Chapitre 2

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L'homme marchait vite, sans doute de colère et je calai mon pas sur le sien. Il m'aurait probablement déjà porté un coup s'il n'avait pas reçu pour ordre de ne pas me toucher. Il me tenait toujours mais je décidai de ne pas réagir. Que voulait dire la blonde, tout à l'heure ? N'aurait-elle pas tout de suite pu me dire leur camp ? Je fronçai des sourcils. Peut-être que pour elle, tout n'était qu'une question de point de vue. Je me mordis la lèvre inférieure. Le garde me trainait dans des couloirs depuis plus de vingt minutes : c'était un vrai labyrinthe, impossible de s'y retrouver seul.

J'en déduisis qu'ils l'avaient confectionné ainsi pour que l'on ne s'échappe pas. Le garçon lui, n'avait aucun doute sur le chemin à prendre. Au bout de quelques minutes, il se posta devant une grande porte de métal. Je retins mon souffle. Derrière cette porte se tenait... le monde. Le monde extérieur. Je n'en avais pas beaucoup de souvenirs. Seules quelques images me parvenaient. Des places, des rues et des voitures. Le rouquin me lâcha et se dirigea vers un petit boîtier gris pendu au mur. Il se mit à taper un code, tandis qu'un scanner analysait son œil. Je scrutai mon bras. Une marque rouge y figurait, comme si le garçon avait voulu me marquer au fer rouge. J'avais toujours la sensation de sa main sur ma peau. Je rougis. Avais-je l'habitude du contact avec des garçons lorsque je n'étais pas encore ici ? Y avait-il quelque part un garçon dont j'étais amoureuse ? 

La porte grinça, coupant court à toute pensée. Je fermais les yeux. À chaque seconde, je me rapprochais toujours plus du moment fatidique. Qu'allais-je faire une fois devant cette homme ? Le tuer ? Je déglutis. Je ne pouvais pas m'enfuir, on me retrouverait puis il serait tué de toute manière. De plus si j'échouais, je mourrais aussi. Mais si je le tuais... si je le tuais moi-même, j'aurais le droit à un souvenir de ma vie.

- Numéro_3044, maugréa le garde.

J'ouvris les yeux, et retint mon souffle. Devant moi se tenait une étendue d'herbe, d'où bourdonnaient des abeilles qui s'étaient perdues en route. La nuit était tombée mais la lune éclairait les paysages montagneux qui se dressaient devant nos yeux. Au loin, on pouvait aussi apercevoir les petites lumières des maison réveillées. Je sentis les larmes me monter aux yeux. Le garde se radoucit, pour une raison que j'ignorais et m'indiqua un coin, dehors.

- On va attendre là. Les autres gardes arrivent.

- Les autres ?

- Oui. On sera plusieurs pour t'observer.

Les larmes coulèrent de plus belle et je m'essuyai de nouveau avec mon bras. Ils allaient m'observer tuer quelqu'un. J'allais tuer quelqu'un. Je n'avais pas le choix !

- Il était vraiment gentil. C'est dommage.

- Quoi ?

Je me tournai vers le garde, sans comprendre ce qu'il voulait dire.

- Carl Abords, m'indiqua-t-il.

Je le fixai. Carl Abords. Ce nom me disait quelque chose. Tandis que mes pieds nus entraient en contact avec l'herbe fraîche, je frissonnai. Carl Abords... Mais oui ! Je sortis la fiche de la cible. C'était lui ! Carl Abords était l'homme que je devais exécuter. Ne comprenant pas, je me tournais vers lui.

- Tu... tu connaissais l'homme que je dois tuer ?

- Peu importe.

Je me rapprochai brusquement de lui et empoignai son uniforme d'un geste brusque.

- Non, pas « peu importe », criai-je. Je n'ai aucun souvenir, je sais juste que je dois le tuer si je ne veux pas mourir ! Je vais tuer un homme que je ne connais même pas, m'égosillai-je, et tout le monde semble n'avoir rien à faire de ce que je ressens. Et là... et là... tu m'annonces que tu connais cet homme ?

EllipseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant