Chapitre 4 : L'art de la Conversation

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Leur conversation s'installe dans une atmosphère de complicité, le café autour d'eux devenant presque invisible. Les bruits ambiants se mêlent aux éclats de rire et aux échanges sincères. Adélaïde se sent de plus en plus à l'aise. Jacob semble être une personne sincèrement bienveillante et profondément intéressée par les personnes qui l'entourent. Adélaïde se réjouit de pouvoir discuter de danse, même si, au fond d'elle, elle sait qu'elle n'osera jamais suivre les conseils du danseur.

Alors que leur échange paraît ininterrompu, le téléphone de Jacob se met à sonner. Le jeune homme, l'air hésitant, pèse le pour et le contre d'un appel inattendu. Adélaïde, saisissant l'instant, lui suggère de prendre l'appel pendant qu'elle se dirige vers les toilettes. Il acquiesce d'un hochement de tête reconnaissant avant de quitter le café en décrochant.

Elle le suit des yeux alors qu'il s'éloigne, son image se fondant peu à peu dans la rue animée. Enfin seule, elle se glisse devant le miroir, encore incrédule face à l'étrangeté de la situation. Ses joues, rosies par un mélange de stress et d'excitation, trahissent l'effet que cette rencontre a sur elle. Elle souhaiterait que cette journée s'éternise, pour continuer à échanger des mots avec Jacob, à explorer cette complicité naissante.

En sortant des toilettes, elle constate avec un léger désarroi que le jeune homme a disparu de devant le café. Elle ouvre la porte et jette un coup d'œil dans la rue, mais ne parvient pas à le retrouver. Un brin déçue, elle retourne à sa table pour récupérer ses affaires.

« Adélaïde ! » l'appelle le patron, l'interrompant dans ses pensées. Elle se dirige vers lui, ne parvenant pas à dissimuler son air contrit. « Le jeune homme qui t'accompagnait a laissé ce mot pour toi, » annonce-t-il en lui tendant un morceau de papier.

Je suis désolé, je dois partir en urgence. Ce fut un plaisir de discuter avec vous. Pour me faire pardonner, que diriez-vous de reprendre notre conversation demain à midi ? Je vous laisse mon numéro. J'espère que vous accepterez.

« Merci beaucoup ! Et ton macchiato est toujours aussi délicieux, » répond Adélaïde, un sourire illuminant son visage, soulagée à l'idée de revoir le danseur.

Le gérant se penche légèrement sur le comptoir et murmure avec une malice non dissimulée : « Dis donc... il est plutôt mignon. Est-ce que vous- »

« Avant que tu ne te fasses de fausses idées, » l'interrompt Adélaïde, « c'est simplement quelqu'un que j'admire pour son art. »

Le cafetier éclate de rire avant de se remettre à essuyer les verres, tournant le dos à Adélaïde. La complicité qui les unit est inattendue pour quiconque les observe. Dans les premières années de leur rencontre, Adélaïde semble invisible aux yeux de cet homme qui pourrait être son père. Elle passe ses commandes timidement, se contentant d'un modeste nectar d'abricot.

Puis un jour, après une longue journée marquée par une succession de mauvaises nouvelles, elle ne parvient pas à contenir ses larmes. Le café est presque désert, laissant le propriétaire seul en mesure de la voir dans cet état de détresse. Sans hésitation, il s'installe près d'elle et lui propose un macchiato caramel, offert par la maison. Selon lui, rien ne vaut ce breuvage pour réconforter quelqu'un. C'est ainsi qu'ils commencent à discuter, et lors des visites suivantes, il prend le temps de lui poser des questions, tandis qu'elle se laisse tenter à nouveau par ce fameux café.

Au fil des années, le gérant prend une dimension presque paternelle pour la jeune femme. Cela fait maintenant plus de six ans qu'ils se connaissent, mais c'est seulement à cet instant qu'elle réalise qu'elle ne connaît pas le prénom de cette figure si importante dans sa vie parisienne.

Se retournant alors vers lui, elle lui pose la question sans détour. Surpris, il se tourne vers elle, réalisant avec étonnement qu'il ne lui a jamais donné son nom.

« Je m'appelle Paul... Et c'est seulement maintenant que tu me poses la question ? Ah, voilà une belle ironie de notre jeunesse ! » plaisante-t-il, un sourire chaleureux aux lèvres.

Ils se disent "au revoir" et Adélaïde appelle Lucas pour savoir où il se retrouve.

*Quelques heures plus tard, de retour à l'appartement de Lucas*

« Bon, raconte-moi ! Comment ça s'est passé ? » demande Lucas, l'enthousiasme palpable dans sa voix.

« Je ne te le dirai pas, » boude Adélaïde, avec un sourire espiègle.

« Allez, tu me dois bien ça. C'est grâce à moi que tu as pu lui parler, je te rappelle, » rétorque-t-il avec fierté.

« Tu veux dire que tu nous as lancés sous les roues du camion ! Pourquoi as-tu dit qu'il me plaisait ? Tu aurais pu dire que je le suivais et que j'admirais son travail ! » s'exclame-t-elle en lui lançant un coussin.

« J'ai juste dit la vérité ! Depuis quatre ans, c'est tout ce que tu fais : "Oh, as-tu vu sa nouvelle coiffure ? Ses nouvelles baskets ?" Tu en pinces pour lui, et tu es dans le déni, ma grande, » lance-t-il, moqueur.

« Ne m'appelle pas "ma grande", tu sais que ça m'énerve ! Et je n'en pince pas pour lui ! J'admire son talent, c'est tout. Ses chorégraphies sont expressives, ça me réjouit de voir quelqu'un danser aussi bien. Je ne le connais pas personnellement... »

« Si ! Maintenant, tu le connais ! » l'interrompt Lucas, un sourire malicieux sur le visage.

« Je ne le connais pas assez pour avoir un crush ! On a juste discuté un peu, » défend-elle.

« Un peu ? Vous avez passé 3h30 ensemble ! Tu crois que vous êtes restés silencieux comme des carpes pendant tout ce temps ? »

« Interromps-moi encore une fois, et je te fais manger le coussin ! Et 3h30, c'est dérisoire dans une vie ! C'était agréable, c'est vrai, il semble sympa, mais ça s'arrête là. »

« Alors pourquoi es-tu si contente de le revoir demain ? »

« Je viens de te le dire, nigaud ! Il a l'air gentil et on n'a pas fini notre conversation. Je ne vois pas pourquoi je ne pourrais pas le revoir. »

« Ah là là... Tu peux dire ce que tu veux. Tu ne me feras pas croire que tu n'as pas un faible pour ce gars... »

Nectar (FF)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant