Chapitre 1

2 1 0
                                    

Je n'avais jamais imaginé que les choses se dérouleraient ainsi.

 Après l'obtention de mon diplôme, je pensais que j'aurais besoin de continuer mes études, de poursuivre quelque chose de plus grand.

 Mais au fond, je me sentais épuisée, perdue. L'idée de passer encore des années à étudier ne me faisait plus rêver. 

Alors, j'ai arrêté.

À la place, j'ai pris un job à plein temps dans cette grande surface où je travaillais déjà les week-ends depuis plusieurs mois. 

C'était un emploi étudiant au départ, pour gagner un peu d'argent pendant mes études. 

Un moyen de joindre les deux bouts entre les cours de la semaine et les heures de boulot le samedi et le dimanche. 

Mais dès que j'ai fini l'école, ils m'ont proposé de rester à plein temps. Ils avaient besoin de renforts, et moi, je n'avais pas de plan précis pour la suite. 

J'ai accepté sans trop réfléchir.

Cela fait maintenant quelques mois que je suis là, à travailler tous les jours dans les rayons de ce magasin. Ranger, étiqueter, conseiller des clients que je ne reverrai jamais.

 Ce boulot qui, autrefois, n'était qu'un complément à mes études, est devenu toute ma vie.

 Je ne m'attendais pas à ça. 

La plupart des gens diraient que c'est bien, que j'ai trouvé un travail stable tout de suite après mon diplôme, que je devrais être reconnaissante.

 Mais en vérité, je me demande si je ne me suis pas enfermée dans une routine dont je ne sortirai jamais.

Je vois les mêmes visages, fais les mêmes tâches, sans passion, sans envie.

 C'est comme si j'avais appuyé sur pause, et que ma vie avait cessé d'avancer. 

Tout le monde autour de moi parle de leurs ambitions, de leurs rêves, des projets qu'ils poursuivent.

 Et moi, je suis là, à répondre aux clients, à ranger des rayons, à être cette fille que personne ne remarque vraiment. Exactement comme avant.

Je me demande si c'est ça, le reste de ma vie. 

Travailler dans cette grande surface qui m'a accueillie quand je ne savais plus quoi faire de moi, mais qui, jour après jour, me donne l'impression de m'éteindre un peu plus.

Perdue dans mes pensées, je ne l'entendis pas arriver.

 Ce n'est qu'au moment où il posa une main sur mon épaule que je sursautai, quittant brusquement le flot de mes réflexions.

« Hey, tout va bien ? » me demanda Julien, un de mes collègues de l'après-midi.

Je me tournai vers lui, forçant un sourire. « Oui, oui, désolée. J'étais... ailleurs. »

Julien haussa un sourcil, un léger sourire amusé au coin des lèvres. « J'avais remarqué. Ça fait cinq minutes que tu fixes ce rayon sans bouger. »

Je baissai les yeux vers les étagères en face de moi, remplies de boîtes de conserve que je devais réorganiser. Un boulot simple, presque mécanique.

 Rien qui demande vraiment de concentration, et pourtant, je n'arrivais même pas à m'y atteler correctement.

« Je réfléchissais à la meilleure manière de tout réarranger », mentis-je, essayant de masquer mon malaise.

Julien hocha la tête d'un air faussement sérieux.

 « Ah, oui, la grande stratégie de placement des haricots verts. Très important, tu sais. Si tu les mets trop bas, les clients vont râler. Trop haut, et c'est la catastrophe. » Il laissa échapper un petit rire. « Je suis sûr que c'est ça qui te tracassait. »

Derrière Le MasqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant