Sous le casque

Chapitre 21 : Nouvelles perspectives (POV Aya)

Le soleil se couche lentement sur Millau alors que je suis assise sur le banc du parc, les yeux rivés sur l'horizon. Les événements de la journée tourbillonnent dans mon esprit, en particulier la bagarre au lycée et l'intervention inattendue de Jason.

Jason Walker. Le bad boy du lycée. Ou du moins, c'est ce que je pensais qu'il était. Mais ces derniers jours, il m'a montré une facette de sa personnalité que je n'aurais jamais soupçonnée. Et aujourd'hui, il s'est battu pour me défendre, risquant sa réputation et son intégrité physique.

Je ferme les yeux, revivant la scène. La façon dont il s'est interposé entre moi et ses anciens amis, la détermination dans son regard, la force de ses poings... Je sens mon cœur s'accélérer à ce souvenir.

"Aya ?"

J'ouvre les yeux, surprise. Jason se tient devant moi, les mains dans les poches, l'air incertain. Son œil gauche est encore un peu enflé, un rappel brutal de la bagarre.

"Jason ? Qu'est-ce que tu fais ici ?"

Il hausse les épaules, un petit sourire aux lèvres. "Je t'ai vue depuis la route. Je me suis dit que je pourrais te tenir compagnie. Si tu veux bien, bien sûr."

J'hésite un instant. Une partie de moi, celle qui se souvient encore de ses moqueries passées, veut le repousser. Mais une autre partie, de plus en plus forte, est curieuse. Curieuse de découvrir qui est vraiment Jason Walker.

"D'accord," je dis finalement. "Assieds-toi."

Il s'installe à côté de moi, gardant une distance respectueuse. Pendant un moment, nous restons silencieux, regardant le soleil disparaître lentement derrière les collines.

"Merci," je murmure finalement. "Pour ce que tu as fait aujourd'hui."

Jason tourne la tête vers moi, ses yeux bleus intenses dans la lumière du crépuscule. "Tu n'as pas à me remercier, Aya. C'était la chose à faire."

"Pourquoi ?" je demande, incapable de contenir ma curiosité. "Pourquoi risquer ta réputation, tes amis, pour moi ?"

Il reste silencieux un moment, semblant chercher ses mots. "Parce que tu en vaux la peine," dit-il finalement. "Parce que tu es... différente. Tu me vois, le vrai moi, pas juste le bad boy que tout le monde croit connaître."

Ses mots me touchent plus que je ne veux l'admettre. Je sens une chaleur se répandre dans ma poitrine, une chaleur qui n'a rien à voir avec le soleil couchant.

"Je ne te comprends pas, Jason," j'avoue. "Un jour tu es distant et moqueur, le lendemain tu te bats pour me défendre. Qui es-tu vraiment ?"

Il soupire, passant une main dans ses cheveux. "Je ne suis pas sûr de le savoir moi-même," dit-il doucement. "Pendant si longtemps, j'ai joué un rôle. Le bad boy, le rebelle. C'était plus facile que d'être... moi."

"Et qui est ce 'toi' ?" je demande, intriguée malgré moi.

Un petit sourire apparaît sur ses lèvres. "Tu veux vraiment le savoir ?"

J'acquiesce, soudain impatiente de découvrir ce Jason que personne ne semble connaître.

"Eh bien," commence-t-il, "j'aime la mécanique. Pas seulement les motos, mais tout ce qui a un moteur. J'aime comprendre comment les choses fonctionnent, les démonter et les remonter."

Je le regarde, surprise. "Vraiment ? Moi aussi, j'adore ça. Mon père m'a appris à bricoler sur sa vieille moto quand j'étais petite."

Ses yeux s'illuminent. "C'est vrai ? Je ne savais pas ça."

Nous commençons à échanger des anecdotes sur nos expériences mécaniques, riant de nos erreurs et de nos succès. Je suis étonnée de découvrir à quel point il est facile de parler avec Jason. Il est intelligent, drôle, et passionné d'une manière que je n'aurais jamais soupçonnée.

"Tu sais," dit-il après un moment, "j'aime aussi dessiner. Des designs de motos principalement, mais pas que."

"Vraiment ?" je m'exclame. "Moi aussi ! Enfin, je dessine surtout des paysages, mais j'adore ça."

Il me regarde, un sourire sincère aux lèvres. "On dirait qu'on a plus en commun que ce qu'on pensait."

Je hoche la tête, un peu étourdie par cette réalisation. Comment est-il possible que ce garçon que je croyais détester il y a encore quelques semaines partage autant de mes passions ?

Alors que la nuit tombe, nous continuons à parler. De nos rêves, de nos peurs, de nos espoirs. Jason me parle de sa mère qui est partie quand il était enfant, de son père distant. Je lui parle de la perte de mes parents, de la difficulté à s'adapter à une nouvelle vie.

Plus la conversation avance, plus je me sens proche de lui. C'est comme si un mur invisible entre nous s'effritait peu à peu, nous permettant enfin de nous voir vraiment.

Mais en même temps, je sens une appréhension grandir en moi. Une peur. Et si tout cela n'était qu'une façade ? Et si le vrai Jason était en réalité celui qui m'a blessée au début de l'année ?

"Aya ?" La voix de Jason me tire de mes pensées. "Tout va bien ?"

Je le regarde, essayant de démêler le tourbillon d'émotions en moi. "Je... je ne sais pas," j'avoue. "Tout ça... c'est beaucoup à digérer."

Il hoche la tête, compréhensif. "Je sais. Je ne m'attends pas à ce que tu me fasses confiance du jour au lendemain. J'ai été un vrai con avec toi, et je le regrette sincèrement."

Ses mots sont comme un baume sur mon cœur blessé, mais la méfiance persiste. "Comment puis-je être sûre que tu ne vas pas redevenir ce Jason-là ?" je demande, ma voix à peine plus qu'un murmure.

Il prend ma main dans la sienne, son contact envoyant des frissons le long de mon bras. "Je ne peux pas te le promettre avec certitude," dit-il honnêtement. "Mais je peux te promettre que je vais faire de mon mieux pour être la meilleure version de moi-même. Pour toi. Pour nous."

Je regarde nos mains jointes, sentant mon cœur battre la chamade. Une partie de moi veut se laisser aller, accepter ce nouveau Jason sans réserve. Mais une autre partie, celle qui a été blessée, reste sur ses gardes.

"J'ai peur," j'avoue finalement. "Peur de te faire confiance et d'être blessée à nouveau."

Jason serre doucement ma main. "Je comprends," dit-il. "Et je suis prêt à te prouver, jour après jour, que tu peux me faire confiance. Si tu me laisses une chance."

Je lève les yeux vers lui, plongeant mon regard dans le sien. J'y vois de la sincérité, de l'espoir, et quelque chose d'autre... quelque chose qui ressemble dangereusement à de l'amour.

"D'accord," je murmure finalement. "Une chance. Mais Jason, je te préviens..."

"Je sais," m'interrompt-il avec un petit sourire. "Un faux pas et c'est fini. Je m'en souviens."

Je ne peux m'empêcher de rire, sentant une partie de la tension s'évaporer. "Tu as intérêt."

Alors que nous restons assis là, main dans la main, regardant les étoiles apparaître une à une dans le ciel nocturne, je sens quelque chose changer en moi. La méfiance est toujours là, comme une ombre persistante. Mais à côté d'elle, une nouvelle émotion grandit. Une émotion que je n'osais pas nommer jusqu'à présent.

Je commence à tomber amoureuse de Jason Walker. Et c'est aussi excitant que terrifiant.