Chapitre 3 : Flottement chaleureux

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« Je paie pour nos deux cafés. Et avant que vous ne disiez quoi que ce soit, c'est vraiment un plaisir, » assure-t-il. Adélaïde reste sans voix et le laisse faire, surprise. Le patron lui lance un regard amusé avant de retourner derrière le comptoir.

« Vous venez souvent ici ? » demande Jacob, ses yeux cherchant à croiser ceux d'Adélaïde.

« Quand j'étais étudiante, je venais souvent au musée et je m'arrêtais systématiquement dans ce café. Mais ça fait quelques mois que je ne suis pas revenue, » explique-t-elle, un sourire un peu timide aux lèvres, feignant de ne pas voir ses tentatives de contact visuel.

« Oh... votre travail vous prend trop de temps ? » s'enquiert-il, l'air sincèrement curieux.

« Il y a pire, mais oui, je travaille beaucoup. Surtout, ce qui m'empêche de revenir ici, c'est que je n'habite plus Paris... donc, par la force des choses, mes visites sont devenues rares, » admet-elle, une pointe de nostalgie dans la voix.

« Et dans quel domaine travaillez-vous, si ce n'est pas trop indiscret ? » demande Jacob, l'intérêt brillants dans ses yeux.

« Pas de souci, je ne suis pas agent secret ! Je suis libraire et je dois gérer une boutique seule. Elle appartient à mes patrons, qui ont plusieurs librairies dans le département où je vis. » Adélaïde prend une gorgée de son macchiato, se sentant un peu plus à l'aise. Elle se redresse et fixe son interlocuteur, qui semble captivé par ses mots. « Et vous, êtes-vous danseur à plein temps ? »

« Comment savez-vous que je suis danseur ? » demande Jacob, surpris mais amusé.

« Eh bien... je vous suis depuis quelques années. Je suis tombée sur l'une de vos vidéos, et j'ai beaucoup aimé... c'est un peu embarrassant, je sais, » avoue-t-elle, le visage s'illuminant de gêne.

« Aaah... tout s'explique. En tout cas, ça me fait vraiment plaisir de savoir que mon travail est apprécié. On ne m'a jamais reconnu dans la rue avant aujourd'hui. Pour répondre à votre question, j'aimerais être danseur à plein temps, mais... ce n'est pas si simple. Je dois aussi aider mon frère dans son entreprise. Il crée des visuels et vend des vêtements. »

« Oh, d'accord... Mais vous trouvez quand même le temps de danser et de vous entraîner ? C'est impressionnant, » s'émerveille-t-elle, admirative.

« J'essaie, oui... Mais ce n'est pas toujours évident. Je ne publie que lorsque j'ai vraiment eu le temps. Vous dansez aussi ? »

« Oh non, pas du tout ! J'adorerais, mais j'ai deux pieds gauches, aucun sens du rythme et, surtout, pas de contrôle sur mon corps ! » répond-elle en riant, le visage rayonnant de bonne humeur.

« Cela peut s'apprendre, » sourit Jacob, un brin taquin.

« Bien sûr, mais je crois que je suis un peu immunisée contre ça. J'ai été en école de danse pendant presque deux ans et je n'ai vu aucune amélioration. Ajoutez à cela le trac, et vous obtenez une véritable catastrophe ambulante, » rigole-t-elle, se remémorant ses mésaventures.

« Je suis sûr que ce n'est pas si terrible ! » insiste Jacob, riant avec elle.

« La dernière performance à laquelle j'ai participé, je suis tombée sur la table avec toutes les bouteilles d'eau. Évidemment, elles étaient toutes ouvertes et se sont déversées sur les enceintes. Résultat : des milliers d'euros de dégâts et des moqueries pendant des années. Les collégiens, ça ne pardonne pas ! »

« En même temps, qui laisse des bouteilles ouvertes près de l'électronique ? » Rit Jacob. « Ce n'est peut-être pas courant d'avoir ce genre d'expérience, je vous l'accorde. Mais c'est ce qui est beau dans la danse : tout le monde peut s'exprimer, qu'il ait pris des cours ou non. Qui peut vraiment juger la façon de danser des autres ? Il n'y a pas de règles établies... »

« Allez dire ça à des collégiens ! Sur le principe, je suis totalement d'accord avec vous. Mais dans la réalité, il y a souvent une différence entre ceux qui dansent avec aisance et ceux qui peinent à suivre le rythme, » rétorque-t-elle, un sourire complice aux lèvres.

Leur conversation s'installe dans une atmosphère de complicité, le café autour d'eux devenant presque invisible. Les bruits ambiants se mêlent aux éclats de rire et aux échanges sincères. Adélaïde se sent de plus en plus à l'aise. Jacob semble être une personne sincèrement bienveillante et profondément intéressée par les personnes qui l'entourent. Adélaïde se réjouit de pouvoir discuter de la danse, même si, au fond d'elle, elle sait qu'elle n'osera jamais suivre les conseils du danseur. 

Nectar (FF)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant