À la vie à la mort 1&2

91.

J'inspire profondément avant d'ouvrir l'album, et les premières images me frappent en plein cœur.

Braison et moi, assis sur le capot de sa vieille Mustang, riant à une blague dont j'ai oublié l'origine. Une autre photo, où il me porte sur son dos pendant une soirée d'été, son sourire éclatant et insouciant. Il y a aussi cette image de notre mariage quand nous étions enfants.

Chaque photo est une capsule temporelle. Chaque image raconte une histoire que Braison a oubliée.

Mes doigts tremblent légèrement alors que je tourne les pages, mon regard s'attardant sur une photo en particulier. Nous étions tous dans le salon, à moitié affalés sur le tapis, un livre ouvert entre nous, mais clairement plus intéressés par autre chose que par la lecture. Braison me regardait avec une certaine intensité pendant que je riais avec Demertria, je n'avais jamais remarqué avant le genre de regard qu'il me donnait.

Je referme doucement l'album et le serre contre ma poitrine. Mon cœur bat fort, pas seulement à cause des souvenirs, mais à cause de la peur.

Et si, malgré tous mes efforts, il ne se souvenait jamais ?

Je prends une grande inspiration et me relève, mes yeux balayant la pièce. Il y a peut-être d'autres choses ici qui pourraient l'aider. Des lettres, des objets, n'importe quoi qui pourrait raviver quelque chose en lui.

Un léger grincement me fait sursauter. Je me retourne rapidement, le cœur battant.

Kayden est adossé contre l'encadrement de la porte, les bras croisés, un air mi-amusé, mi-exaspéré sur le visage.

— Tu comptes vraiment lui ramener un album photo comme si c'était un devoir d'histoire ? demande-t-il en arquant un sourcil.

Je serre les lèvres.

— Je veux juste lui rappeler ce qu'on a vécu. Lui donner des repères.

Kayden pousse un soupir et entre dans la pièce, s'installant sur un fauteuil en cuir, l'air pensif.

— Et si ça ne marche pas ?

Cette question me hante depuis le début. Pourtant, l'entendre à voix haute la rend plus réelle, plus tranchante.

Je baisse les yeux sur l'album entre mes mains.

— Alors... alors on réapprendra à se connaître, murmuré-je.

Kayden me fixe un instant, puis un sourire léger mais sincère étire ses lèvres.

— T'es plus têtue que je le pensais.

Je hausse les épaules.

— On ne change pas si facilement.

Il éclate de rire doucement et secoue la tête avant de se lever.

— Allez, prends ce que t'as à prendre. On a assez traîné ici.

Je hoche la tête et attrape quelques autres objets : son briquet préféré, son parfum, et un t-shirt qu'il m'avait prêté et que je n'avais jamais rendu.

Quand je ressors de la bibliothèque, Pj est toujours là, accoudé au comptoir de la cuisine, une bière à la main. Il lève un sourcil en me voyant.

— Tu repars déjà ?

— Ouais. J'ai ce qu'il me faut.

Il acquiesce lentement, puis tend sa bouteille vers moi, comme un toast silencieux.

— Bonne chance, Jo.

Je souris faiblement et sors de la Maison. Kayden m'attend déjà dans la voiture.