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La pluie tambourinait sans répit sur les fenêtres des vieilles maisons de Marancy, enveloppant le village dans un voile lourd et humide. Un peu plus loin, caché au cœur d'une forêt impénétrable et sombre, l'ancien asile abandonné se dressait dans la nuit. L'immense bâtisse paraissait désertée depuis des siècles, ses murs d'un noir sinistre étaient recouverts de lierre et de mousses sombres, rongés par le temps, comme si la forêt elle-même tentait d'avaler cet endroit maudit pour en effacer la mémoire.

Deux jeunes lycéens, Raven et Léo, marchaient d'un pas lent vers cette prison de pierre. Ils s'étaient donné le défi de confronter la légende de l'asile pour Halloween, une idée qui avait d'abord semblé excitante, mais qui désormais glaçait le sang de Léo. Raven, en tête, avançait sans hésitation, comme guidée par une force invisible. Grande, gracieuse et d'une beauté troublante, elle fixait l'entrée béante du bâtiment avec une intensité presque obsédée. Ses yeux noirs étaient insondables, comme un puits d'ombre, et la lueur étrange qui y brillait était à la fois attirante et inquiétante. Autour d'elle flottait une odeur de fleurs fanées, douce et persistante, comme un souvenir dont on ne se libère jamais complètement. Elle jeta un regard à Léo, un sourire aux coins des lèvres.

Raven portait un long manteau noir, trempé par la pluie, qui claquait dans le vent. Une mèche humide s'accrochait à sa joue pâle, et, malgré la nuit et l'humidité, elle dégageait une aura magnétique, presque surnaturelle. Léo en était captivé depuis qu'ils s'étaient rencontrés. Ce soir encore, il ne pouvait détacher ses yeux d'elle, pris entre la fascination et l'appréhension.

Léo, avec ses traits doux et ses yeux brillants d'un éclat sincère, était tout l'opposé de Raven. Athlétique et bienveillant, il semblait pourtant rétrécir dans l'ombre menaçante de l'asile. Ses regards nerveux glissaient sur les fenêtres brisées et les murs noirs, tandis que son cœur battait à tout rompre. Il n'y avait ici que silence et obscurité, un silence qui semblait habité, comme si les murs eux-mêmes avaient des choses à dire.

Raven, tu es sûre que c'est une bonne idée ? demanda-t-il, sa voix trahissant une crainte bien réelle.

Elle tourna la tête, et ses yeux s'illuminèrent d'un éclat étrange. Un sourire fin, comme une caresse ou une menace, effleura ses lèvres.

Oh, Léo, il n'y a rien à craindre... On est ici pour percer les mystères de cet endroit. Ne me dis pas que tu vas te dégonfler maintenant ? N'étais-tu pas celui qui voulait tout savoir sur moi ?

Léo sentit un frisson glacé descendre le long de son dos. Il ne comprenait pas ce qui, dans le sourire de Raven, le perturbait autant. C'était comme une beauté vénéneuse, une séduction qui avait des allures de piège. Pourtant, malgré cette étrange sensation, il ne pouvait se résoudre à reculer. Ses sentiments pour elle étaient trop puissants, trop profonds pour qu'il l'abandonne maintenant. Il ne voulait pas paraître faible à ses yeux. Et il ne voulait surtout pas la perdre.

Doucement, Raven lui attrapa la main, ses doigts fins et glacés s'enroulant autour des siens, et l'attira vers l'entrée en ruine. Il sentit son pouls s'emballer, mais la chaleur de sa main dans la sienne semblait le réconforter, lui donner le courage d'entrer dans ce lieu qui le terrifiait. Chaque pas dans cette direction l'éloignait un peu plus du monde réel, le précipitait dans quelque chose d'inconnu et de dangereux. Pourtant, il ne pouvait que la suivre, comme hypnotisé.

Ils franchirent le seuil délabré de l'asile, et aussitôt, le froid des lieux les enveloppa. Un vent glacial soufflait entre les murs, portant une odeur âcre et fétide de renfermé. Léo jeta un dernier regard en arrière, mais tout semblait déjà si lointain. Il ne savait pas que pour Raven, ce n'était pas une simple visite de curiosité. Elle semblait parfaitement à son aise dans ce lieu cauchemardesque, comme si elle s'y trouvait chez elle.


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Les ombres de MarancyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant