Chapitre 12

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Après avoir terminé de donner tant bien que mal la leçon aux enfants Eastwood, j'en profitai pour mettre mon grain de sel et en savoir plus sur les Waverley en allant trouver Gloria Eastwood, que je savais plus ou moins proche d'Eleanor.

— J'ai terminé avec les petits, lui dis-je avec mon ton avenant et sympathique.

La mère des enfants était assise confortablement dans le canapé rembourré de son salon, en compagnie de deux autres lady. Les effluves de bergamote de leur thé avaient envahi la pièce, et je n'aurais pas été contre quelques-uns de leurs scones pour me réconforter de la mésaventure de la matinée avec le mari de ma sœur.

Gloria me gratifia d'un sourire et me demanda :

— Je vous remercie Victoria. Ils vous ont bien écouté ?

— Oui, aucun problème, comme d'habitude, mentis-je. Vous avez éduqué-là deux parfaits angelots.

— Oh, j'ai bien du mal à vous croire malheureusement, gloussa-t-elle amusée. Enfin, s'ils sont sages avec vous, je ne vais pas me plaindre. Voulez-vous que je demande à notre majordome de vous ramener ?

Je m'avançai vers ces dames.

— Oh nul besoin de vous embarrasser de cette peine, permettez-moi simplement d'utiliser votre téléphone pour que je puisse demander au vieil Henry de me récupérer.

Gloria acquiesça et me mena au téléphone dans le hall d'entrée. L'appareil était placé juste à côté d'une petite sculpture d'un David qui me rappelait amèrement William, et je détournai plutôt mon regard vers les tapis persans au sol afin d'éviter de raviver ma colère. Ce fut heureusement Henry qui répondit et je lui précisai de bien prendre son temps pour venir me chercher. Une fois fait, je retournai dans le salon en minaudant.

— Je crains devoir attendre une petite heure, le vieil Henry est un peu occupé, cela vous dérangerait-il que je patiente avec vous durant ce temps ?

— Oh non, non, bien sûr que non Victoria, vous nous embêtez jamais, souhaitez-vous que l'on vous serve un thé ? me demanda-t-elle par simple politesse. Ma proposition pour que l'on vous ramène est toujours valable, autrement.

Je saisis la perche et je leur fis mon plus beau sourire.

— Dans ce cas, je prendrais du thé avec grand plaisir, dis-je en m'installant près de Gloria sans même lui avoir laissé le temps de réagir. Il est vrai que je repars bientôt pour Londres et que nous n'avons même pas eu le temps de faire connaissance comme il se doit. Quel dommage, le temps est passé si vite !

Mabel Fitzgerald, une noble au visage chevalin, s'intéressa à moi avec courtoisie :

— J'espère que votre séjour s'est bien passé et que vous ne vous êtes pas trop ennuyée dans notre petite ville.

— Oh oui, c'était merveilleux, les Waverley sont si gentils ! baratinai-je. Ils ne méritent vraiment pas toutes les tragédies qui leur sont arrivées... Louise, n'est-ce pas ? C'était son nom ? Que Dieu lui pardonne...

Je vis les yeux de ces femmes s'illuminer, avides de drames et de ragots :

— Oui, quelle pauvre âme. Elle était si belle et si douce. Personne n'aurait pensé qu'elle puisse être aussi malade.

— La mélancolie est effectivement une terrible maladie, j'ai un oncle lointain qui a des accès parfois, et ce n'est jamais facile à vivre, dit Helen Gordon, la plus âgée des trois, engoncée dans une robe à manches bouffantes qui n'allait pas du tout à sa silhouette.

— Qu'est-ce qui a bien pu lui passer par la tête ? Il faut vraiment en souffrir pour en arriver là... dis-je d'un air faussement contemplatif. Cela a dû être si dur pour William.

Ma sœur et les WaverleyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant