La poésie selon Lychamon

1 1 0
                                    

Lychamon était le roi de ce pays, et il vivait en paix auprès des siens sur les terres où s'écoulaient mystères nimbés d'étoiles et de richesses.

Il ne se lassait pas d'une seule journée à admirer se hisser par-dessus les cieux ses hautes tours d'or vêtues, ses cascades d'eau de cristal et ses fabuleux jardins d'émeraude qui s'étendaient à perte de vue partout dans le royaume.

Du levé jusqu'au coucher du soleil, il contemplait, depuis la vaste demeure qu'était la sienne, la fortune que lui avait accordé l'univers et s'émerveillait lorsque les aurores de son pays se tissaient dans la nuit.

Mais un jour, le soleil, se fit plus ardent que d'accoutumé, et grimpa au sommet des cieux afin de prendre d'assaut les terres où s'écoulaient mystères nimbés d'étoiles et de richesses de Lychamon.

Elles devinrent alors sèches et arides comme le désert et, jusqu'à la dernière goutte, les eaux de cristal s'évaporèrent des cascades.

Aussi, l'eau avait quitté les crues, les rivières, les fleuves...

Lychamon, désemparé, parcourra chaque demeure afin de retrouver des ondes, mais n'en ramena aucune, et le pays croula sous la sécheresse.

Alors, la paix s'acheva et la vindicte de la guerre gronda.

Partout, autour du monde, on entendit retentir le râle de Lychamon qui ne souhaitait pas voir ses contrées périr dans la soif.

Il prit sa monture, son armée et ses lances et traversa les chemins escarpés à la recherche d'eau, retrouvant le pays voisin et le cernant de toute part pour lui dérober ses ondes.

Le sang écoulé n'étancha pas sa soif d'eau, et jusqu'aux dix prochaines aurores de l'aube, aucune agonie ne fut épargnée par le courroux du roi Lychamon.

Écoute-moi, Ô Lychamon, fit le roi du pays conquis, que mes pleurs inondent tes rives et tes coupes, je te prie de croire en mes promesses. Je te les fais, je te les donne, mais je t'en conjure, épargne les miens.

Le roi tint promesse et alors, les eaux revinrent sur les terres où s'écoulaient mystères nimbés d'étoiles et de richesse, et ils n'en manquèrent plus jamais.

Cependant, malgré les bonnes promesses et les bonnes volontés, le soleil revint tout de même, plus virulent qu'auparavant, afin d'incendier le pays, et ce fut alors au tour des jardins d'émeraude de se consumer sous le courroux de sa braise.

Aussi, les champs, les forêts et toutes les cultures furent emportés sous la chaleur dévorante.

Lychamon, ne désirant pas voir ses contrées crouler sous la famine, chevaucha une nouvelle fois aux côtés de ses armées et partie vers d'autres pays afin de trouver de nouvelles denrées.

Les cris des champs de bataille gondèrent à nouveau dans l'horizon, et la brume de sang qui aveuglait les cieux ne se dissipa pas avant les cinquante prochaines aurores de l'aube.

Écoute-moi, Ô Lychamon, fit le roi du pays conquis, croit en mes paroles, l'inquisition de mes belles promesses, que le grain te soit donné et tes champs fleuriront en abondance à nouveau. Mais par pitié, ne t'en prend plus à ma cité.

Le roi tint sa promesse et alors, le grain revint sur les terres où s'écoulaient mystères nimbés d'étoiles et de richesse, et ils n'en manquèrent plus jamais.

Mais le temps emporta les promesses et bientôt, le soleil vint rouer une fois de plus les contrées de Lychamon. Sa chaleur, plus mortifère que jamais, fit fondre l'or à même le sommet des tours.

Aussi, il faucha le peuple et consuma jusqu'à sa dernière goutte de sueur.

Faibles comme robuste furent terrassés dans cette douloureuse épreuve qui contaminait tout le royaume.

Aucun pays, aucune contrée, aucune cité, ne possédaient quelconque remède aux affres de Lychamon.

Afin de chasser la chaleur une bonne fois pour toutes, les sages révélèrent à Lychamon l'existence d'un ogre, terré dans une grotte sombre et oubliée, qui, une fois pourfendu, apaiserait les affreux maux de l'astre.

Lychamon, ne désirant pas voir ses contrées sombrer dans la désolation, partit à cheval, traversant les terres arides et embrasées, et, au terme des cent prochaines aurores de l'aube, il retrouva l'antre obscurcît de l'ogre.

Dès son arrivée, il dégaina son épée et voulu occire la bête.

Mais au lieu de se battre, l'ogre s'arma de conviction et laissa à Lychamon le choix de son geste.

Écoute-moi, Ô Lychamon, fit l'ogre, ta lame et ton esprit sont téméraires, le soleil, je te le laisse, je t'en fais la promesse. Mais si tu accuses ses assauts d'être les germes de ton malheur, alors à lui seul ta vindicte appartient.

Mais au diable les promesses, au diable le soleil.

Lychamon voulut abattre le monstre, mais, à nouveau, les cieux vinrent s'en mêler. Au cent-unième aurore de l'aube, la lumière inonda la lame de Lychamon, et la vérité son esprit. Il réalisa de raison que l'ogre ne lui avait pas menti.

Alors, Lychamon dit à l'ogre :

Qu'avec les lueurs de l'aurore fane les espoirs de revanche.

Et il partit.

Une fois son pays retrouvé, assiégé par les courroux solaires, Lychamon scruta le ciel. L'avis de l'ogre était le bon, le vrai ennemi était le soleil, érigé au sommet des vents et des tempêtes, lui qui nous regarde sans que nous ne puissions le regarder en retour.

Lychamon demanda alors de faire bâtir un grand escalier pour se hisser au même sommet que son ennemi de toujours.

On rassembla par millier les bras de tout le pays, et à chaque nouveau jour, le grand escalier qui allait conquérir le ciel s'agrandissait.

La tâche ardue que cela représentait, ajouté à l'impitoyable chaleur, amena au trépas bon nombre des hommes du royaume.

Nous ne comptâmes plus aucune aurore de l'aube avant que les marches ne se hissent finalement aux hauteurs exigées, et lorsque ce fut le cas, Lychamon ne perdit pas une seconde, et les gravit, épée à la main et convictions au cœur.

Déterminé à faire taire la répugnante lumière de feu, il s'éleva par-dessus les nuages et brandit sa lame avec vigueur une fois arrivé à la dernière marche.

Mais le manteau de lumière de l'astre, à lui seul, suffit à ébranler Lychamon. Ses rayons dévorèrent sa lame et l'éblouirent au point de lui brûler les pupilles. Lychamon, aveuglé, perdit l'équilibre, et du haut de son grand escalier, il chuta.

Après quoi, le soleil se vêtit de nuage et disparut pour laisser place à la pluie. L'aurore meurtrière s'apaisa, et les terres, qui fussent autrefois celles de Lychamons, redevinrent celles nimbées d'étoiles et de richesses.

Jusqu'à toutes les prochaines aurores de l'aube, jamais plus le soleil ne se montra sous son mauvais jour. Au lieu de cela, il fit refleurir champs à profusion, fit briller de cristal toutes les rivières et fit resplendir de richesse tout le royaume.

Quant à Lychamon, nul ne sut jamais ce qui l'en advint. Avait-il péri ? Avait-il survécu ? Arpentait-il dorénavant, aveugle et déchu, les terres soulagées du soleil ? Son âme avait-elle rejoint les mêmes sommets qu'il conspuait auparavant ? Ou au contraire, s'était-elle perdue dans les méandres obscurs de l'abîme ?

On se souvint de lui un temps, comme le roi fou et aveugle qui pensait faire taire le soleil, et puis les époques se chargèrent d'emporter son souvenir au loin dans l'oubli de ce monde.

Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : 6 days ago ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

Ténèbres éveilléesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant