Chapitre 2 : Le virage dangereux

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L'offre de l'homme résonnait encore dans la tête de Dante alors qu'il marchait aux côtés de Soya dans les rues sombres du quartier. L'idée de gagner de l'argent rapidement, d'enfin pouvoir sortir de cette vie morne, le séduisait. Soya, lui, restait silencieux, les mains enfoncées dans les poches de sa veste usée. Ils avaient toujours su que des chemins comme celui-là existaient dans le quartier, mais jusqu'à présent, ils n'avaient jamais eu à les envisager sérieusement.

Après quelques minutes de marche, Soya brisa finalement le silence. « Tu sais ce qu'il fait, ce gars ? » demanda-t-il d'un ton neutre. « Il bosse pour le cartel local. Ce n'est pas des petits boulots qu'il nous propose, c'est la drogue. »

Dante hocha lentement la tête, pas vraiment surpris. Il savait que les choses ne pouvaient pas être aussi simples. Pourtant, une part de lui restait tentée. Il s'arrêta net, attrapant doucement le bras de Soya pour le faire s'arrêter aussi.

« Écoute, je sais ce que tu penses. Mais on pourrait le faire, tu vois ? Juste quelques fois, prendre l'argent et se barrer après. Ce serait temporaire, juste le temps de mettre de côté. On pourra enfin quitter ce quartier et réaliser nos plans. »

Soya le regarda intensément, cherchant une trace de doute dans les yeux de son ami, mais tout ce qu'il y trouva, c'était une détermination froide. Cela l'inquiétait. Pourtant, il comprenait. Ils en avaient marre de cette vie. Et bien qu'il sache que s'impliquer dans le trafic de drogue était dangereux, l'espoir de sortir enfin de leur situation était presque irrésistible. Un soupir s'échappa de ses lèvres.

« Et si ça tourne mal ? » demanda-t-il. « Tu sais comment ça se passe. Ceux qui entrent là-dedans ne s'en sortent pas facilement. Ils finissent soit en prison, soit morts. »

Dante fronça les sourcils, mais son regard ne vacilla pas. « On est intelligents, Soya. On ne va pas rester là-dedans indéfiniment. On fera ce qu'il faut, puis on partira. Ensemble. Comme on l'a toujours prévu. »

Soya baissa les yeux, laissant le silence s'installer à nouveau entre eux. Il n'avait jamais vu Dante aussi sûr de lui, aussi prêt à prendre un risque aussi grand. Et au fond de lui, il savait que leur vie n'irait pas en s'améliorant si rien ne changeait. Peut-être que c'était leur seule chance, aussi folle soit-elle. Finalement, il hocha la tête, non sans une certaine réticence.

« D'accord », murmura-t-il. « Mais on fait ça à ma façon. On reste discrets, on ne prend aucun risque inutile. Et dès qu'on a assez d'argent, on se barre. Pas de discussion là-dessus. »

Dante esquissa un sourire. « Je savais que tu serais avec moi, frère. »

Le lendemain, ils retrouvèrent l'homme à l'endroit convenu, une ruelle délabrée, à quelques blocs de leur lycée. Il les attendait, adossé à un mur, une cigarette à la main, l'air confiant et détendu.

« Alors, vous êtes prêts ? » demanda-t-il sans préambule, scrutant leurs visages.

« On veut juste savoir ce qu'on doit faire », répondit Soya d'une voix calme, mais ferme.

L'homme jeta un coup d'œil rapide autour de lui, s'assurant que personne ne les écoutait, puis il se pencha légèrement vers eux.

« Simple », dit-il en leur montrant un petit sac noir qu'il tenait dans sa main. « Vous livrez ce sac à une adresse. C'est tout. Vous ne posez pas de questions, vous ne regardez pas ce qu'il y a dedans. Vous faites ce qu'on vous dit, et vous serez bien payés. »

Dante tendit la main pour prendre le sac, mais Soya le devança, attrapant l'objet avant que Dante ne puisse réagir. Le geste n'échappa pas à l'homme, qui esquissa un sourire amusé.

« Discret, j'aime ça », dit-il en hochant la tête. « Faites votre boulot, et vous reviendrez pour plus. »

Soya et Dante repartirent sans dire un mot. Ils connaissaient la zone indiquée sur le papier que l'homme leur avait donné. C'était une vieille résidence en périphérie du quartier, un endroit où les autorités ne mettaient jamais les pieds. Sur le chemin, Dante sentait son cœur battre à toute allure, une adrénaline qu'il n'avait jamais ressentie auparavant. L'idée de jouer un rôle, de faire partie de ce monde souterrain, le fascinait autant qu'elle l'effrayait.

De son côté, Soya gardait un calme extérieur, mais à l'intérieur, il était tendu. Il savait qu'ils venaient de franchir une ligne, qu'ils entraient dans un jeu dangereux dont ils ne connaissaient pas toutes les règles. Mais maintenant qu'ils avaient accepté, il n'y avait plus de retour en arrière.

La livraison se déroula sans accroc. Un homme grand et maigre les attendait à la porte de l'appartement. Il prit le sac sans dire un mot, jeta un regard rapide aux deux amis, puis referma la porte sans cérémonie. Une fois dehors, Dante souffla enfin, relâchant la tension qu'il n'avait pas remarquée jusque-là.

« C'était facile », dit-il en esquissant un sourire.

Soya hocha la tête, mais son visage restait impassible. « Ouais, mais ce n'est que le début. On doit faire attention, Dante. Il suffit d'une erreur, une seule, pour que tout s'effondre. »

Quelques jours plus tard, l'homme leur proposa un autre job, et puis un autre. À chaque livraison, l'argent coulait de plus en plus. Ils ne gagnaient pas encore des fortunes, mais c'était suffisant pour leur permettre de vivre mieux. Avec ce nouvel argent, Dante commença à s'acheter des vêtements plus chers, à traîner dans des bars où il n'aurait jamais mis les pieds avant. Il se sentait puissant, invincible.

Soya, en revanche, se montrait plus prudent. Il cachait son argent, se contentant de vivre modestement, craignant que cette nouvelle vie ne leur échappe trop vite. Il voyait déjà Dante changer, devenir plus audacieux, plus risqué dans ses décisions. Et cela l'inquiétait.

Un soir, après une livraison particulièrement bien payée, Dante suggéra qu'ils célèbrent leur réussite. Ils se rendirent dans un club du centre-ville, un endroit chic où les gens ne se mélangeaient pas souvent avec ceux du quartier de Dante et Soya. L'atmosphère était électrique, la musique forte, et les lumières éblouissantes. Dante se perdit rapidement dans l'ambiance, commandant des boissons, riant, dépensant sans compter.

Soya restait en retrait, observant son ami avec une certaine appréhension. Ce n'était plus le même Dante, celui qui cherchait simplement à s'en sortir. Il voyait dans ses yeux une lueur de danger, une arrogance qui n'était pas là avant.

« On devrait faire attention », murmura Soya en s'approchant de Dante à un moment où la fête semblait à son comble.

Mais Dante, déjà ivre, balaya ses préoccupations d'un geste. « Ne t'inquiète pas, Soya ! On a réussi ! On est enfin quelqu'un ! »

Ce soir-là, Soya comprit que la voie qu'ils avaient empruntée ne leur apporterait pas que de l'argent et du pouvoir. Elle risquait aussi de les détruire.

Soya & Dante ( mini histoire 5 chapitres )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant