Chapitre 5

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À l'été quatorze , Gat et moi avons pris seuls le plus petit des bateaux à moteur. C'était juste après le petit déjeuner. Bess avait emmené Mirren jouer au tennis avec Taft et les jumelles. Johnny , qui s'était lancé dans la couse à pied cette année-là , enchaînait les tours de l'île sur le chemin circulaire. Gat m'a trouvée dans la cuisine de Clairmont et m'a demandé si j'avais envie d'une balade en mer.
- Pas vraiment.
J'avais surtout envie de retourner me coucher avec mon livre.
- S'il te plait ?
Ces mots étaient extrêmement rares dans sa bouche.
- Va te balader tout seul.
- Je ne me sens pas d'emprunter le bateau , a-t-il rétorqué. Ça ne serait pas correct.
- Bien sûr que si.
- Pas sans l'un d'entre vous.
C'était ridicule.
- Où est-ce que tu veux aller ? lui ai-je demandé.
- J'ai juste envie de m'éloigner un peu. Parfois , j'étouffe sur cette île.
J'étais loin de comprendre , à l'époque , ce qu'il trouvait si étouffant , mais j'ai accepté. On a filé vers le large avec nos coupe-vent par-dessus nos maillots de bain. Au bout d'un moment , Gat a coupé le moteur. On a grignoté des pistaches en respirant le bon air marin. Le soleil faisait scintiller la surface de la mer.
- Allons-y , ai-je déclaré.
Gat a sauté le premier. Je l'ai suivi. L'eau était tellement plus froide qu'au bord de la plage que le choc thermique nous a coupé le souffle. Le soleil a disparu derrière un nuage. On a été pris un petit rire nerveux et on s'est écriés que c'était l'idée la plus stupide qu'on ai jamais eue. Qu'est-ce qui nous était passé par la tête ? Il y avait des requins au large , tout le monde le savait !
- Ne me parle pas de requins , t'es dingue !
On sa est chamaillés dans l'eau pour grimper l'échelle et remonter en premier à l'arrière du bateau.
Au bout d'un moment , Gat a fini par s'écarter pour me laisser passer.
- Pas parce que t'es une fille , mais parce que je suis un type bien , a-t-il précisé.
- Merci.
Je lui ai tiré la langue.
- Mais si un requin vient m'arracher les jambes , promets-moi de faire un discours à mon enterrement pour dire à quel point j'étais cool.
- Promis. Gatwick Matthew Patil faisait trop bien la cuisine.
On trouvait sa hilarant d'avoir aussi froid. On n'avait même pas prévu de serviettes. On s'est pelotonnés sous une couverture en polaire trouvée par hasard dans le caisson sous nos sièges , nos épaules nues pressées l'une contre l'autre. Nos pieds glacés , entrelacés.
- C'est juste pour qu'on ne meure pas d'hypothermie , déclaré Gat. T'imagines pas que je te trouve mignonne ou quoi.
- Je ne me fais aucunes illusions.
- Tu prends toute la couverture.
- Désolée.
Silence.
Il a repris la parole :
- Je te trouve très mignonne , Cady. Je ne voulais pas dire sa. Et d'ailleurs , depuis quand t'es devenue jolie ? C'est très perturbant , tu sais.
- J'ai toujours la même tête qu'avant.
- Tu as changé pendant l'année scolaire. Ça fout en l'air toute ma stratégie.
- Parce que tu as une stratégie ?
Il a acquiescé d'un air grave.
- Jamais rien entendu d'aussi débile. Et c'est quoi cette stratégie ?
- Rien ne transperce jamais mon armure. Tu n'avais pas remarqué ?
Sa réponse m'a fait rire.
- Ben non.
- Zut. Et moi qui croyais que sa marchait.
On a parlé d'autre chose. D'emmener les petits au cinéma d'Edgartown dans l'après-midi. Du fait de savoir si les requins mangeaient vraiment les humains ou non. De Plantes contre zombies.
Puis on a remis le cap sur l'île.
Après cet épisode , Gat a commencé à me prêter ses livres et à venir me retrouver sur la petite plage en début de soirée. Ou bien à me chercher quand j'étais étendue sur la pelouse de Windemere avec mes chiens.
On s'est mis à se balader ensemble sur le petit sentier qui longeait la côte , lui devant et moi derrière. On parlait bouquins , on s'inventait des mondes imaginaires. Parfois , il nous arrivait de faire plusieurs fois le tour de l'île avant de sentir pointer la faim ou l'ennui.
Des rosiers du Japon bordaient la promenade. Leurs pétales roses dégageaient un léger parfum sucré.
Un jour que j'observais Gat en train de lire dans le hamac de Clairmont , j'ai eu la sensation... comment dire... qu'il m'appartenait. Qu'il était fait pour moi.
Sans bruit , je me suis glissée dans le hamac , à côté de lui. Je lui ai pris le stylo qu'il tenait entre ses doigts - il ne lisait jamais sans - puis j'ai écrit Gat sur sa main gauche et Cadence sur la droite.
Il m'a repris le stylo. Il a écrit Gat sur ma main gauche , et Cadence sur la droite.
Je ne dis pas que c'était le destin. Je n'y crois pas , de toute manière. Pas plus qu'aux âmes sœurs ni aux délires surnaturels. Je dis juste qu'on se comprenait , lui et moi. On était sur la même longueur d'ondes.
Mais on avait que quatorze ans. Je n'avais jamais embrassé de garçons - même si j'en embrasserais plus d'un au cours de l'année scolaire à venir - et il ne nous serait pas venu à l'esprit d'appeler sa de l'amour.
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