'ai eu des difficultés à me rendormir après avoir compris que Navid ne dormait pas non plus. Mon corps me fait payer mes émotions de la veille et je me sens épuisée. Je sais que si Alex fait confiance à ses amis, je n'ai pas de raison de me méfier. Toutefois, il m'a toujours été compliqué d'accorder ma confiance et de me laisser aller. Dormir dans la même maison que cinq inconnus est pour moi une nouvelle épreuve à affronter et une des plus éprouvantes que j'ai eues depuis longtemps. Je sais que je dois me détendre et apprendre à connaître les amis d'Alex si je ne veux pas passer les prochains jours sur le qui-vive. Si j'accumule trop de fatigue, j'ai plus de mal à contrôler les réactions de mon corps et je ne veux mettre personne en danger.

La soirée de la veille s'étant finie il y a quelques heures à peine, je me doute que le reste de la maison ne va pas se réveiller tout de suite. Je descends l'échelle de ma mezzanine le plus silencieusement possible et contourne le canapé, sans m'attarder sur la présence de Navid, pour sortir de la maison. La fraîcheur du matin me fait un bien fou, et je m'étire longuement pour évacuer les tensions de mon corps. Mais la faim ne tarde pas à se faire ressentir et je décide d'aller à la boulangerie chercher des viennoiseries pour tout le monde. L'opération « se faire accepter par les amis d'Alex » est lancée, et pour la réussir il n'y a que deux solutions : les battre jusqu'à épuisement afin qu'ils reconnaissent ma domination, ce qui fonctionnerait si j'avais face à moi des membres de la Communauté, ou la méthode qui me paraît de loin la plus logique et la plus acceptable, satisfaire leur appétit.

À cette heure-ci, l'air est encore frais, les montagnes empêchant la chaleur de l'été d'être étouffante. J'adore ce moment, au petit matin, où la vie est encore endormie. J'enfile mes bottes et me dirige vers le cœur du village. Quelques commerces occupent la place centrale, dont une petite boulangerie qui ouvre toujours tôt. Je prends volontairement un chemin plus long. Marcher m'aide à libérer les tensions de mes jambes, et retrouver la région de mon enfance me fait du bien.

Lorsque je reviens de ma balade matinale, je croise Gaël sur le chemin de la maison.

— Tu m'as devancé, s'amuse-t-il en voyant les viennoiseries que je tente de porter sans en faire tomber la moitié par terre.

Il se rapproche de moi pour m'aider à porter les nombreux sachets contenant des dizaines de croissants, de pains au chocolat, de chouquettes et autres petits pains.

— Je ne savais pas ce que vous aimiez, alors j'ai pris un peu de tout.

— Je vois ça. Tu as peur qu'on meure de faim ?

— Je connais Alex au réveil, il serait capable de manger la moitié de ce que j'ai acheté à lui tout seul.

— Alors tu as bien fait, car Joey et Ribs sont encore pires que lui !

Sa remarque me fait sourire. S'ils aiment tant manger, mon plan pour me faire apprécier a de fortes chances d'être un succès.

— Tu es réveillé depuis longtemps ?

— Non, je suis venu directement. Mais les garçons ne risquent pas de se lever tout de suite, ils passent leur matinée au lit. Et avec ce qu'a bu Joey hier, on aura de la chance si on le voit avant midi. Généralement, Lelia est la première réveillée, avec moi.

Gaël est beaucoup plus bavard que je ne le pensais. Il ne parle jamais pour ne rien dire, mais échanger avec lui est facile. La veille, il était plutôt discret, écoutant les blagues de ses colocataires sans se faire remarquer. Mais ce matin, il semble beaucoup plus à l'aise et je souhaite en profiter. Être loin du brouhaha de Joey et Ruben me permet d'être plus détendue et de commencer à faire connaissance.

LAST HOPE [en contrat d'édition chez NISHA ET CAETERA]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant