Chapitre 2: L'échauffement

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Les techniciens se déplaçaient en silence, vérifiant une dernière fois les micros et les éclairages. Quelques mètres plus loin, les journalistes prenaient place, réglant leurs caméras et ajustant leur posture pour capter le meilleur angle du duel à venir. Jordan, immobile derrière son podium, fixait Gabriel avec intensité. Il ne l’avait jamais vu de si près, du moins pas dans cette atmosphère. D’habitude, leurs échanges se faisaient à travers des écrans ou des articles acides. Là, c’était différent. Il pouvait observer chaque détail : le pli de son costume, l’éclat de ses yeux, même la tension dans ses mâchoires lorsqu'il souriait, comme s’il essayait de maintenir une façade de calme.

Gabriel, de son côté, paraissait parfaitement à l’aise. Trop à l’aise, pensa Jordan, comme s’il jouait un rôle. Pourtant, en l’observant de plus près, Jordan remarqua une micro-hésitation, un léger tremblement de la main quand Gabriel ajusta ses notes. **Il n’est pas si serein qu’il le prétend**, réalisa-t-il, un sourire en coin naissant discrètement sur son visage.

L’animateur fit un signe, et soudain, l’ambiance changea. Le plateau se plongea dans un silence profond, interrompu seulement par le compte à rebours affiché sur l’écran géant en face d’eux. Trois… deux… un…

« Mesdames et messieurs, bienvenue à ce débat tant attendu ! Ce soir, nous avons avec nous deux figures incontournables de la scène politique française : Jordan Bardella et Gabriel Attal. »

Les caméras tournaient enfin. Les masques étaient de retour. Jordan prit une profonde inspiration avant de lancer la première attaque, soigneusement préparée.

« Gabriel, commença-t-il d’un ton posé mais tranchant, je pense qu’il est clair pour tout le monde ici que ta politique migratoire est un échec retentissant. Tu continues de t’accrocher à des solutions inefficaces et de vendre aux Français des promesses que tu ne peux pas tenir. »

Le ministre ne broncha pas. Il s’y attendait. Il sourit légèrement, puis répondit avec son aisance habituelle, sa voix douce et percutante à la fois.

« Jordan, je suis ravi de te voir en forme ce soir. Mais je crois qu’on s’éloigne du cœur du problème. Ce que tu appelles un échec, ce sont en réalité des efforts concrets pour sécuriser le pays tout en respectant nos valeurs républicaines. Il est facile de faire des discours, mais quand on est aux responsabilités, la réalité est bien plus complexe que tes slogans. »

Jordan ne put s’empêcher d’admirer cette réplique. Elle était millimétrée, parfaitement calculée pour toucher juste, mais sans excès. Pourtant, quelque chose dans la manière dont Gabriel le regardait, dans la lueur de ses yeux, semblait indiquer que ce n’était pas qu’une simple joute verbale. **Il y a quelque chose d’autre ici**, pensa-t-il.

Pendant que le débat continuait, les piques devenaient de plus en plus personnelles, mais toujours sous couvert de professionnalisme. Pourtant, à chaque échange, Jordan ressentait une tension croissante, presque électrique. Et cette fois, ce n’était pas uniquement dû à leurs divergences politiques.

« Ce n’est pas parce que tu as le dernier mot sur scène que tu as forcément raison, Gabriel », lança Jordan, son ton légèrement plus bas que nécessaire.

Gabriel leva les yeux, ses lèvres se courbant en un sourire énigmatique. « Et ce n’est pas parce que tu es convaincu d'avoir toujours raison que tu gagnes tous les débats. Mais on verra ce que le public en pense. »

Le silence qui suivit leur échange fut plus lourd que prévu. Pour un instant, tout le reste sembla s’effacer. Les applaudissements du public, les caméras, les lumières… Il n’y avait plus que ces regards échangés, chargés d’une tension aussi bien idéologique que personnelle. Ils étaient seuls, deux hommes sur le même champ de bataille, mais plus proches l’un de l’autre qu’ils ne l’auraient voulu.

séparés par un partie Où les histoires vivent. Découvrez maintenant